Moumene Belghoul Le scandale de corruption Petrobras marquera l'ultime débat télévisé de la campagne pour le second tour de l'élection présidentielle, prévu aujourd'hui au Brésil, entre la présidente sortante, Dilma Rousseff, et son rival de centre droit, Aecio Neves. Les Brésiliens ont assisté sur TV Globo au dernier round de la campagne électorale la plus disputée depuis 30 ans dans ce grand pays émergent d'Amérique latine. Neves, nettement distancé ces derniers jours dans les sondages par sa rivale de gauche, a accusé la Présidente d'avoir mené «la campagne la plus sordide» de l'histoire du Brésil. Il ne s'est pas fait prier pour ressortir la controverse publiée par l'hebdomadaire Veja, selon qui Dilma Rousseff et son prédécesseur Lula, étaient bien au courant du vaste système de corruption politique au sein de Petrobras. «Ils savaient tout !», a titré le journal en Une, citant de présumées confessions à la police d'un suspect au cœur de ce dossier. Le timing des révélations publiées n'est évidemment pas anodin. De quoi donner un argument sérieux à un des candidats à l'heure du choix. «Etiez-vous au courant comme le dit la revue Veja?», a interrogé Neves. Mais la riposte ne s'est pas faite attendre. «Ce sont de pures calomnies, de la diffamation», a répliqué Mme Rousseff, dénonçant un «coup électoral» et une tentative de «manipulation» des électeurs. «J'irai en justice pour me défendre et j'ai la certitude que le peuple brésilien montrera dimanche son indignation en rejetant votre programme qui représente un retour en arrière du Brésil.» Il faut dire que les affaires de corruption ont sérieusement terni l'image du Parti des travailleurs de Mme Rousseff, au pouvoir depuis 12 ans. De nombreux électeurs de gauche, déçus par «les affaires», ont changé de cap. Conscient de cette situation, Neves en a fait dès le départ un des axes principaux de sa campagne. Mais Dilma Rousseff a réaffirmé sa fermeté et son intransigeance envers la corruption soulignant que si les enquêtes sortaient aujourd'hui, c'est parce qu'elle avait donné pleine autonomie à la police fédérale. Alors que lorsque le Parti social démocrate brésilien (Psdb) était au pouvoir, entre 1995 et 2002, «elles étaient systématiquement enterrées». À la question sur ce que les deux candidats comptaient faire pour en finir avec les affaires de corruption, la présidente candidate Rousseff a prôné des peines plus dures contre les corrupteurs et les corrompus ainsi que l'interdiction du financement des campagnes électorales par les entreprises. Mais pour Aecio Neves il n'existe qu'une façon d'en finir avec la corruption, «c'est de retirer le PT du pouvoir !» Ces piques assassines entre les deux candidats ont éclipsé les enjeux de cette élection, qui semble diviser les Brésiliens malgré un léger avantage pour Rousseff. Les plus pauvres du Nord-est sont toujours fidèles à la gauche, connue pour ses programmes sociaux qui bénéficient à plus de 50 millions d'entre eux. Les classes aisées semblent vouloir en finir avec le règne d'un PT qu'ils jugent responsable du ralentissement économique du pays. La bataille pour la présidentielle se joue au sein de la classe moyenne, devenue majoritaire au cours des dernières années. Une classe moyenne partagée entre fidélité aux conquêtes des années Lula et un sentiment d'insatisfaction grandissant envers l'actuel gouvernement. M. B./Agences