La campagne officielle a débuté avant-hier en Tunisie pour le second tour de l'élection présidentielle qui opposera le 21 décembre le président sortant Moncef Marzouki au chef du parti anti-islamiste Nidaa Tounès, Béji Caïd Essebsi. La date du second tour a été annoncée lundi par Chafik Sarsar, le président de l'instance chargée d'organiser le scrutin (Isie), après l'approbation des résultats définitifs du premier tour. MM. Caïd Essebsi et Marzouki ont respectivement obtenu 39,46% et 33,43% des voix le 23 novembre. Ce premier tour a été salué comme crédible, pluraliste et transparent par la mission d'observation électorale de l'Union européenne. La campagne électorale du second tour se terminera le 19 décembre à minuit, a précisé M. Sarsar, qui a appelé les candidats et les médias à respecter les principes de la campagne électorale au vu de l'importance de ce moment historique. Les Tunisiens résidant à l'étranger voteront les 19, 20 et 21 décembre. Les deux candidats, qui ne cachent leur animosité l'un pour l'autre, ainsi que leurs partisans n'ont pas attendu le début officiel de la campagne pour échanger des accusations, laissant présager une période pré-électorale tendue dans un pays encore fragile, près de quatre ans après la révolution qui a renversé la dictature de Zine El Abidine Ben Ali. M. Caïd Essebsi, 88 ans, dont le parti a remporté les législatives du 26 octobre, dit vouloir rétablir le prestige de l'Etat après quatre années mouvementées, marquées par l'essor d'une mouvance djihadiste armée. Il présente M. Marzouki comme le candidat des islamistes et même des salafistes djihadistes. M. Marzouki, un militant des droits de l'Homme séculier longtemps exilé en France, estime avoir empêché le chaos par son alliance avec les islamistes d'Ennahda et accuse son adversaire d'être un représentant de l'ancien régime qui n'a rien à voir avec la démocratie. C'est la première fois que les Tunisiens élisent librement leur chef de l'Etat. De son indépendance en 1956 jusqu'à la révolution de 2011, la Tunisie n'a en effet jamais connu de scrutin présidentiel libre, les précédents présidents, Habib Bourguiba et Ben Ali, ayant usé du plébiscite ou de falsifications pour se faire réélire avec des scores dépassant les 90%. M. Marzouki avait été élu fin 2011 par l'Assemblée nationale constituante à la faveur d'un accord de coalition avec les islamistes d'Ennahda, alors majoritaires. Ce parti, deuxième force politique du pays à l'issue des législatives, n'a soutenu aucun candidat au premier tour de la présidentielle et a indiqué qu'il comptait pour l'instant conserver cette position pour le second tour. Afin d'éviter un retour à la dictature, la nouvelle Constitution donne des prérogatives assez limitées au président, élu pour cinq ans, mais l'élection au suffrage universel lui confère un poids politique important. L'essentiel du pouvoir exécutif dépend cependant du futur Premier ministre, issu de la majorité parlementaire.