EDF et Londres sont parvenus à un accord final pour la construction de deux réacteurs nucléaires de type EPR en Angleterre, a-t-on appris de source proche du dossier, et l'officialisation est attendue aujourd'hui après de longs mois de négociation serrée. Le montant du contrat obtenu par le géant français de l'électricité n'est pas encore connu mais, sur la base de chantiers similaires en France et en Finlande, il pourrait dépasser la quinzaine de milliards d'euros. Surprise de dernière minute: le groupe nucléaire français Areva, qui fournira les réacteurs EPR de 1 650 mégawatts chacun sur le site d'Hinkley Point dans l'ouest de l'Angleterre, prendra aussi 10% du projet, selon cette source au fait de la situation. Les deux groupes nucléaires chinois CGNPC et CNNC auront également une participation minoritaire, a-t-on expliqué de même source, alors que le gouvernement britannique vient d'ouvrir la porte à des prises de participation chinoises, y compris majoritaires, dans son nouveau programme nucléaire civil. Ces participations permettront de répartir les frais: selon le Wall Street Journal, la part chinoise devrait être comprise entre 30 et 40% et celle d'EDF, qui sera maître d'œuvre, avoisiné les 45 à 50%. EDF, Areva et le ministère britannique de l'Energie n'ont souhaité faire aucun commentaire. Les négociations restent en cours entre le gouvernement et EDF sur les termes potentiels d'un contrat d'investissement pour Hinkley Point C, a simplement affirmé un porte-parole à Londres.
Le coût de l'électricité nucléaire en hausse Les discussions entre EDF et le gouvernement britannique duraient depuis de longs mois et achoppaient jusqu'à présent sur la question du prix garanti de vente de l'électricité nucléaire que produiront les EPR. De source proche du dossier, les deux parties se sont finalement accordées sur un prix de 92,5 livres (109 euros) par mégawattheure et l'accord devrait être officialisé aujourd'hui. Londres s'était déjà dit dimanche extrêmement proche d'un accord. Celui-ci doit être encore approuvé lors d'un conseil d'EDF. Le prix, presque deux fois plus élevé que le prix de gros sur le marché de l'électricité au Royaume-Uni, était une condition sine qua non pour que l'électricien français accepte de réaliser cet important investissement. Son montant confirme au passage la forte hausse du coût de l'électricité nucléaire, les centrales actuelles d'EDF en France produisant du courant à un coût estimé à 40 euros/mégawattheure. Ce contrat permet aussi à Areva de cocher les deux premières cases de son objectif de 10 EPR vendus d'ici 2016, dans une industrie nucléaire dont les perspectives ont été compliquées par la catastrophe de Fukushima. L'accident nippon n'a pas modifié les intentions britanniques de continuer le nucléaire civil: les réacteurs d'Hinkley Point seront les premiers construits au Royaume-Uni depuis celui de Sizewell B, inauguré en 1995, et Londres espère concrétiser d'autres projets, sur le site historique de Sellafield notamment. Le pays, qui mise aussi sur les renouvelables, doit renouveler dans les prochaines années une importante partie de son parc de production d'électricité, notamment à cause de la fermeture de centrales polluantes au charbon et afin d'anticiper le vieillissement de son parc nucléaire existant (16 réacteurs). Une incertitude plane néanmoins: le modèle du prix garanti (strike price) obtenu par EDF doit encore passer sous les fourches caudines européennes, et montrer qu'il n'est pas une aide d'Etat contraire au droit communautaire. Ce prix garanti élevé est d'ores et déjà la cible des écologistes et des anti-atome, qui y voient la preuve que le nouveau nucléaire ne peut voir le jour sans subventions. En somme, ce prix d'achat garantirait à EDF d'être payé très cher et principalement par le contribuable britannique pour une énergie dangereuse et incertaine, a dénoncé Greenpeace dans un courriel. A la Bourse de Paris, l'action EDF a terminé en hausse de 0,87% à 25,65 euros, poursuivant l'embellie constatée depuis plusieurs mois à la faveur de décisions gouvernementales favorables en France. Areva a perdu lui 3,37% à 13,75 euros, le marché semblant sanctionner la prise de participation.