Le patron de la diplomatie américaine John Kerry et son homologue iranien Mohammad Javad Zarif ont commencé hier à Genève d'intenses tractations en vue de sceller d'ici à la fin juin un accord historique sur le programme nucléaire de Téhéran. Conclure un règlement avec l'Iran sur le nucléaire est non seulement une priorité du président Barack Obama, mais s'inscrit même dans un dessein encore plus ambitieux: réconcilier à terme les Etats-Unis et la puissance régionale chiite avec l'espoir d'apaiser les conflits au Moyen-Orient. Le programme nucléaire controversé de la République islamique empoisonne la communauté internationale depuis 2003 et les grandes puissances du groupe 5+1 (Etats-Unis, Russie, Chine, France, Royaume-Uni et Allemagne) négocient depuis l'automne 2013 avec l'Iran, sous l'égide de l'Union européenne, pour trouver un moyen de contrôler les ambitions atomiques de Téhéran en échange d'une levée de sanctions. Après un accord provisoire en novembre 2013 et un accord de principe le 2 avril, les parties ont jusqu'au 30 juin pour graver dans le marbre un texte complet et définitif. MM. Kerry et Zarif, qui pilotent les pourparlers depuis des mois, se sont retrouvés vers 09H00 GMT dans un grand hôtel de Genève, dans une ambiance visiblement détendue, pour une journée de discussions. Elles pourraient se prolonger jusqu'à dimanche. Des négociateurs du 5+1 et de l'Iran étaient à Vienne cette semaine et, côté américain, le ministre de l'Energie Ernest Moniz et la directrice politique du département d'Etat Wendy Sherman sont venus épauler John Kerry dans la ville suisse. Interrogé sur la probabilité de signer un accord dans les temps, M. Zarif a dit dans un sourire nous allons essayer. Le secrétaire d'Etat américain n'a pas dit un mot. Il nous reste un mois. Je pense que vous allez voir une escalade en juin qui va être un mois très intense, a commenté un cadre du département d'Etat, réaffirmant que Washington tenait à la date du 30 juin et n'envisageait pas à l'heure actuelle de prolongation des discussions. Car à un mois de l'échéance, l'Iran et les pays européens ont évoqué cette semaine la possibilité que les pourparlers débordent sur le début de juillet. Selon une source diplomatique occidentale, le face-à-face Kerry-Zarif vise à faire le point, les Iraniens pourront dire ce qu'ils peuvent et ne peuvent pas faire, les Américains ce qui ne va pas. Sur le fond, la question des inspections internationales des sites nucléaires, visant à garantir le caractère pacifique et civil du programme iranien, est l'un des points les plus épineux.
Le tabouret tombe Téhéran, qui a toujours nié vouloir se doter de la bombe atomique, exclut toute inspection de ses sites militaires au nom de la protection de ses intérêts nationaux. Il accepterait toutefois un accès réglementé pour des experts étrangers dans le cadre du protocole additionnel au Traité de non-prolifération nucléaire. Kerry va souligner devant Zarif l'importance pour les Six de l'accès et des inspections, pense le diplomate occidental. C'est un des pieds du tabouret. Ce n'est pas le seul pied, mais s'il n'y est pas, le tabouret tombe, décrypte-t-il. Yukiya Amano, directeur de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), qui mettra en œuvre un éventuel accord, a souligné la nécessité pour l'agence onusienne d'avoir accès à tous les sites, y compris militaires. Le chef de la diplomatie française Laurent Fabius lui a emboîté le pas, prévenant que Paris n'accepterait pas d'accord s'il n'y pas de vérification de toutes les installations iraniennes, y compris les sites militaires. La France affiche la position la plus dure au sein du 5+1, redoutant que les Etats-Unis ne fassent trop de concessions pour signer un règlement historique. L'administration démocrate Obama est sous pression d'un Congrès républicain, majoritairement hostile à l'Iran et qui a imposé son droit de regard, cet été, sur un texte final. Un règlement avec l'Iran alarme aussi Israël et les monarchies du Golfe. De fait, et même s'ils s'en défendent officiellement, Téhéran et Washington sont en plein rapprochement après 35 ans sans relations diplomatiques. Mais, relèvent des experts, les deux adversaires sont encore loin de pouvoir normaliser leurs relations et se borneront à poursuivre leurs discrètes discussions sur les conflits régionaux, comme la lutte contre le groupe ultra-radical sunnite Etat islamique en Syrie et en Irak.
Pas d'inspection des sites militaires L'Iran refuse que l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) mène des inspections de ses sites militaires et interroge ses scientifiques dans le cadre d'un accord sur le nucléaire, a déclaré hier un haut négociateur iranien selon la télévision d'Etat. Cette déclaration d'Abbas Araghchi, faite peu avant la rencontre entre le chef de la diplomatie iranienne Mohammad Javad Zarif et son homologue américain John Kerry à Genève, reprend la position exprimée par le guide suprême iranien, l'ayatollah Ali Khamenei, le 20 mai dernier. Toutefois, M. Araghchi a fait il y a quelques jours la distinction entre inspection et accès aux sites militaires dans le cadre de l'accord en cours de finalisation. L'interrogatoire de nos savants est définitivement hors de question et l'inspection des sites militaires aussi, a déclaré M. Araghchi. Mais dans le cadre du Protocole additionnel et les procédures prévues par ce protocole, les discussions continuent. Il n'y toujours pas d'accord sur cette question, les deux discussions continuent. La manière d'appliquer le protocole additionnel est un des sujets de divergences sur lequel on discute, a-t-il ajouté. Le protocole additionnel au Traité de non-prolifération, dont l'application a été acceptée par Téhéran dans le cadre d'un accord sur le nucléaire, permet des inspections poussées des sites nucléaires mais aussi l'accès à d'autres sites, y compris des sites militaires, par les inspecteurs de l'AIEA. Selon Téhéran un tel accès est réglementé, et doit être justifié. MM. Kerry et Zarif pilotent depuis des mois les négociations entre les grandes puissances du groupe 5+1 (Etats-Unis, Russie, Chine, France, Royaume-Uni et Allemagne) et Téhéran, sous l'égide de l'UE, afin de trouver un accord définitif sur le programme nucléaire controversé de la République islamique. Les parties ont jusqu'au 30 juin pour graver dans le marbre un texte final.