Une tripartite réunissant le gouvernement et les partenaires économiques et sociaux est prévue ce jeudi 18 septembre 2014. L'Algérie se trouvant à la croisée des chemins, il s'agit impérativement, pour des raisons de sécurité nationale, de se projeter dans l'avenir en cette ère de mondialisation impitoyable, et ce, en évitant des promesses chimériques. Pour la réussite de cette tripartite, je recense SEPT axes-directeurs interdépendants conditionnant le développement socio-économique dynamique de l'Algérie devant éviter le statu quo suicidaire. 1-Premièrement, les critères de représentativité utilisés aujourd'hui, indépendance, importance des effectifs, montant des cotisations reçues, expérience et ancienneté du syndicat, attitude patriotique pendant la guerre de libération nationale sont peu adaptés à la réalité actuelle. Les deux critères ajoutés par la jurisprudence (activité du syndicat en termes d'ampleur et d'efficacité, d'une part, et influence du syndicat, d'autre part, c'est-à-dire sa capacité à mobiliser les salariés) n'ont pas permis de surmonter ces difficultés. Aussi, il s'agit de fonder la représentativité syndicale sur le seul critère de l'élection. L'audience électorale doit devenir le critère incontournable de la représentativité. Elle doit être appréciée au regard des résultats des élections des délégués du personnel et des représentants du personnel au comité d'entreprises. Une meilleure représentativité passe par un choix entre représentation uniforme et représentation multiple. Quelle que soit la solution retenue, les règles de représentativité doivent être revues dans le sens " une entreprise - une voix ", pour une meilleure représentation. Cette révision des règles de représentativité doit s'accompagner d'une transparence accrue en matière de financement des comptes des fédérations et confédérations patronales. Lorsqu'un pouvoir agit bureaucratiquement, sans concertation et sans tenir compte de la réelle composante sociale, la société enfante ses propres règles qui lui permettent de fonctionner en dehors de l'Etat officiel, se traduisant alors par un divorce croissant Etat/citoyens. On ne relance pas l'activité industrielle par décret ou par volontarisme étatique, vision d'une mentalité bureaucratique rentière. L'objectif est de faire de la négociation collective le moyen privilégié de la transformation du droit du travail et de la maîtrise des évolutions socio-économiques des entreprises. Le dialogue est la seule voie pour trouver un véritable consensus, ce qui ne signifie nullement unanimisme, signe de décadence de toute société afin d'anticiper tout conflit préjudiciable aux intérêts supérieurs du pays avec des coûts faramineux. Pour une meilleure représentativité, les organisations patronales privées doivent avoir un cadre unifié et inclure d'autres organisations non présentes, parfois plus représentatives, comme le montre la déconnexion actuelle de l'UGTA par rapport aux mouvements sociaux. Pour un véritable dialogue social, il serait souhaitable de convier d'autres organisations syndicales autonomes avec lesquelles les ministres du Travail, de l'Education nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Santé, notamment, sont déjà en contact permanent. Faute de quoi, cela s'apparenterait à un monologue du pouvoir avec lui-même, sans impact sur la résolution concrète des problèmes économiques et sociaux. Cependant, le gouvernement ne peut négocier avec plus de 60 organisations qui doivent s'organiser en trois ou quatre grandes con- fédérations comme dans les pays développés, idem pour l'émiettement du patronat privé s'ils veulent devenir des forces sociales véritablement représentatives. C'est que la composante conviée aux négociations est la même depuis plus de deux décennies alors que l'environnement économique et social algérien a profondément changé, ce qui explique que les anciennes Tripartites ont eu peu d'effet face aux tensions sociales et surtout que maintes propositions pourtant constructives sont souvent restées lettre morte. 2.-Deuxièmement, le gouvernement doit se démarquer d'une vision culturelle largement dépassée des années 1970, tant sur le plan politique, économique qu'en matière diplomatique. Nous sommes en 2014 avec des mutations géostratégiques considérables entre 2014/2020 qui préfigurent de profonds bouleversements géostratégiques. Il s'agit d'éviter que la tripartite soit un lieu de redistribution de la rente (parts de marché et avantages divers supportés par le Trésor public de ceux présents via la dépense publique) en fonction d'intérêts étroits. Dans ce cadre, et au vu des derniers rapports de la Banque d'Algérie et du FMI qui prévoient des tensions budgétaires entre 2015-2018 ( rapport de février 2014) sur l'économie algérienne, je mets en garde le gouvernement contre une dérive inflationniste pour des raisons électoralistes par une révision brutale de l'article 87 bis qui remettrait en cause tous les sacrifices de la population algérienne et notamment des couches défavorisées et des couches moyennes. Le nombre de salariés est évalué à 7.393.000 dont 3.508.000 non permanents et 3.785.000 permanents. Le salariat est la forme dominante et touche 65,3% des personnes en activité, minimisant certainement le poids de la sphère informelle qui représente 50% de la superficie économique. La masse salariale, avec la dominance de la fonction publique est de 54,98 milliards de dollars fin 2013, ce qui donne un ratio masse salariale sur le PIB de 30,93% en 2013 et avec l'abrogation de l'article 87 bis risque d'aller vers 40% du PIB contre 19/20% entre 1999/2000. Ce taux ne serait pas inquiétant si la tertiairisation de l'économie avec une très faible productivité, et l'administration n'était pas dominante (emplois rente) et si existait une très forte productivité du travail, ce qui n'est pas le cas pour l'Algérie. Selon l'OCDE, l'Algérie dépense deux fois plus pour avoir deux fois moins de résultats par rapport à des pays similaires au niveau de la région MENA. Afin d'éviter un impact négatif sur la productivité du travail, il faut également éviter cette vision populiste du nivellement par le bas et évaluer l'impact sur le Trésor public qui pourrait, selon mes estimations, être après les ondes de choc entre 2017/2020 de 9/11 milliards annuellement durant toute la période d'activité des personnes concernées. L'accroissement de la productivité du travail sous réserve d'un changement de la politique économique encourageant les secteurs productifs, sinon les prévisions d'un taux de croissance de 7/8% horizon 2020 seraient une illusion, ne pouvant l'être qu'à moyen terme, la solidarité nationale pour ceux qui ne payent pas leurs impôts est la seule solution si l'on veut éviter la dérive inflationniste ou l'accroissement de la sphère informelle. C'est que 50% des PMI-PME( industriel- BTPH) ne peuvent pas supporter un accroissement des salaires de 15% qui est déjà leur marge de profit. A la prochaine Tripartite, le patronat demandera des dégrèvements fiscaux, des taux d'intérêts bonifiés, un rééchelonnement de ses dettes en contrepartie d'une augmentation salariale afin d'éviter la répercussion sur le prix de la marchandise, ce qui aurait un impact inflationniste accentuant le déficit budgétaire. 3.- Troisièmement, la tripartie doit faire un constat sans complaisance afin de solutionner les véritables problèmes. Paradoxe, pour un pays pétrolier, l'Algérie a importé en 2013 environ 3,5 milliards de dollars de carburant et dérivés, soit près de 6% de ses recettes d'hydrocarbures. Le tissu industriel algérien sur lequel tous les gouvernements souhaitaient fonder la relance économique est en réalité insignifiant, le secteur industriel représentant moins de 5% du produit intérieur brut. L'enquête effectuée par l'ONS, en 2011, confirme cette inquiétante tendance à la désindustrialisation, avec une très nette prédominance (plus de 83%) des petites entreprises de commerce et de services. Les entreprises industrielles publiques, pour la plupart acquises durant les années 1970 à 1980, ont eu le temps de vieillir et ce, au moment où la technologie et l'innovation progressaient à grands pas à travers le monde. Les grands pôles industriels publics des années 1970 ont commencé à péricliter dès la fin des années 1980, tandis que le secteur privé, encore fragile et empêtré dans les méandres de la bureaucratie, a du mal à prendre le relais. Ce qui explique que l'assainissement des entreprises publiques qui ont coûté au Trésor plus de 60 milliards de dollars entre 1971/2013 ont eu peu d'impacts, plus de 70% des entreprises publiques étant revenues à la case de départ montrant que le blocage est d'ordre systémique et pas seulement dû au capital-argent. D'ailleurs, ces assainissements répétés que couvre la rente des hydrocarbures (renvoyant à l'assainissement des banques publiques qui octroient plus de 85% du crédit total malades de leurs clients insolvables). Concernant d'autres secteurs comme l'effacement de la dette du secteur agricole, des jeunes de l'ANSEJ qui une fois les avantages octroyés ne peuvent rembourser, et récemment l'effacement de la dette des hôpitaux de 24 milliards de dinars sans que l'on ait pensé aux causes essentielles dues à la déficience tant de la gestion globale gouvernementale que de la gestion des micros unités. Par ailleurs, l'on assiste à des surcoûts exorbitants du fait de la faiblesse d'une planification stratégique à moyen et long terme surtout depuis la mise sur le marché d'importants moyens financiers, plus de 630 milliards de dollars -budget de fonctionnement et d'équipement entre 2000/2013 avec une recette d'exportation de plus de 700 milliards de dollars ( 98% provenant de Sonatrach) et des importations en devises dépassant les 500 milliards de dollars. Noua avons assisté à des anomalies observées dans le processus budgétaire et des goulets d'étranglement institutionnels qui ont systématiquement entraîné une mauvaise exécution des programmes d'investissement. Toutes ces insuffisances ont abouti à une mauvaise programmation, à la surestimation des dépenses et à de longs retards dans l'exécution des projets. Parmi les carences importantes observées, on peut citer : l'existence d'un décalage entre la planification budgétaire et les priorités sectorielles ; l'absence d'interventions efficaces due à un morcellement du budget résultant de la séparation entre le budget d'investissement et le budget de fonctionnement (récurrent) ; des passifs éventuels potentiellement importants, des écarts considérables entre les budgets d'investissement approuvés et les budgets exécutés et des longs retards et des surcoûts pendant l'exécution des projets, ce qui témoigne de la faiblesse de la capacité d'exécution des organismes d'exécution, traduisant le divorce croissant entre les moyens de réalisation et les objectifs. Le FMI et la Banque mondiale considèrent que le système de gestion ne correspond pas aux normes internationales et que la performance de l'Algérie est particulièrement mauvaise à toutes les différentes étapes de la formulation, de l'exécution du budget, de l'établissement de rapports et de la passation des marchés, notamment par la qualité faible des projets et de graves carences institutionnelles. Suite de la page 11
4.- Quatrièmement, il faut éviter l'illusion juridique bureaucratique en pensant qu'une Loi ou un changement d'organisation qui a un coût très lourd peut résoudre les problèmes d'ordre structurel. Nous assistons entre 1963 à 2014 à une instabilité juridique perpétuelle, à un changement de politique économique, facteurs liés, qui limitent les secteurs dynamiques et découragent les entrepreneurs publics et privés dans le cadre de l'allocation sectorielle d'investissement, les orientant vers les activités spéculatives (voir site maghreb émergent notre analyse sur la nouvelle organisation en groupes industriels). Il faut revoir le fonctionnement du dispositif actuel de l'investissement ainsi que la règle des 51/49 % devant distinguer avec clarté ce qui est stratégique de ce qui ne l'est pas, l'Algérie supportant tous les surcoûts et, de surcroît, cela n'a pas donné de résultat probant. En 2013 les importations de biens ont été de 55 milliards de dollars et entre 2013/ 2014, les exportations relèveront à 97-98% du secteur des hydrocarbures et 70% des besoins des entreprises, dont le taux d'intégration ne dépasse pas 15% en inputs, relèveront de l'importation. Les agences étatiques créées au début des années 2000, à l'effet de donner de nouveaux ressorts à l'industrie nationale (Andi, Ansej ), se confinent malheureusement dans un simple rôle d'enregistrement des intentions d'investir et de tenue de statistiques sur des projets, lesquels, dans la majorité des cas, ne dépasseront pas le stade de la déclaration d'intention, idem pour les agences relevant du ministère du Travail qui ne font pas le suivi des projets octroyés aux jeunes. L'Agence nationale pour le développement de l'investissement (Andi) et le Conseil national de l'investissement (CNI), créés quelques années plus tard dans le but de promouvoir les gros investissements, ne feront guère mieux. A bien des égards, le CNI se comportera beaucoup plus comme un prédateur d'investissements qu'un facilitateur. Le même problème se pose pour les investissements que devaient promouvoir des entreprises publiques, soumises au visa préalable du Conseil des participations de l'Etat (CPE). Là aussi, ce sont des dizaines de projets que souhaitaient réaliser des entreprises publiques (EPE), seules ou en partenariat avec des opérateurs privés algériens ou étrangers, qui végètent, pour certains depuis des années. C'est pourquoi un assouplissement des procédures s'impose pour lutter contre la bureaucratisation qui enfante la sphère informelle et la corruption. 5.- Cinquièmement, l'objectif stratégique est de réhabiliter l'entreprise, qu'elle soit publique, privée ou étrangère, créatrice de valeur ajoutée devant tenir compte d'une balance managériale et technologique positive pour l'Algérie en adaptant les règles aux normes internationales et son fondement, le savoir, face à une économie de plus en plus mondialisée. Cela doit s'inscrire dans des stratégies pour segments de filières internationalisées afin de créer une économie productive à forte valeur ajoutée, ne devant pas, en ce XXIe siècle, du fait des nouvelles technologies, avoir une vision matérielle, l'industrie se combinant avec les services. La recherche tant théorique qu'appliquée, avec un équilibre entre les sciences exactes et les sciences humaines, est fondamentale pour impulser de nouvelles filières industrielles. Pour paraphraser le langage militaire qui différencie tactique et stratégie, le gouvernement, et c'est sa mission essentielle, se doit d'avoir une vision stratégique et non d'agir sur la conjoncture à partir d'une tactique. Des actions coordonnées et synchronisées dans le temps exigeront le courage de réformer vite et massivement, non des replâtrages conjoncturels différant les problèmes dans le temps, mais de profondes réformes structurelles, passant par une réhabilitation de la planification et le management stratégique. Face à cette situation socio-économique inquiétante pour le devenir de l'Algérie, au-delà de l'Etat, l'ensemble des acteurs de la société doivent être mobilisés si l'Algérie veut renouer avec une croissance durable hors hydrocarbures. Comment ne pas rappeler que les pays ayant entrepris avec succès des réformes, notamment les pays émergents, se sont appuyés sur une mobilisation de l'opinion. La nécessité de réformer s'impose à l'Algérie, et ce, malgré des dépenses monétaires sans précédent. La croissance forte peut revenir en Algérie. Mais elle suppose la conjugaison de différents facteurs : une population active dynamique, un savoir -faire, un goût du risque et des innovations technologiques sans cesse actualisées, un combat contre toute forme de monopole néfaste, une concurrence efficace, un système financier rénové capable d'attirer du capital et une ouverture à l'étranger en intégrant la diaspora. Pour s'inscrire dans la croissance mondiale, l'Algérie doit d'abord mettre en place une véritable économie de la connaissance, développant le savoir de tous, de l'informatique au travail en équipe, de l'arabe, du français à l'anglais, du primaire au supérieur, de la crèche à la recherche. Elle doit ensuite faciliter la concurrence, la création et la croissance des entreprises par la mise en place de moyens modernes de financement, la réduction du coût du travail et la simplification des règles de l'emploi. Elle doit favoriser l'épanouissement de nouveaux secteurs clés, dont le numérique, la santé, la biotechnologie, les industries de l'environnement, les services à la personne, avec le vieillissement de la population. Simultanément, il est nécessaire de créer les conditions d'une mobilité sociale, géographique et concurrentielle. De permettre à chacun de travailler mieux et plus, de changer plus facilement d'emploi en toute sécurité. C'est que les réformes passent fondamentalement par une démocratie vivante, une stabilité des règles juridiques et une équité, des politiques parlant de justice sociale. La conduite d'ensemble de ces réformes ne peut ni être déléguée à tel ou tel ministre ni mise entre les mains de telle ou telle administration. Elle ne pourra être conduite que si, au plus haut niveau de l'Etat, une volonté politique forte les conduit et convainc les Algériens de leur importance. D'où, avec l'ère d'Internet, la nécessité d'une communication active transparente et permanente. Ainsi, pour mener à bien ces réformes, l'Etat et les collectivités locales doivent être très largement réformés. Il faudrait réduire leur part dans la richesse commune, concentrer leurs moyens sur les groupes sociaux qui en ont réellement besoin, faire place à la différenciation et à l'expérimentation, évaluer systématiquement toute décision a priori et a posteriori. La croissance partagée par un sacrifice également partagé exige l'engagement de tous, et pas seulement celui de l'Etat, en organisant les solidarités devant concilier efficacité économique et équité par une participation citoyenne et un dialogue productif permanent. L'essentiel de l'action est entre les mains des Algériens, qui devront vouloir le changement et partager une envie d'avenir, apprendre davantage, s'adapter, travailler plus et mieux, créer, partager, oser. La nature du pouvoir doit également changer, supposant une refonte progressive de l'Etat par une réelle décentralisation autour de grands pôles économiques régionaux, impliquant non un Etat gestionnaire mais un Etat régulateur, conciliant coûts sociaux et coûts privés, tout en étant le cœur de la conscience collective. 6.-Sixièmement, facteur essentiel et décisif, la réalisation des objectifs passe nécessairement par un retour à la confiance supposant une autre gouvernance fondée sur un Etat de droit, une lutte réelle contre la corruption qui se socialise, constituant un danger pour la sécurité nationale, et, donc, une moralité sans faille pour ceux qui dirigent la Cité. Ce ne sera qu'à ces conditions que les Algériens réapprendront à envisager leur avenir avec confiance, préféreront le risque à la rente, libéreront l'initiative, la concurrence et l'innovation. Le principal défi du XXIe pour l'Algérie sera la maîtrise du temps ; le monde ne nous attend pas et toute nation qui n'avancera pas reculera forcément. L'Algérie est liée à l'Accord l'Association ave l'Europe signé le 01 septembre 2005 et dont le dégrèvement tarifaire sera zéro en 2020. L'Algérie aura-t-elle à cette date des entreprises publiques et privées compétitives en termes de coût-qualité tenant compte de la dure concurrence internationale ? Qu'en sera -t-il si l'Algérie adhère à l'Organisation mondiale du commerce (l'OMC) représentant 85% de la population mondiale et 97% des échanges mondiaux avec les récentes adhésions de l'Arabie Saoudite et la Russie, processus irréversible si l'Algérie ne veut pas s'isoler des relations internationales ? Retarder les réformes ne peut que conduire à une lente désintégration, un appauvrissement, une perte de confiance en l'avenir où certains scénarios prévoient une chute des recettes entre 2017-2020, limitant dès lors l'investissement de Sonatrach, l'épuisement inéluctable de la rente des hydrocarbures (pétrole 2020-2025- gaz traditionnel horizon 2030), et ce, au moment où la population avoisinera 50 millions d'habitants. Qu'en sera-t-il entre 2016/2020 du financement au rythme de la dépense publique actuelle, lorsque les USA seront concurrents directs de Sonatrach grâce à la révolution du pétrole-gaz de schiste et où les recettes provenant de ce pays représentent plus de 15%, et ce, sans compter la concurrence directe de Gazprom ( 30% du marché européen, Qatar 8% et l'Algérie étant passée de 13% en 2009/2010 à 9% fin 2013) et les nouvelles découvertes en Méditerranée orientale ( 20.000 milliards de mètres cubes gazeux) où entre 2017/2020 nous devrions assister à une baisse des recettes de Sonatrach? Les importations en 2013, comme rappelé précédemment , ont été de 55 milliards de dollars de biens, 12 milliards de dollars de services contre 1,5 milliard en 2000, appel intensif à l'assistance étrangère et ne pouvant créer un tissu productif durable sans Engenering national, sans compter les transferts légaux de capitaux entre 5 et 7 milliards de dollars, soit une sortie en devises de plus de 72 milliards de dollars. Pour la loi de finances 2015, les tendances vont vers 80 milliards de dollars de sorties de devises. Or, les recettes de Sonatrach sont passées de 73 milliards de dollars entre 2010/2011 à 63 milliards de dollars fin 2013. Le dernier rapport du ministère de l'Energie en date du 04 septembre 2014 confirme cette tendance à la baisse en volume, atténuée par la hausse des prix en 2013, soit une baisse annuelle de 10 milliards de dollars. La chute récente du cours des hydrocarbures entre août et septembre 2014, (6/7 dollars en l'espace de quelques semaines) si elle devait se prolonger dans le temps, aurait des incidences négatives sur le budget de l'Etat qui, entre le fonctionnement et l'équipement, fonctionne 2014/2015 sur la base d'un cours de 115/120 dollars le baril. L'on irait inéluctablement vers une tendance à l'épuisement du Fonds de régulation des recettes dont le montant en valeur souvent gonflé artificiellement par le dérapage du dinar par rapport au dollar et par là le montant de la fiscalité hydrocarbures et le montant de la fiscalité ordinaire en cas de dérapage par rapport à l'importation de biens en l'euros, étant passée de 4842 milliards de dinars en 2012, 5381 en 2013 étant prévu selon la loi de finances prévisionnelle de 2014 qu'il passe à 7226 fin 2014 alors que selon le rapport de la Banque d'Algérie, il a accusé une baisse passant de 5 238 milliards de dinars fin 2013 à 4 773 fin mars 2014. Par rapport aux réserves de change estimées en mars 2014 à 195 milliards de dollars non compris les 173 tonnes d'or, (86% étant placées à l'étranger à plus de 90% en bons de trésor américains et en obligations européennes à un taux fixe à moyen terme de 3%,) au rythme de la dépense actuelle, cela permettra à l'Algérie de tenir trois à quatre années allant donc vers l'épuisement horizon 2020. Rappelons que le déficit budgétaire prévu dans la loi de finances 2015 dépasse 52 milliards de dollars. 7.- Septièmement, en résumé, tant qu'il y a la rente, la fuite en avant est la distribution de revenus sans contrepartie productive, sacrifiant le développement du pays et les générations futures, rentrant dans le cadre d'une stabilité statique suicidaire. La part insignifiante du tissu productif, les importations massives de produits agricoles comme en témoigne la chute de 30% de la production de blé en 2014 par rapport à 2013, mais plus de 100% par rapport aux années 2008/2009, la production étant estimée en 2014 à 32 millions de quintaux contre plus de 62 entre 2008/2010, montrent clairement que l'économie algérienne dépend des aléas climatiques et des fluctuations du cours des hydrocarbures qui échappent à la décision intérieure et donc la faiblesse du management stratégique de la majorité des secteurs. Le pouvoir algérien, mais aussi la majorité de la population dont le revenu est fonction à plus de 70% de la rente des hydrocarbures, doivent savoir qu'une Nation ne peut distribuer que ce qu'elle a préalablement produit, que l'avenir de l'emploi et de leur pouvoir d'achat n'est plus dans l'administration et les emplois rentes qui voilent le taux réel du chômage, mais dans les segments productifs. Comme les subventions à répétition mal ciblées et mal gérées (25 milliards de dollars sans compter les transferts sociaux comprimant artificiellement le taux d'inflation, vont devenir de plus en plus insupportables. Toute Nation qui n'avance pas recule forcément étant toujours en dynamique n'existant pas de situation statique. L'Algérie face à une concurrence internationale de plus en plus acerbe doit réaliser impérativement à la fois sa transition économique et sa transition énergétique. A terme, l'Algérie n'aura plus les moyens financiers de préparer les réformes attendues, et vivra sous l'emprise de la peur et voyant partout des menaces, là où les autres ne verront que de la chance. Puisse notre pays, grâce à ses femmes et hommes de bonne volonté, traverser la crise multidimensionnelle à laquelle elle est actuellement confrontée et devenir un acteur actif dans le concert des nations notamment au sein de la région euro-méditerranéenne et africaine. Il en a les moyens pour peu que les fondements du développement du XXIème siècle soient mis en œuvre: la bonne gouvernance et la valorisation du savoir dans le cadre des nouvelles mutations mondiales. L'innovation constitue un facteur déterminant, face aux mutations mondiales, pour une stratégie économique hors hydrocarbures en Algérie -2015/2020- Cette présente réflexion à portée opérationnelle est une contribution à l'occasion de la réunion de la Tripartite gouvernement-partenaires sociaux et économiques prévue le jeudi 18 septembre 2014.
Le fondement du développement du XXIème siècle se fondant sur la bonne gouvernance et l e savoir, nous nous sommes persuadés que l'on ne relance pas l'économie par décrets, ou par des Lois, vision bureaucratique du passé, ni par le mythe de l'injection de technologies transférées des pays avancés et des contrats ''clé en main'' sans transfert technologique et managérial (voir notre contribution site Maghreb Emergent sur les groupes industriels). De l'avis général des opérateurs économiques et autres institutions spécialisées, créer une nouvelle organisation sans objectifs stratégiques n'apportera aucun résultat, comme en témoignent les différentes organisations de 1963 à 2014 : outre le coût croissant et la démobilisation que cela entraîne due à l'instabilité juridique, l'Algérie de 2014 exporte toujours 98% d'hydrocarbures à l'état brut et semi- brut et le secteur industriel représente moins de 5% du produit intérieur brut , 83% de la superficie économique étant constituée de petits commerces-services. Les entreprises publiques économiques fortement déficitaires puis apurées, un secteur privé marginalisé par la bureaucratie, des centres de recherche & développement, malgré leurs nombres émiettés à travers les universités du pays sans relations entre eux qui piétinent, ne collant ni à l'environnement local et international, la marginalisation ou le départ des meilleurs cerveaux où, selon le dernier rapport du Forum Economique Mondial ( Davos), l'Algérie de septembre 2014 , est classée parmi les derniers dans l'innovation, que faut-il faire ? 1.- Nous avons tous cru que le temps des signatures des contrats "clé en main" d'usines et complexes industriels, était irréversiblement révolu. Cependant, l'aisance financière dont jouit actuellement le pays semble réveiller d'anciens démons. Récemment, la loi relative à la participation étrangère dans les investissements productifs à un maximum de 49% sans délimiter ce qui est stratégique et ce qui ne l'est pas, vient bouleverser encore les données. Ce sont toujours les structures administratives qui contrôlent les structures de production. Pour parachever la description du contexte dans lequel s'inscrit notre réflexion, il est nécessaire de préciser que se déroulent sous nos yeux des mutations profondes à l'échelle de la planète et que nul ne peut en prévoir les issues. Nous sommes nombreux à penser à ce sujet qu'en Algérie aucune amélioration notable n'apparaîtra sans évolution politique, morale, culturelle et sociale, les progrès de la démocratie, le rétablissement d'une authentique échelle des valeurs, la diminution des inégalités sociales et la suppression de la corruption et de la spéculation à tous les niveaux. Le drame, mieux constaté aujourd'hui, est que l'improductivité (distribution de la rente sans contreparties productives pour une paix sociale éphémère) a été cultivée pendant plus de cinquante ans par l'Etat jouant d'une main la manne pétrolière et de l'autre une politique sociale d'assistés. La "vache sacrée" du pacte implicite en vertu duquel on échange des emplois non productifs contre une faible rémunération et une productivité médiocre. Par ailleurs, si le secteur public est aujourd'hui montré du doigt, les entreprises privées sont-elles préservées de ces mêmes difficultés ? Nous pensons qu'il s'agit d'un problème global qui touche non seulement tous les types d'entreprises algériennes mais aussi tous les secteurs de l'économie nationale. L'Algérie a besoin d'une refonte totale d'un système économique, politique, social, moral et culturel.
2.- La démocratie, la participation, l'implication et la concertation, est la voie incontournable conduisant à l'espoir et à l'espérance. Sans le respect de ces principes, le terme développement perd tout sens. Si on accepte de situer la technologie en tant qu'instrument essentiel d'industrialisation, de progrès économique et social, il convient alors de s'interroger de manière concrète comment établir la jonction entre les objectifs du programme du gouvernement et le réseau fondamental du savoir et du faire. Donner à ceux qui savent l'opportunité de montrer ce qu'ils peuvent faire. En d'autres termes, quelle stratégie suivre à moyen et long terme pour continuer le processus d'industrialisation, construire l'intégration des différents secteurs d'activité, imbriquer nos unités industrielles dans la complémentarité et l'harmonie, produire "qualité" et gagner de nouveaux marchés ? Comment mettre sur chantiers toutes les compétences et toutes les énergies devant contribuer à cette construction ? L'approche consiste à prendre appui sur les Hommes et leurs Idées. Trois défis principaux à relever, au centre desquels l'homme nous paraît être la ressource clé de la réussite : un défi économique ; un défi technologique et l'élément déterminant le défi socioculturel. S'agissant du premier, nos entreprises doivent être plus compétitives et donc augmenter la productivité du capital, du travail et de l'organisation. En outre, elles doivent améliorer la qualité des produits par le développement de la recherche & développement et l'innovation. Dans toutes ces composantes l'homme intervient de façon prépondérante par le développement du service client, le goût du travail bien fait, l'implication de tous les ouvriers à l'effort et l'amélioration de la productivité et des produits, un système de rémunération liée au résultat collectif et individuel, l'amélioration des conditions de travail et de l'environnement, l'information et la communication entre le collectif et le management. Pour le second, la technologie reste un élément essentiel de la compétivité à condition qu'elle soit intégrée de manière cohérente avec l'organisation et les hommes. Son choix, sa mise en œuvre et son développement doivent être confiés aux spécialistes de l'entreprise afin de les impliquer totalement pour relever ce défi, gagner la confiance des autres et la confiance en soi. Enfin le troisième, traduit l'évolution de notre histoire industrielle. Les générations d'ouvriers et cadres se suivent mais ne se ressemblent pas. Les raisons d'impuissances évoquées hier ne sont plus valables aujourd'hui, les mentalités aussi ont changé. Les nouvelles générations de salariés n'ont pas les mêmes attentes du travail que leurs aînés. Ne pas changer les politiques sociales d'entreprises ferait courir le risque d'implosion sociale. Les nouveaux managers des entreprises doivent souffler le vent des réformes à l'intérieur de l'entreprise y apportant une recomposition de l'activité, une revalorisation de l'expérience et du savoir-faire, une formation continue assurant la promotion et une prise en main du devenir de l'entreprise par ses membres écartant définitivement l'Etat. Et pour assurer la faisabilité de ces objectifs quatre principes sont à respecter : gérer les changements dans le temps, par un dialogue constructif et permanent, une adaptation constante mais sans déviation, une évaluation objective et une analyse périodique ; l'unité dans l'action sans écarter une concertation et diversité de points de vue sur la démarche. Pluralité de pensée mais unité dans l'exercice ; la détermination car les résultats ne sont jamais immédiats et le fruit met un temps avant de mûrir. La persévérance reste le prix à payer pour envisager le succès et enfin la rationalité des actions et objectifs en fonction des contraintes externes et internes de l'entreprise. Sans l'observation de ces principes, les objectifs de redressement, d'assainissement et d'expansion ne seront que pures chimères et illusions. 3.-Où et qui sont les acteurs de ces mutations ? Le nombre d'ingénieurs employés dans les grandes entreprises publiques peut dans certains cas paraître significatif mais ce serait se laisser tromper par les apparences. Dans une large proportion l'encadrement de qualité notamment les réseaux intermédiaires, fait cruellement défaut. En fait la rémunération des ingénieurs et cadres ne permet pas de retenir les meilleurs. En conséquence, un grand nombre d'entre eux se reconvertissent à des activités plus lucratives parfois sans aucun rapport avec leur formation. D'autres émigrent dans des pays industrialisés qui font ainsi l'économie de leur formation. Ceux qui restent n'ont trop peu de motifs de satisfaction pour donner le meilleur d'eux-mêmes. Par ailleurs, les jeunes ingénieurs et cadres qui arrivent sur le marché de l'emploi ont une formation essentiellement théorique avec trop peu de savoir pratique. On peut ainsi légitimement se demander si les systèmes de formation universitaire sont réellement adaptés aux objectifs du développement du pays. Ainsi, une main- d'œuvre spécialisée nous semble d'une importance capitale, car elle constitue le moteur tant du dispositif de production et que de sa qualité permettant en grande partie, la productivité du capital et la qualité des produits. La tradition industrielle qui distingue les pays développés des autres se bâtit essentiellement sur cette catégorie professionnelle. Notre analyse nous permet d'affirmer que nous sommes bien loin de lui avoir accordé toute l'attention nécessaire et veillé à sa consolidation et sa promotion. Quelle situation rencontrent les jeunes diplômés aujourd'hui? Des milliers de jeunes gens arrivent chaque année sur le marché de l'emploi, parmi eux des jeunes techniciens, chercheurs, ingénieurs, commerciaux, comptables, etc. Du fait de la distribution des âges de la population algérienne, ce nombre ira de façon croissante dans la prochaine décennie : quel avenir pour les 1,5 million d'étudiants sortis des universités en 2018/2020 avec une baisse alarmante du niveau, sans compter le taux croissant de déperdition scolaire entre le primaire et l'université ? Du fait du faible taux de croissance (moyenne de 3% entre 2000/2014 malgré une dépense publique sans précédent, de la déperdition du tissu productif, (l'illusion est de créer des emplois administratifs), les secteurs économiques (public et privé) ne sont plus en mesure d'accueillir le flux croissant de diplômés. De plus, toute tentative de recherche de gains de productivité, dans la plupart des entreprises, conduirait inévitablement à des compressions d'effectifs, y compris dans l'encadrement. Ainsi il apparaît clairement que les démarches précédentes en matière de création d'emplois par de lourds investissements monoblocs ne peuvent en aucun cas apporter des solutions probantes et qu'il est absolument nécessaire de rechercher de nouvelles approches. Si on trouvait les moyens de convertir ces jeunes cadres non plus en demandeurs d'emploi, mais en entrepreneurs motivés, résolus et bien préparés à affronter l'aventure passionnante mais aussi difficile de l'entreprise, nous tournerions définitivement une sombre page de notre histoire industrielle et ouvrirons un espace gigantesque de progrès et d'espérance pour les générations futures. Dans le même sens, si on convertissait les jeunes ouvriers qualifiés et les moins jeunes, en artisans chevronnés, il se créerait des synergies et une forte densification des activités entrepreneuriales qui résorberont progressivement le chômage. L'Algérie se prête parfaitement à ce projet et ce à plusieurs raisons : marché important ; très larges possibilités de sous-traitance industrielle ; ressources naturelles importantes ; communications et transport relativement bon ; disponibilité de certaines matières premières. La contribution massive des cadres entrepreneurs algériens devra constituer à l'avenir l'un des vecteurs porteurs de la politique de relance économique. Parmi les jeunes diplômés qui ont ou auront cultivé un projet industriel (fabrication ou service) durant leur formation ou leur expérience professionnelle, des opportunités motivantes de concrétisation s'offriront à eux, grâce au concours des organismes spécialisés d'aide à la promotion des PMI, des institutions financières, etc. De même, les cadres des entreprises (chefs d'atelier, ingénieurs et techniciens, chercheurs, inventeurs, innovateurs de toutes spécialités) ayant acquis une solide expérience dans la production, les services ou la recherche appliquée pourront apporter leurs concours à l'édification de l'intégration industrielle nationale. Dans ce sens, il est donc indispensable que l'on réfléchisse à une politique de promotion de l'homme et de ses idées apte à assurer une meilleure transition et transformation d'un projet (individuel ou collectif) en réalisation industrielle. L'homme apporte l'idée ou l'art, l'Etat crée les fonctions initiatives, les organismes de promotion apportent les matériaux de base, les promoteurs financiers le capital, les promoteurs technologiques (entreprises d'engineering, centres de recherche & développement, etc.) leurs assistances techniques, les entreprises de réalisation et fabrication fournissent les biens et services et enfin les promoteurs économiques (EPE intéressées par le service ou produit) ouvrent le marché. Dans ce schéma, nul besoin aux entrepreneurs véhiculant un savoir et/ou savoir -faire de disposer du capital ou même d'une partie de l'investissement pour se constituer en PMI. La véritable garantie sur laquelle les partenaires miseront sera les compétences de l'entrepreneur et la viabilité économique du projet. Cela suppose une révision totale du système financier qui malgré ses surliquidités qu'il n'arrive pas à transformer en richesses réelles se confinant actuellement en guichets administratifs qui doit devenir un véritable partenaire. C'est une démarche qui consiste à créer la richesse à partir du travail de l'homme, son art, sa créativité et son initiative. L'image de l'entrepreneur industriel ne sera plus celle d'une poche pleine mais celle d'une tête pleine. Il s'agit de cueillir le fruit des moyens considérables investis dans la formation de l'homme et de revaloriser l'art et la connaissance. Il est certain qu'à côté de cette nouvelle démarche ouverte à une large participation et construction commune de l'intégration industrielle et du développement, ces propositions devraient avoir un très puissant effet d'entraînement dans de nombreux secteurs d'activité du pays, qu'il s'agisse de l'avenir des efforts consentis en matière d'éducation et de formation, des nouveaux types d'interrelation entre les diplômés, les hommes de l'art et des techniques d'une part, le monde du travail, le réseau de services publics, les EPE, les collectivités locales, l'environnement et le monde politique, d'autre part. 4.- Notre vision de développement axé sur l'esprit d'initiative, d'innovation et de création des entrepreneurs qui substituerait le dialogue, la confiance, la participation et le partenariat à la méfiance entre d'une part, le secteur privé et le secteur public et le secteur de l'industrie en général et les institutions financières, ne peut manquer de paraître audacieuse. Oui, ce projet est effectivement ambitieux, mais il convient de le situer dans un contexte nouveau, celui de la prise de conscience, par les jeunes hommes et femmes de ce pays, de la nécessité de changer la façon d'organiser les rapports sociaux : rendre responsable à tous les niveaux, les individus et les collectivités est la condition impérative du succès de la relance économique, de l'espérance et de la paix sociale. Sa réussite implique un renouveau politique basé sur l'Etat de Droit et une meilleure gouvernance avec des objectifs précis sous- tendu par une nette volonté politique de changement l'économie, comme nous l'ont appris les classiques étant avant tout politique avec une finalité humaine. Nous sommes en droit de nous interroger s'il existe une adéquation entre la formation offerte aux ingénieurs, techniciens, économistes, commerciaux et l'esprit des réformes nécessaires pour nous adapter aux nouvelles mutations mondiales. Dans les pays de l'OCDE, dans les filières technologiques, l'accent est aujourd'hui mis sur les aspects pratiques qui conditionnent la vie industrielle bien plus que les belles théories fondamentales. En effet, pour maîtriser la complexité croissante des techniques et des produits que tout le monde juge indispensable, s'impose une élévation générale du niveau de formation et de qualification de l'encadrement industriel algérien. Des efforts devront rapidement s'effectuer dans ce sens et s'articuler autour d'une réflexion globale capable de susciter une nouvelle dynamique et un véritable saut qualitatif. Un grand espoir repose notamment sur un nécessaire rapprochement entre les universités et autres centres de formation et de recherche d'une part et les entreprises d'autre part. En faisant preuve d'imagination et de volonté d'écoute auprès des différents secteurs de la production, on pourrait aboutir à une harmonisation des flux d'entrée et de sortie des établissements de formation. On pourrait également construire de nouveaux ponts, revoir les méthodes et outils pédagogiques ainsi que le contenu de la formation adaptés aux besoins nouveaux du secteur de l'industrie et des manufactures. 5.-Aussi paradoxal que cela puisse paraître, il semble qu'intuitivement tout un chacun reconnaît que nous avons tous à l'esprit un dénominateur commun : rompre avec l'expérience passée. Voici déjà un certain avantage et un point de repère qui permet du moins d'envisager l'avenir sans renouer avec un sombre passé. Cette rupture semble produire un consensus autour de certaines questions comme comment libérer l'Algérie de sa dépendance vis- à- vis des hydrocarbures, réhabiliter le secteur privé sain et productif et la libre entreprise hors circuits de spéculation, réformer le système de formation/qualification, adapter notre système bancaire au nouveau contexte économique et rapprocher les institutions et les opérateurs économiques pour être plus performant et prendre désormais en charge le devenir du pays, renvoyant à des réaménagements au sein de la structure du pouvoir, loin des aléas de la rente des hydrocarbures. Dans ce contexte, il est nécessaire d'assurer les conditions du meilleur dialogue possible entre les organismes publics et secteurs d'activité économique et mettre au point les modalités de coopération et d'échange les mieux adaptées. La collaboration entre les organismes publics sur des actions spécifiques doit être réexaminée afin de disposer de structures appropriées à la mise en commun des efforts. Il faut apprendre à travailler ensemble et il est nécessaire pour que les concepteurs, les entrepreneurs, les producteurs comme les utilisateurs jouent un rôle actif et moteur dans le développement technologique, d'établir des passerelles entre les secteurs d'activité. Celles-ci constitueront l'idée force de l'intégration. Rappelons-le combien la présence d'un réseau diversifié de PMI/PME est indispensable à tout tissu économique équilibré. Leur mode d'activité qui se caractérise par une souplesse et des possibilités d'adaptation particulières, est le complément indispensable de celui des grandes entreprises publiques économiques dont on sait qu'elles possèdent pour nature une grande inertie liée à leur taille même. Ces qualités font des PMI des vecteurs importants d'imbrication et d'intégration. Enfin ces PMI peuvent apporter des créneaux potentiels importants pour l'exportation qu'il convient donc de promouvoir. Nul ne saurait ignorer que la promotion de la PMI est par nature un thème horizontal. Pour l'aborder, il faut mobiliser des équipes de travail multidisciplinaires qui mèneront périodiquement une réflexion sur un large front. Il s'agit de garder une vue d'ensemble tenant compte de la situation globale avec ses contradictions, ses disparités et sa fragmentation. Certes, les grandes EPE ont un rôle important à jouer dans le domaine de la consolidation de notre capital savoir-faire. Mais dans le cadre d'un co-partenariat, elles doivent se constituer en un organe particulier d'entraînement et d'encouragement à l'égard des PMI et l'expérience allemande est utile à étudier. Par ailleurs, dans le même sens, le rôle et l'attitude du secteur bancaire comme rappelé précédemment, sont à revoir : Il doit participer bien plus aux crédits à l'innovation technologique, spécialiser du personnel compétent et faciliter le conseil en gestion auprès des PMI. Enfin, les administrations centrales et organismes publicistes se constitueront plus en monopoles conduisant à un étouffement progressif des initiatives, mais en structures d'initiatives dont la mission permanente est la planification horizontale, l'orientation générale à des fins d'harmonisation et le contrôle des facteurs d'équilibre économique qui conditionnent les résultats de la politique industrielle. Nous pouvons en substance dire que ces rapprochements sont aujourd'hui indispensables pour relancer le tissu productif. 6.-Mais cette nouvelle vision doit s'inscrire dans le cadre de toute une stratégie de développement respectant à la fois la rentabilité économique et les équilibres régionaux. En effet, le premier élément d'une politique de promotion des PMI et la croissance du potentiel de l'ensemble des Wilayas, la répartition de cette croissance est déterminée en fonction des atouts de chacune, en s'appuyant notamment sur les activités existantes et celles qui éclosent à partir des besoins locaux. Le programme national de promotion des PMI doit consister en un ensemble de programmes régionaux compatibles avec la diversité, spécialité, l'environnement, etc., de chaque région. Dans ce sens nous préconisons la notion de pôles régionaux de synergie et promotion de PMI au nom de l'efficacité et la rationalité, supposant une réorganisation des collectivités locales, les micros institutions étant source d'inefficacité et de gaspillage des ressources financières. Telle région de jouer un rôle dans tel domaine à cause d'une présence significative d'un environnement favorable à son expansion (Grandes EPE du domaine, instituts ou écoles supérieures de formation, centre de recherche et de développement, etc.) Le lien d'ailleurs privilégié au plan régional, entre les industries mères, les centres de formation et de recherche d'une part et les familles de PMI à implanter d'autre part renforce cette tendance. Ce schéma n'est pas figé dans ce sens où s'agissant d'activités à caractères délocalisés (matériaux de construction, agro-alimentaire, etc.,) il n'est pas nécessaire de créer une spécialisation régionale. A l'opposé, pour la micro-mécanique, l'électronique, la mécanique, l'électrotechnique et d'autres, la région peut jouer un rôle spécifique dans le domaine de l'animation et du développement du potentiel des PMI pour accroître les activités existantes, dynamiser les centres régionaux de recherche et de développement et les centres de formation, stabiliser les cadres spécialisés et relancer l'emploi. Ainsi, la région pourra développer sa propre politique industrielle régionale notamment à partir des collectivités locales, des associations et entreprises pour atteindre ses objectifs et ses intérêts régionaux. A l'heure où émerge quelque peu la décentralisation comme décision politique, les autorités locales en liaison avec les universités et centres de recherche doivent prendre conscience de l'existence et de l'importance de la dimension régionale de la promotion de la PMI pour un nouveau mode de développement dans une Algérie en mutation. La nouvelle politique qui en découle, repose sur la prise en charge par les Wilayas des problèmes concrets et immédiats qui se posent à l'échelon local et sur leur volonté de poursuivre un mode approprié et spécifique de développement. Il faut donc qu'à l'avenir les régions retrouvent leur capacité d'innover, de proposer des solutions et de prendre des initiatives, tout particulièrement dans les domaines où la valorisation des ressources (expérience, savoir-faire régional, main -d'œuvre, matières premières, etc.,) peut être mieux engagée. L'enjeu d'une politique régionale de promotion de la PMI n'est pas de se substituer à l'action des ministères concernés, mais de la compléter en apportant toutes les contributions régionales. Plusieurs questions viennent alors à l'esprit : comment organiser le dialogue entre les élus régionaux et les forces vives d'une région ? Comment doit-on concevoir des programmes régionaux de création de PMI compatibles avec l'environnement d'une région ? Comment enfin organiser l'indispensable dialogue entre les régions et le gouvernement pour mettre en place une politique régionale de promotion des PMI ? En résumé, avec l'épuisement des réserves d'hydrocarbures traditionnels horizon 2030, au moment où la population algérienne approchera 50 millions d'habitants, posant la problématique de la sécurité nationale , il y a urgence pour l'Algérie de s'insérer dans un nouveau régime de croissance tiré par l'économie du savoir et de l'innovation avec un budget conséquent qui aura un impact positif à terme. Mais il faut être réaliste et pragmatique et non utopique. La relance industrielle devra reposer sur les choix de développement des filières qui doivent être cohérents avec les tendances lourdes internationales. Et ces choix doivent correspondre aux attentes et à la structure socio-économique et culturelle du pays.
Pr Abderrahmane Mebtoul - Dr Liès Goumiri N.B.- Abderrahmane Mebtoul est Professeur des Universités, expert international Docteur d'Etat (1974 option-gestion) -Expert comptable de l'Institut supérieur de gestion de Lille (France 1973) et Lies Goumiri est docteur d'Etat Es-sciences physiques, diplômé de l'Ecole polytechnique de Grenoble ( France) - Diplômé de Sciences Po Paris.