Le FC Barcelone a joué comme dans un rêve pour humilier le Real Madrid à Santiago-Bernabeu (0-4) et plonger son rival de toujours dans la crise. Mais Rafael Benitez s'est aussi tiré une balle de pied en alignant un onze de départ déséquilibré. Notre antisèche. Le Real alignait pourtant son équipe-type, une première cette saison. On ne la reverra pas forcément, tant le Barça a mis en lumière le déséquilibre de ce onze madrilène. Le mérite en revient d'abord aux Catalans, au-dessus dans tous les secteurs et surtout tactiquement. Avec un milieu renforcé, ils ont totalement neutralisé l'équipe merengue, notamment son métronome Toni Kroos, grâce à un pressing parfaitement organisé. La qualité de passe et la supériorité collective des hommes de Luis Enrique a fait le reste. Le premier but du Barça, au terme d'une phase de possession longue d'une minute, a symbolisé la maîtrise technique barcelonaise. Barcelone tient clairement son match de référence. Le Real, au-delà de son onze de départ sexy mais bancal, a aussi tendu le bâton pour se faire battre. Les ailiers n'ont jamais effectué le travail de repli défensif nécessaire pour venir soulager les milieux. Les joueurs madrilènes ont été beaucoup trop imprécis dans leur placement. Cela explique aussi pourquoi le Barça a eu tant de situations de supériorité numérique, et pourquoi ses joueurs semblaient toujours avoir un temps d'avance dans les duels, comme sur les troisième et quatrième buts. Dans ces conditions, avec le talent des individualités barcelonaises, le Real s'est fait corriger.
Le récital d'Iniesta, la faillite des cadres du Real Au Barça, il n'y a quasiment rien à jeter, mais Andres Iniesta a illuminé le match de sa justesse technique et de sa créativité. En ajoutant un but somptueux à sa prestation. Luis Suarez, auteur d'un doublé, et Neymar, lui aussi buteur, ont été les autres bourreaux du Real Madrid. Sergi Roberto a confirmé les promesses de ses dernières sorties et Claudio Bravo a signé quelques belles parades pour écoeurer un peu plus le Real. Lionel Messi, sans rythme, est resté discret après son entrée. Au Real, à l'inverse, il n'y a pas grand-chose à garder. A commencer par les cadres. Cristiano Ronaldo et Sergio Ramos, aux deux extrémités du terrain, ont symbolisé la faillite de la Maison Blanche. Toni Kroos a été très loin de son rendement habituel dans l'entrejeu, tandis que Danilo a souffert le martyr face à Neymar. Les lacunes du Brésilien n'ont pas facilité la tâche de Raphaël Varane mais le Français a à peu près surnagé, comme Marcelo et Luka Modric.
Ce qui aurait pu tout changer Impossible à trouver vu l'ampleur du score. Mais l'absence de Casemiro, laissé sur le banc pour permettre le retour de James Rodriguez dans l'entrejeu, a quand même considérablement déséquilibré le milieu du Real. De là à dire que le Barça n'aurait pas pris le dessus dans ce secteur si Madrid avait aligné son Brésilien, il y un pas qu'on ne franchira pas. Mais le cas de Casemiro illustre aussi la responsabilité de Rafael Benitez. L'entraîneur du Real s'est trompé dans son onze de départ. Andres Iniesta n'a pas seulement éclaboussé ce Clasico de son talent, au point de sortir sous les applaudissements du public de Santiago-Bernabeu. Le milieu du Barça, en inscrivant le troisième but barcelonais, a ainsi brisé une série. Avant son but, les 19 dernières réalisations catalanes avaient été signées soit par Neymar, soit par Luis Suarez. Derrière, l'Uruguayen a inscrit le quatrième but de l'équipe de Luis Enrique. Le début d'une nouvelle série ?
Le Real doit-il se séparer de Rafael Benitez ? C'est évidemment la question qui agite toute la capitale espagnole après une telle humiliation face à l'ennemi de toujours. D'autant plus que ça commençait déjà à gronder. Au-delà du style Benitez, pas forcément en adéquation avec l'identité du Real, les deux dernières sorties du club merengue avaient déjà remis l'avenir de l'entraîneur madrilène en question. Le public de Santiago-Bernabeu avait sifflé son équipe malgré la victoire, qualifiée d'imméritée, face au PSG (1-0), et la défaite à Séville, avec trois buts encaissés (3-2), n'avait rien arrangé avant le Clasico. La déroute merengue, l'écart de niveau, béant, avec le Barça, et les choix tactiques très discutables de Benitez vont forcément pousser le président Florentino Perez à la réflexion, voire aux décisions. C'est quand même difficile de l'imaginer limoger aussi vite son entraîneur, seulement quatre mois après l'arrivée de l'ancien coach du Napoli. Parce que Perez voulait se séparer de Carlo Ancelotti, malgré un avis globalement défavorable du vestiaire, et que le choix de remplacer l'Italien par Benitez était le sien. Le désaveu serait énorme. Mais c'est peut-être le prix qu'il devra payer pour sortir le Real d'une crise dans laquelle le Barça l'a enfoncé.