Dilma Rousseff, en léger recul, devance toujours Aecio Neves de quatre à six points, selon les deux derniers sondages divulgués avant-hier soir à la veille de l'élection présidentielle au Brésil. La présidente sortante de gauche l'emporterait avec 52% des voix contre 48% pour son rival social-démocrate. Selon l'institut Datafolha, elle recule d'un point et M. Neves en gagne un par rapport au précédent sondage du même organisme. Du coup, l'écart entre les deux rivaux revient dans la marge d'erreur de +/-2%. "Mais la probabilité que Mme Rousseff soit en tête est plus importante", souligne Datafolha. L'institut Ibope crédite pour sa part la présidente sortante d'une avance plus confortable de six points, avec 53% d'intentions de vote contre 47% pour l'opposant, hors d'une marge d'erreur de +/-2% également. Par rapport au précédent sondage Ibope, divulgué le 23 octobre, la présidente perd là aussi un point et M. Neves en gagne un. Une autre enquête précédemment rendue publique samedi par l'institut MDA donnait les deux candidats au coude-à-coude. Selon ce sondage, Aecio Neves obtient le soutien de 45,3% des personnes interrogées, contre 44,7% à Dilma Rousseff.
Bataille acharnée Un total de 142,8 millions de Brésiliens sont appelés aux urnes dimanche pour départager les deux rivaux. Mme Rousseff, candidate du Parti des travailleurs (PT) au pouvoir depuis 12 ans, avait remporté le premier tour du 5 octobre avec 41,59% des voix devant M. Neves (33,55%), candidat du Parti social-démocrate brésilien. Mais la bataille entre les deux tours a été acharnée. M. Neves, au-delà de la droite classique, a attiré de nombreux électeurs des classes moyennes, déçus de la gauche et qui avaient voté au premier tour pour l'écologiste Marina Silva. Mme Rousseff se porte garante des grandes avancées sociales enregistrées en 12 ans de gouvernement de son PT. M. Neves promet lui de renouer avec une gestion économique plus libérale pour relancer l'économie en panne du géant émergent d'Amérique latine, et lutter contre une inflation donnant des signes inquiétants de surchauffe.
La corruption empoisonne la fin de la campagne Le scandale de corruption Petrobras a envenimé ce week-end l'ultime débat télévisé de la campagne acharnée pour l'élection présidentielle de dimanche au Brésil entre la présidente sortante Dilma Rousseff et son rival de centre droit Aecio Neves. Des dizaines de millions de téléspectateurs ont assisté sur TV Globo au dernier round de la campagne électorale la plus disputée et la plus virulente en 30 ans dans un pays qui est le géant émergent et en pleine mutation d'Amérique latine. Samedi, pour leurs dernières apparitions, les candidats sont restés dans leur fief. Dilma Rousseff devait défiler dans les rues de Porto Alegre, cette cité berceau du Forum social mondial des altermondialistes et vitrine de son Parti des travailleurs (PT) où elle a vécu à l'âge adulte. Aecio Neves devait pour sa part se recueillir à Sao Joao del Rey, dans l'Etat du Minas Gerais (sud-est), sur la tombe de son grand-père Tancredo Neves, un opposant à la dictature qui a été élu président en 1985 mais est mort avant de prendre ses fonctions.
Campagne sordide Nettement distancé ces derniers jours dans les sondages par sa rivale de gauche, M. Neves a accusé vendredi soir, bille en tête, la présidente d'avoir fait la campagne (électorale) la plus sordide de l'histoire du Brésil. Il s'est aussitôt emparé de la grenade dégoupillée quelques heures plus tôt par l'hebdomadaire Veja, selon lequel Dilma Rousseff et son prédécesseur Lula étaient au courant du vaste système de corruption politique au sein de la compagnie pétrolière nationale Petrobras. Ils savaient tout, a titré Veja en Une, citant de présumées confessions à la police d'Alberto Yousseff, l'un des suspects clés dans ce dossier. Etiez-vous au courant, comme le dit la revue Veja ? a demandé M. Neves à la présidente. Ce sont de pures calomnies, de la diffamation, a riposté Mme Rousseff, dénonçant un coup électoral. J'irai en justice pour me défendre et j'ai la certitude que le peuple brésilien montrera dimanche son indignation en rejetant votre programme qui constitue pour le Brésil un retour en arrière, a-t-elle ajouté. Les affaires de corruption ont terni l'image du Parti des travailleurs, au pouvoir depuis 12 ans, détournant de lui de nombreux électeurs de gauche. Et M. Neves en a fait dès le départ un des principaux axes de sa campagne. Mme Rousseff s'est défendue en assurant avoir toujours été intransigeante dans la lutte contre la corruption. Elle a souligné au cours du débat que si les enquêtes sortaient aujourd'hui, c'est parce qu'elle avait accordé une pleine autonomie à la police fédérale, alors que lorsque le Parti social-démocrate brésilien (PSDB) était au pouvoir, entre 1995 et 2002, elles étaient systématiquement enterrées. Mme Rousseff a notamment prôné des peines plus dures pour corrupteurs et corrompus et l'interdiction du financement des campagnes électorales par les entreprises. Il existe une façon d'en finir avec la corruption. C'est de retirer le PT du pouvoir, a, quant à lui, proclamé Aecio Neves. Ces échanges acides ont éclipsé les enjeux de cette élection qui divise les Brésiliens. Les plus démunis et les régions les plus pauvres du Nord-Est sont reconnaissants à la gauche pour ses programmes sociaux, qui bénéficient à plus de 50 millions d'entre eux. Les plus aisés veulent en finir avec le règne d'un PT qu'ils jugent responsable du ralentissement économique du Brésil, entré en récession au premier semestre. L'issue de la bataille se joue au sein de la classe moyenne devenue majoritaire, partagée entre fidélité aux conquêtes des années Lula (2003-2010) et un sentiment d'insatisfaction grandissant envers l'actuel gouvernement. C'est dans cette catégorie sociale que Mme Rousseff a récupéré le plus de points ces derniers jours, en particulier dans le sud-est industrialisé. De son côté, M. Neves promet un coup de barre libéral pour redresser l'économie et lutter contre l'inflation
Sécurité renforcée La police militaire a déployé 35 000 hommes depuis vendredi dans tout l'Etat de Rio pour assurer la sécurité du scrutin, après des attaques de criminels contre des postes de police dans des favelas pacifiées. Depuis avril, 3 000 militaires occupent le Complexo da Maré, près de l'aéroport international et, vendredi, 110 fusiliers marins sont arrivés en renfort. La sécurité a été renforcée par l'armée dans 224 villes, notamment dans le Para, en Amazonie. Le résultat de la présidentielle devait être connu après 20H00 (22H00 GMT).