La Banque centrale européenne (BCE) a décidé avant-hier de baisser son principal taux directeur, le portant à un nouveau plus bas historique, prenant ainsi par surprise analystes et marchés. Le loyer de l'argent en zone euro a été porté à 0,25% alors qu'il stationnait à 0,5% depuis mai. La très grande majorité des analystes s'attendaient à ce que la BCE résiste, du moins ce mois-ci, aux appels de certains investisseurs et responsables politiques à abaisser son taux directeur pour lutter contre le spectre de la déflation, engrenage synonyme de baisse des prix mais aussi de diminution des salaires et de l'activité économique. L'inflation en zone euro a atteint en octobre un plus bas depuis fin 2009, à 0,7%, bien loin de l'objectif de la BCE de le maintenir proche de 2%. "La BCE vient de surprendre la plupart des analystes, nous y compris", a commenté Brzeski, économiste de ING qui se dit "stupéfait". "Les risques de déflation et l'euro fort semblent avoir motivé cette décision", poursuit-il, jugeant que la BCE sous la présidence de l'Italien Mario Draghi "est devenue bien plus proactive que sous ses prédécesseurs". "C'est le timing qui est une surprise, non la décision elle-même", a estimé Bruno Cavalier, d'Oddo Securities. "En dessous de 1%, on entre dans une zone où l'écart par rapport à la cible d'inflation de 2% met en jeu la crédibilité de la BCE", expliquait-il récemment. Tout en considérant que la zone euro était potentiellement au seuil d'une "période prolongée d'inflation basse", le président de la BCE Mario Draghi a dit ne pas anticiper de déflation, lors de sa conférence de presse mensuelle de politique monétaire. Alors que le ministre français de l'Economie Pierre Moscovici a salué une "bonne nouvelle limitant les risques de déflation", les places boursières de Francfort et Paris ont réagi de manière enthousiaste à la baisse de taux. Les taux d'emprunt à 10 ans de l'Espagne et de l'Italie ont baissé sur le marché secondaire où s'échange la dette déjà émise. Quant à l'euro, dont l'appréciation commençait à inquiéter des pays comme la France et l'Italie, il est tombé peu après l'annonce à son plus bas niveau depuis mi-septembre face au dollar, même si M. Draghi a affirmé que l'euro fort n'avait joué "aucun rôle" dans la décision de baisser le taux directeur.
La BCE pas désarmée Pour autant, peu de résultats sont à attendre de cette décision, juge Holger Schmieding, de la banque Berenberg car "les taux étaient déjà très bas". "Nous ne nous attendons pas non plus à ce que cela cause des dégâts. Les risques d'inflation sont exceptionnellement modérés, y compris en Allemagne, qui importe la moitié de ce qu'elle consomme", estime-t-il, alors que la Banque centrale allemande a récemment mis en garde contre la hausse des prix immobiliers dans le pays, un phénomène qu'elle lie directement aux taux faibles. La baisse de taux rassure par ailleurs sur le crédit à accorder au "biais baissier" adopté par la BCE en juillet. Elle s'était engagée à laisser ses taux à leur niveau faible actuel, voire à les baisser encore. Un engagement réitéré jeudi, alors que certains s'interrogent sur les marges de manoeuvre qu'il reste à l'institution monétaire de Francfort si la situation devait se dégrader. "Nous n'avons pas atteint encore les limites" de notre action, a rétorqué M. Draghi, soulignant que la BCE pouvait encore baisser ses taux et disposait d'un large éventail d'instruments dans son "artillerie". Le conseil des gouverneurs pourrait ainsi décider de réduire sous 0% son taux de dépôt auquel les banques placent de l'argent chez elle pour 24 heures. Un pas qu'il hésite à franchir depuis des mois. "Nous sommes techniquement prêts", a répété M. Draghi. Un éventuel prêt à long terme aux banques de la région, à l'image des deux accordés fin 2011 et début 2012, pourrait également être à l'ordre du jour. Pour le moment, la BCE s'est contentée d'allonger d'un an, jusqu'à mi-2015, ses allocations illimitées et à taux fixe de liquidités à une semaine, un mois et trois mois.
La BCE vise une inflation proche de 2% L'inflation en zone euro a atteint en octobre un plus bas depuis fin 2009, à 0,7%, bien loin de l'objectif de la BCE de le maintenir proche de 2%. "La BCE vient de surprendre la plupart des analystes, nous y compris", a commenté Carsten Brzeski, économiste chez ING qui se dit "stupéfait". "Les risques de déflation et l'euro fort semblent avoir motivé cette décision", poursuit-il, jugeant que la BCE sous la présidence de l'italien Mario Draghi "est devenue bien plus pro-active que sous ses prédécesseurs". Pour Howard Archer, chef économiste chez IHS Global Insight, l'inflation d'octobre "n'est plus à un niveau cohérent avec l'objectif de la BCE". Avant cette décision, Bruno Cavalier, de Oddo Securities, avait jugé que "en-dessous de 1%, on entre dans une zone où l'écart par rapport à la cible d'inflation de 2% met en jeu la crédibilité de la BCE". Quant à l'euro, il est tombé peu après l'annonce à son plus bas niveau depuis mi-septembre face au dollar. Certains espèrent l'annonce d'autres mesures, comme un nouveau prêt à long terme aux banques à des conditions très favorables (ou LTRO), dans l'espoir que cette nouvelle injection de liquidités les incite à prêter à leur tour pour faire redémarrer la machine économique. C'est "l'option de prédilection de beaucoup d'acteurs de marché et d'économistes", notent Jörg Krämer et Michael Schubert, de Commerzbank. Mais, remarquent Mark Wall et Gilles Moëc de Deutsche Bank, s'il s'est dit prêt à user de "tous les moyens disponibles" pour soutenir l'économie, M. Draghi n'a pas fait référence nommément à cet instrument dans ses discours récents. Ils jugent donc plus probable que la BCE décide encore de prolonger sa politique d'allocation illimitée de liquidités hebdomadaires et mensuelles à taux fixe au-delà de juillet 2014.
Le FMI salue une décision justifiée face à une reprise fragile Le Fonds monétaire international (FMI) a salué la baisse des taux décidée par la Banque centrale européenne (BCE), jugeant cette décision totalement justifiée au vu de la fragilité de la reprise dans la zone euro. La décision est totalement justifiée par les dynamiques d'inflation faible et par l'importante mollesse de l'économie en zone euro, a déclaré le porte-parole du Fonds, Gerry Rice, lors d'une conférence de presse à Washington. Prenant les marchés par surprise, la BCE a décidé jeudi de baisser son principal taux directeur, le portant à un nouveau plus bas historique de 0,25% contre 0,50% jusqu'à présent. Selon le porte-parole du FMI, cette décision pourra permettre de soutenir une croissance fragile à l'heure où la sortie de récession en zone euro reste prévue pour 2014 mais s'annonce moins tranchante. Les perspectives restent compliquées, a encore commenté M. Rice, assurant que le FMI surveillait les risques de déflation dans la région, épicentre de la crise de la dette. L'inflation dans la zone euro a fermement décliné au cours des récents mois avec des pressions déflationnistes qui s'intensifient dans certains pays de la périphérie de la région, a souligné M. Rice. Interrogé sur le fait de savoir si la BCE devait envisager d'autres mesures, le porte-parole a indiqué qu'il fallait procéder étape par étape et attendre d'évaluer les conséquences de cette baisse des taux.
"Période prolongée d'inflation basse", selon Draghi Le président de la Banque centrale européenne (BCE) Mario Draghi a prévenu que la zone euro était potentiellement au seuil d'une "période prolongée d'inflation basse", mais indiqué ne pas anticiper de déflation. La constellation économique actuelle, avec notamment une faible activité de crédit, suggère que la zone euro peut se trouver au seuil d'une "période prolongée d'inflation basse avant une reprise graduelle" de l'évolution des prix, a dit M. Draghi lors de sa conférence de presse mensuelle. Mais "nous n'anticipons pas de déflation", a précisé M. Draghi. La timidité de la reprise en zone euro ne laisse pas présager d'accélération du rythme de la hausse des prix, a suggéré M. Draghi, répétant que de nombreux risques continuaient de peser sur la conjoncture dans la zone. Il a ajouté que la BCE préciserait le mois prochain la durée approximative de la "période prolongée" évoquée. "Ce ne sera pas une courte période", a-t-il dit.
"D'autres instruments en réserve" La Banque centrale européenne (BCE) a annoncé aussi, le prolongement de plusieurs opérations de prêts illimités de court terme aux banques et assuré disposer encore d'instruments en réserve pour agir. Ses allocations illimitées et à taux fixe de liquidités à une semaine et un mois, baptisées MRO et prévues jusqu'à juillet 2014, seront poursuivies "aussi longtemps que nécessaire et au moins jusqu'au 7 juillet 2015", a fait savoir son président, Mario Draghi, lors d'une conférence de presse à Francfort (ouest de l'Allemagne), où siège la BCE. En outre, les opérations de plus longue durée (LTRO) de prêts sur trois mois courront elles jusqu'à la fin du deuxième trimestre 2015, contre mi-2014 annoncé jusqu'à présent, également à taux fixe et pour des montants illimités. Le conseil des gouverneurs de la BCE n'a en revanche pas parlé spécifiquement d'un nouveau LTRO de plus long terme, à l'image des deux prêts à trois ans accordés fin 2011 et début 2012, a indiqué M. Draghi. "Nous n'avons pas atteint encore les limites" de notre action, a également soutenu M. Draghi, soulignant que la BCE pouvait encore baisser les taux et disposait d'un large éventail d'instruments dans son "artillerie". Le conseil des gouverneurs de la BCE a une nouvelle fois discuté de faire passer en territoire négatif son taux de dépôt au jour le jour, auquel les banques peuvent placer de l'argent chez elle pour 24 heures, a précisé M. Draghi, et qui stationne à 0% depuis juillet 2012. Elle a néanmoins choisi de le maintenir à zéro. Par ailleurs, M. Draghi a affirmé l'appréciation de l'euro par rapport aux autres monnaies mondiales n'a joué "aucun rôle" dans la décision de la Banque centrale européenne (BCE) d'abaisser son principal taux directeur à 0,25%. Le taux de change de la monnaie européenne "n'est pas un objectif" de la politique monétaire de la BCE, a dit M. Draghi. Cet aspect "n'a joué aucun rôle dans la décision prise aujourd'hui", a-t-il ajouté. "Pour autant que je me souvienne il n'a pas été mentionné" lors de la réunion du conseil des gouverneurs du jour.