Monsieur Tout-le-Monde au volant d'une Tesla ? Malgré le succès de ces voitures électriques de luxe, ce n'est peut-être pas pour demain, et la baisse des prix du pétrole jette un bâton dans les roues d'Elon Musk, le fondateur du constructeur californien. Tesla, chouchou de Wall Street, a toujours vu les choses en grand. Après avoir séduit les stars - Leonardo Di Caprio, Brad Pitt, George Clooney -, la start-up de Palo Alto veut entrer d'ici 2017 dans le garage de la classe moyenne. Pour ce faire, Tesla mise sur le développement d'une berline compacte, le Model 3, censé assurer sa transition vers la production de masse. Le prix d'appel, entre 35 000 et 40 000 dollars, contre 105 000 dollars pour l'unique voiture de la marque actuellement, le Model S, est destiné à séduire le plus grand nombre et à faire entrer Tesla dans la cour des grands constructeurs automobiles. M. Musk veut en effet multiplier par trois la production de Tesla en 2015 pour la porter à 100 000 véhicules, et même monter à 500 000 voitures par an d'ici 2020. Tesla a écoulé 18 750 voitures sur le seul marché américain en 2014, en recul de 3,1% sur un an, avec un objectif de ventes mondiales de 35 000 véhicules. La banque américaine Morgan Stanley, l'une des rares à avoir cru à ces ambitions, est désormais sceptique. Tesla reste un producteur de niche, juge-t-elle dans une note, estimant qu'au mieux Tesla produira aux alentours de 300 000 véhicules électriques sur le calendrier que s'est donné l'entreprise. Car, selon elle, pour démocratiser la voiture électrique, Tesla doit trouver le moyen de fabriquer une batterie à un prix compétitif, ce qui semble difficile dans l'environnement actuel où le baril de pétrole bat des records à la baisse.
Baisser le coût des batteries Les marchés financiers doutent à leur tour de la capacité de la start-up à devenir plus populaire. Cela se traduit par un plongeon du titre en Bourse: de 275 dollars en septembre, l'action Tesla s'échange désormais aux alentours de 206 dollars, soit quelque 12 milliards de dollars effacés de sa capitalisation boursière. Pour réussir son pari, Tesla est en train de construire dans le Nevada (ouest des Etats-Unis) une usine géante de batteries au lithium-ion, censée être la plus grosse au monde, pour un investissement de 4 à 5 milliards de dollars. Le but de cet énorme projet est de réduire le coût de la batterie, permettant ainsi de diminuer le prix de vente des voitures électriques. D'après les analystes, ce gros investissement risque d'affecter les résultats de Tesla, qui n'a jamais réalisé le moindre bénéfice depuis sa création. De surcroît, l'installation à ses propres frais en Europe de l'Ouest de stations de recharge gratuites et rapides pour le Model S représente des sommes importantes. La nouvelle usine va certes aider à abaisser le coût de fabrication de la batterie, mais la donne change si le baril de pétrole s'inscrit à long terme à 50-60 dollars, prévient Martin Zimmerman, enseignant à l'Université du Michigan (nord) et ancien dirigeant chez Ford. Or si le Model 3 censé démocratiser la marque n'est pas accessible au plus grand nombre, dit-il, Tesla restera cantonné à sa niche en compétition avec des mastodontes comme BMW et Mercedes. Tesla a été fondée en 2003 par M. Musk, également fondateur du site de paiement en ligne PayPal et de Space X, une société de construction de fusées qui ravitaillent notamment la Station spatiale internationale (ISS), en coopération avec la Nasa. A ce jour, elle commercialise un modèle unique, la S, et développe un 4X4 crossover, le X, dont les premières livraisons sont prévues au printemps. La start-up travaille également sur de nouvelles versions du Model S disposant de quatre roues motrices motorisées séparément afin de séduire dans des régions américaines où le temps est moins clément que dans son fief californien.