Le président ukrainien destitué Viktor Ianoukovitch fait l'objet d'un mandat d'arrêt, a fait savoir hier le ministre de l'Intérieur par intérim Arsen Avakov sur son compte Facebook. Il est soupçonné de "meurtres de masse" de civils, après les violents affrontements de la semaine dernière à Kiev. "Une enquête criminelle a été ouverte pour meurtre de masse de civils à l'encontre de Ianoukovitch et de plusieurs autres fonctionnaires. Un mandat d'arrêt est lancé contre eux", a écrit le ministre. Destitué samedi, M. Ianoukovitch, qui n'a pas donné signe de vie depuis, a été lâché par son propre parti (Parti des régions) qui le juge "responsable des événements tragiques" des derniers jours. Les violents affrontements au centre de Kiev ont fait 82 morts la semaine dernière.
Système de pots-de-vin organisé Des documents potentiellement explosifs détaillant un système de pots-de-vin organisé et une liste de journalistes à surveiller ont été découverts dans sa résidence en banlieue de Kiev. Le Parlement ukrainien doit se réunir en vue de former un nouveau gouvernement. La destitution du président ouvre une nouvelle ère pour ce pays en crise depuis trois mois qui se trouve face à des difficultés abyssales, à commencer par un fort risque de défaut de paiement. Dimanche, le Parlement, désormais dominé par les anti-Ianoukovitch, a pris les choses en main et nommé Olexandre Tourtchinov, un proche de l'opposante Ioulia Timochenko, au poste de président par interim. La nomination d'un gouvernement devait suivre dans les 48 heures, en attendant la tenue d'une élection présidentielle le 25 mai.
Moscou rappelle son ambassadeur Le ministère russe des Affaires étrangères a rappelé dimanche son ambassadeur à Kiev, Mikhaïl Zourabov, pour des consultations suite à l'aggravation de la situation en Ukraine, lit-on sur le site officiel de la diplomatie russe. "Suite à l'escalade de la situation en Ukraine et vu la nécessité d'analyser la situation actuelle sous ses différents aspects, il a été décidé de rappeler à Moscou pour des consultations l'ambassadeur de la Fédération de Russie en Ukraine, Mikhaïl Zourabov", indique le ministère dans un communiqué. Vendredi, le président ukrainien Viktor Ianoukovitch et les principaux leaders de l'opposition ont conclu un accord sur le règlement de la crise politique en Ukraine qui prévoyait un retour au régime parlementaire, la formation d'un gouvernement d'union nationale et la tenue d'une élection présidentielle anticipée avant la fin de l'année en cours. Samedi, sans attendre que le président signe le document sur le retour à la Constitution de 2004, la Rada Suprême a modifié la Constitution et a désigné un nouveau président du Parlement et un nouveau ministre de l'Intérieur. Le congrès des représentants des régions du sud-est de l'Ukraine ont mis en doute la légitimité de ces démarches, s'engageant à défendre l'ordre constitutionnel sur leurs territoires. Cité samedi soir, via sa conseillère Anna German, le président ukrainien a déclaré que la situation dans le pays présentait tous les signes d'un coup d'Etat, ajoutant qu'il n'était pas prêt à céder à des pressions et à démissionner. La veille, la Rada a élu le président du Parlement Alexandre Tourtchinov au poste de président par intérim, en remplacement de Viktor Ianoukovitch. Dans ce contexte, Moscou a appelé l'opposition à respecter les accords de sortie de crise atteints le 21 février.
Kiev prêt au dialogue avec les autorités russes Consciente de l'importance des relations avec Moscou, l'Ukraine est ouverte au dialogue avec les autorités russes, a déclaré le président de la Rada Suprême (parlement) Alaxandre Tourtchinov, élu dimanche par cette dernière président ukrainien par intérim. "Nous sommes conscients de l'importance des relations avec la Fédération de Russie et nous sommes prêts à un dialogue avec ses autorités afin de fonder des liens avec ce pays sur une nouvelle base d'égalité et de bon voisinage qui reconnaîtrait et prendrait en compte le choix européen fait par l'Ukraine", a indiqué M. Tourtchinov, cité sur le site officiel du parti Batkivchina.
Kiev doit coopérer avec Moscou Le ministre polonais des Affaires étrangères Radoslaw Sikorski a souligné hier dans une intervention relayée par la chaîne télévisée CNN qu'il était très important pour les nouvelles autorités ukrainiennes d'établir des liens de coopération avec la Russie. "Les nouvelles autorités ukrainiennes doivent établir des relations, coopérer avec la Russie qui est un pays voisin très important de l'Ukraine", a déclaré le chef de la diplomatie polonaise dans une interview accordée à la chaîne. Il a aussi souligné que l'intégrité territoriale du pays ne devait en aucun cas être violée. "L'Ukraine est un Etat totalement indépendant dont la souveraineté et les frontières sont garanties par la Déclaration de Budapest signée en 1994 par les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et la Russie. L'Ukraine est un grand pays avec une population de plus de 40 millions d'habitants. Il serait très dangereux de donner libre cours au séparatisme dans le pays", a indiqué le ministre polonais. Selon lui, l'opposition ukrainienne comprend "des gens qui savent ce qui doit être fait et qui sont capables de dialoguer tant avec l'Occident qu'avec la Russie".