La production d'électricité éolienne ou solaire sera bientôt plus compétitive que celle du courant d'origine nucléaire en cas de prolongation de la durée de vie des centrales françaises au-delà de 40 ans, qui requiert de lourds investissements, prédit Greenpeace dans une étude publiée, avant-hier. Selon l'ONG écologiste, prolonger la durée de vie des réacteurs nucléaires français de 10 ans, à un niveau de sûreté similaire à celui du nouveau réacteur EPR, se traduirait par un coût de production moyen de 133 euros par mégawattheure (MWh), pour un investissement de 4,35 milliards d'euros par réacteur. Cette estimation du coût des investissements nécessaires dans la sûreté diffère nettement de celle d'EDF, qui évalue à environ un milliard d'euros la somme qui doit être investie par réacteur, soit 55 milliards pour la totalité du parc. La Cour des comptes estime elle que les investissements nécessaires seraient plutôt de l'ordre de 62,5 milliards à l'horizon 2025, et même 90 milliards jusqu'en 2033. Selon l'analyse de Greenpeace, qui a condensé des études et données déjà produites par différents organismes, le coût courant économique du nucléaire dépasserait, dans ces conditions, les coûts futurs de production des principales énergies renouvelables électriques. Ce dépassement serait effectif dès aujourd'hui pour l'éolien terrestre (coût compris entre 40 et 80 euros/MWh), dès 2018 pour le solaire et à partir de 2020 pour l'éolien maritime, a indiqué Cyrille Cormier, chargé de l'Energie et du climat à Greenpeace, lors d'une présentation à la presse. Le responsable de l'ONG a insisté sur la nécessité de prendre aujourd'hui des décisions sur la durée de vie des centrales, en rappelant que deux-tiers du parc des réacteurs aura 40 ans en 2025. Ne pas prendre de décision aujourd'hui revient de fait à prolonger les centrales, faute d'alternatives déployées d'ici 2025, pour prendre le relais des centrales qui fermeraient après 40 ans de fonctionnement, a-t-il ajouté. Les alternatives sont soit la construction de nouveaux réacteurs nucléaires, ce à quoi Greenpeace est opposé, soit le développement des énergies renouvelables. Si on remplace les anciens réacteurs par des EPR, le coût de production médian serait d'environ 95 euros par MWh, a précisé Cyrille Cormier, un coût qui serait selon l'ONG comparable à celui de l'éolien terrestre, mais en deçà de l'éolien maritime et du photovoltaïque. En revanche, avec les énergies renouvelables, les risques sur les investissements et les risques liés à la sûreté sont bien moins élevés, a mis en avant le chargé de campagne Energie et climat. Au sujet des risques liés aux investissements, il a souligné que la décision de prolonger l'exploitation des centrales et les travaux nécessaires relevaient de l''Autorité de sûreté nucléaire et non de l'exploitant EDF. Tous ces éléments devraient entraîner le choix de ne pas prolonger la durée de vie du parc actuel et plaider en faveur d'un plan massif d'investissements dans les renouvelables, a conclu Cyrille Cormier. Dans un rapport publié fin mai, la Cour des comptes avait déjà tiré la sonnette d'alarme contre l'augmentation croissante du coût de l'énergie atomique en France, qui représente 75% de la production électrique du pays, en raison d'importants investissements dans les centrales vieillissantes. Elle avait établi qu'entre 2010 et 2013, le coût de production moyen des centrales françaises avait augmenté de 20%. Le dimensionnement du parc nucléaire est au cœur du débat sur la transition énergétique, l'un des chantiers majeurs du quinquennat selon François Hollande. La loi sur la transition énergétique, dont la première mouture doit être présentée la semaine prochaine en conseil des ministres, doit notamment préciser comment le gouvernement compte parvenir à faire baisser à 50% la part du nucléaire dans la production d'électricité d'ici 2025, l'un des engagements de campagne du président de la République.