General Electric a promis de créer 1 000 emplois en France s'il rachète le pôle énergie d'Alstom, après une réunion à l'Elysée qui a salué l'amélioration de son offre sur le fleuron industriel français, tout en estimant qu'il pouvait encore faire mieux. L'emploi est une des préoccupations majeures du gouvernement, qui s'est posé en arbitre dans ce dossier qu'il juge stratégique pour les intérêts industriels de la France. General Electric s'engage à créer 1 000 emplois en France sur trois ans, a indiqué une source proche du dossier, à l'issue d'une rencontre entre le président de la République François Hollande et le P-DG du conglomérat, Jeffrey Immelt. Ces créations nettes d'emplois industriels seraient passées en revue par une instance indépendante, a-t-elle précisé. C'était la deuxième fois que Jeffrey Immelt était reçu à l'Elysée depuis que GE a formalisé fin avril son offre d'un montant de 12,35 milliards d'euros pour racheter les activités d'énergie d'Alstom, élaborée secrètement avec le fabricant de TGV et de centrales électriques au grand dam du gouvernement. A la demande de l'exécutif, qui refusait d'être mis devant le fait accompli, GE a décidé de prolonger son offre de trois semaines, jusqu'au 23 juin, pour convaincre de sa pertinence face à la proposition de son rival allemand Siemens, qui a les faveurs de Bercy. Le groupe du Connecticut est implanté de longue date en France, où il compte 10 000 salariés, et son patron s'était engagé devant l'Assemblée nationale à prendre des engagements chiffrés sur l'emploi. De son côté, Alstom emploie 18 000 dans le pays, dont 9 000 dans l'énergie. Aujourd'hui, il a été possible de constater que la proposition de General Electric s'est précisée, s'est améliorée, s'est renforcée, notamment sur l'emploi, a-t-on indiqué à l'Elysée, sans commenter les chiffres avancés. Il reste toutefois du travail à accomplir au cours des prochaines semaines, selon la même source. Outre l'emploi, l'Etat a demandé aux prétendants de renforcer le pôle transport d'Alstom, craignant pour l'avenir de ce petit poucet en cas de cession des activités énergie, qui représentent environ 70% des revenus du groupe. Défendant une alliance plutôt qu'une acquisition, il exige aussi le maintien des centres de décisions en France et la sanctuarisation de la technologie nucléaire de l'industriel, dont les turbines à vapeur équipent les centrales d'EDF. L'exécutif s'est ainsi doté d'un décret élargissant son droit de veto en cas de visées étrangères sur des entreprises stratégiques. Nous souhaitons que l'ensemble des offrants améliorent leurs offres, a insisté le ministre de l'Economie, Arnaud Montebourg, interrogé devant l'Assemblée. GE a dit qu'il œuvrait à une solution pour garantir un accès de ses partenaires français à ces équipements. Il a aussi répété qu'il localiserait en France ses centres mondiaux pour les activités turbine à vapeur, énergie hydraulique, éolien offshore et réseaux électriques, tandis que le centre d'excellence pour les turbines à gaz resterait à Belfort. Nous avons eu une discussion constructive sur le détail de notre projet d'alliance avec Alstom. Nous progressons et pensons aboutir à une conclusion ces toutes prochaines semaines, a-t-il assuré dans un communiqué. Siemens a de son côté l'intention de déposer une offre le 16 juin au plus tard s'il bénéficie d'un processus équitable, comme le lui a promis le PDG d'Alstom, Patrick Kron, pourtant favorable à GE. On travaille avec la perspective de deux propositions, a-t-on souligné à l'Elysée.
Double jeu Pour Christopher Dembik, analyste chez Saxo Banque, il n'est pas improbable, en fait, que l'Etat français joue un double jeu, poussant Siemens à faire une offre pour contraindre GE à des concessions qui auraient été exclues autrement. Dans une proposition préliminaire, l'industriel allemand a évalué les activités énergie d'Alstom entre 10,5 et 11 milliards d'euros et a proposé de lui apporter en plus ses activités ferroviaires, un secteur sur lequel le groupe français veut se recentrer. Il a aussi garanti l'emploi pour trois ans. Aujourd'hui, nous préparons notre décision avec sérénité, sérieux et détermination, a déclaré le patron de Siemens France, Christophe de Maistre, disant vouloir créer deux champions européens de taille mondiale. Le grand Alstom Transport qu'il envisage serait détenu majoritairement par des capitaux français avec un siège en France, comme celui des activités de transmission électrique, d'hydroélectricité et de turbines à vapeur. Comme son rival, GE s'est engagé à renforcer le pôle transport d'Alstom, se disant ouvert à l'éventualité d'un engagement de l'Etat français dans une alliance économique. Sur la lucrative signalisation ferroviaire, M. Immelt a promis de laisser le contrôle à Alstom, tandis que Siemens voudrait les racheter au groupe français. Plusieurs schémas sont envisagés, a reconnu l'Elysée. Des discussions sont aussi en cours entre GE et Areva dans l'éolien offshore, mais le président du conseil de surveillance du groupe nucléaire a conditionné un tel rapprochement à l'abandon de la technologie Alstom, dans le journal Les Echos. Quant au plan C franco-français évoqué par Arnaud Montebourg, il s'agirait seulement d'une façon d'envisager la meilleure solution possible, selon l'Elysée.