Les forces de sécurité birmanes ont tiré en l'air et lancé des gaz lacrymogènes sur la foule des manifestants à Rangoon mercredi, tandis que des moines bouddhistes étaient emmenés dans des camions militaires, lors des premières arrestations massives depuis le début des manifestations anti-gouvernentales la semaine dernière en Birmanie. Selon un groupe dissident en exil, quelque 300 moines et autres militants ont été arrêtés dans la plus grande ville du pays où les religieux ont bravé l'interdiction de manifester édictée la veille par la junte militaire au pouvoir, après huit jours de contestation massive -la plus forte depuis près de 20 ans en Birmanie. Des journalistes ont vu des moines être embarqués de force à bord de camions. Selon une station de radio dissidente basée en Norvège, un moine a été tué et plusieurs autres blessés dans des affrontements à Rangoon. Le décès n'a pu être confirmé par d'autres sources. Quelque 5.000 moines et 5.000 étudiants ainsi que des membres de la Ligue nationale pour la démocratie de l'opposante birmane et Prix Nobel de la Paix Aung San Suu Kyi ont quitté la Pagode Shwegadon en direction de la Pagode Sule située au coeur de la plus grande ville de Birmanie, mais ils ont été bloqués par des camions des forces de l'ordre sur la route. Des gaz lacrymogènes ont été tirés. Certains manifestants portaient des drapeaux avec un paon, symbole du mouvement démocratique en Birmanie. Une centaine de moines sont restées près de la Pagode Shwedagon pour tenir coûte que coûte leur position devant la porte ouest du temple, malgré les ordres de dispersion de la police anti-émeute. Des soldats armés de fusils d'assaut avaient au préalable bloqué les quatre entrées principales de la pagode la plus sacrée du pays. D'après une branche de la Ligue pour la démocratie exilée en Thaïlande, 300 personnes ont été arrêtées à Rangoon, la plupart dans un quartier situé à l'ouest de la ville. Ce chiffre n'a pu être confirmé. A Mandalay, la deuxième ville du pays, quelque 800 moines, religieuses et manifestants de tous horizons ont joué au chat et à la souris avec plus de 100 soldats qui prétendaient leur interdire l'accès à la Pagode Paya. Après une confrontation extrêmement tendue, les moines se sont dirigés vers le centre ville où patrouillaient les forces de sécurité. Mardi, au huitième jour de manifestations quotidiennes, la junte militaire birmane avait imposé un couvre-feu dans les principales villes du pays et interdit tout rassemblement de plus de cinq personnes. Tirant en l'air, frappant leurs boucliers à l'aide bâtons et hurlant des ordres de dispersion, les policiers ont pris en chasse certains des moines et quelques-uns des 200 partisans qui les applaudissaient autour de la Pagode Shwegadon à Rangoon mercredi. Dans le chaos, des personnes sont tombées à terre et au moins un moine a été battu à coups de matraques, selon des témoins. D'autres moines auraient également été frappés. Emmanuel Mourier, diplomate à l'ambassade de France en Birmanie, a évoqué mercredi "des tirs de la part des forces de l'ordre, d'abord en l'air, puis sur des manifestants", sans toutefois pouvoir dire "s'il y a beaucoup de personnes blessées ou tuées". "Mais on peut être certain que le sang a coulé", a-t-il déclaré sur RTL. "Certains moines ont été passés à tabac, d'autres ont été arrêtés et emmenés à bord de camions militaires", a-t-il ajouté. Dans la nuit de mardi à mercredi, un comédien birman célèbre pour sa critique sarcastique du gouvernement a été arrêté. Les autorités sont allés chercher Zarganar à son domicile peu après minuit et l'ont emmené, disant à sa famille qu'il allait être "interrogé", mais que ce serait "temporaire". Mardi, au huitième jour de manifestations anti-gouvernementales qui ont rassemblé jusqu'à 100.000 personnes, la junte militaire a déployé des camions militaires et des soldats dans les principales villes du pays, et demandé aux moines de ne plus se mêler de politique et de cesser toute manifestation. Les cortèges, dont le plus important s'était formé à Rangoon, se sont dispersés vers 17h00 locales sur la promesse de recommencer les manifestions tous les jours jusqu'à obtenir des excuses de le junte birmane.