Après une semaine de hausse grâce à des chiffres encourageants aux Etats-Unis, Wall Street devrait faire du suivisme, sans guère d'autre choix que regarder vers l'Europe et la Chine pour trouver une direction. Lors des cinq dernières séances, l'indice vedette Dow Jones Industrial Average a gagné 2,20% à 17 006,77 points et le Nasdaq, à dominante technologique, 2,76% à 4 717,02 points. Jugé le plus représentatif par de nombreux investisseurs, l'indice élargi S&P 500 a avancé de 2,67% à 1 999,99 points. Aux Etats-Unis, "on sort d'une semaine riche en statistiques et on peut dire que les inquiétudes sur l'économie américaine se sont calmées", a résumé Hugh Johnson, de Hugh Johnson Advisors. "Dans l'ensemble, ces chiffres ont été bons... Parce que l'on n'a pas eu de mauvaise surprise !" Parmi ces indicateur, les analystes mettent l'accent sur un chiffre meilleur que prévu sur l'activité industrielle, même si elle a de peu continué à se contracter le mois dernier, des ventes automobiles exceptionnelles en cette période de l'année, ou des créations d'emplois bien supérieures aux attentes, là aussi pour février. "Dans la tête des investisseurs, c'était une semaine ni trop chaude ni trop froide", a jugé Gregori Volokhine de Meeschaert Financial Services, rappelant que de trop bons chiffres réveilleraient le spectre d'une hausse des taux d'intérêt de la Réserve fédérale (Fed), la banque centrale américaine, lors de sa réunion de la mi-mars. Il relativisait néanmoins la hausse de Wall Street, qui en est à trois semaines de rebond après un mauvais début d'année, en remarquant que les volumes d'échange restent peu élevés. "Dans un marché orienté à la hausse de façon normale, quand le marché monte, les volumes augmentent parce que ça attire des investisseurs !", a-t-il jugé, remarquant que ce sont pour le moment des secteurs peu représentatifs qui servent de moteurs à la Bourse. En premier lieu, les valeurs liées à l'énergie et aux matières premières ont profité de la faveur de la stabilisation engagée depuis près d'un mois par les cours pétroliers, qui ont de nouveau nettement monté cette semaine. "On a marqué un point, mais est-ce que les marchés vont transformer l'essai la semaine prochaine ?", s'est interrogé M. Volokhine. "L'énergie c'est à peine 6% des indices, les matériaux beaucoup moins... C'est une partie de la cote tellement petite que pour que les marchés continuent à monter, il faut que tous les secteurs y participent".
Réunion de la BCE Comme souvent après les chiffres mensuels de l'emploi, le calendrier des indicateurs américains sera cependant peu chargé en éléments qui permettraient aux investisseurs de prendre position. En revanche, "ce sera une semaine animée en ce qui concerne la Chine, avec des chiffres sur ses réserves de devises, sur le commerce, les crédits et sur la production industrielle", a noté Tom Cahill, de Ventura Wealth Management, ce qui pourrait remettre sur le devant de la scène les inquiétudes sur le ralentissement chinois, très présentes en début d'année mais relativement passées au second plan. De plus, en Europe, la semaine sera dominée par une décision de politique monétaire - jeudi - de la Banque centrale européenne (BCE), dont les investisseurs ne doutent guère plus qu'elle va accélérer son soutien à l'économie. "Les derniers chiffres européens laissent penser que la croissance ralentit, alors qu'elle n'était déjà pas bien élevée", a rappelé M. Cahill. "Si la BCE fait quelque chose, les marchés ne seront pas surpris, mais si elle ne fait rien... Les marchés ne le prendront pas bien". Ces incertitudes internationales limitent les perspectives de Wall Street, d'autant que se profile la semaine suivante la réunion de la Fed, qui concerne plus directement les investisseurs américains. Après être presque revenue au niveau où elle avait commencé l'année, "la Bourse n'est plus sous-évaluée et elle va commencer à peiner", a conclu M. Johnson. "Cela ne sera plus aussi facile de monter."
Fin de semaine prudente Cela manifeste, selon Michael James, chez Wedbush Securities, les hésitations des investisseurs au terme d'une troisième semaine de progression d'affilée, même si une dose d'optimisme est manifestement revenue. "Les chiffres de l'emploi ont été bien meilleurs que prévu, et cela a permis de prolonger la solidité qu'on a vu ces deux dernières semaines", a-t-il dit. Les créations d'emplois aux Etats-Unis ont affiché un bond spectaculaire en février, dépassant largement les attentes des analystes à 242 000, et le taux de chômage est resté stable à 4,9%, au plus bas depuis huit ans. Ces chiffres "montrent que l'économie n'est pas sur le point d'entrer en récession", a déclaré Bill Lynch, chez Hinsdale Associates. Toutefois Chris Low, chez FTN Financial, a noté qu'"il y avait un problème de qualité: la durée du travail et les salaires ont baissé", témoignant de la création d'emplois "de mauvaise qualité" ou à temps partiel. Pour Patrick O'Hare, chez Briefing, ces chiffres "devraient être interprétés comme le signal suggérant que la croissance économique va rester médiocre en raison du niveau déprimé des dépenses des consommateurs". Surtout, a noté M. James, le bon niveau des embauches relance l'inquiétude qu'un resserrement monétaire prématuré puisse étouffer la croissance. "Alors qu'il y a deux semaines encore on pouvait exclure la perspective d'une hausse des taux d'intérêt à la réunion de la Réserve fédérale de la mi-mars, je crois qu'avec ces chiffres et la performance du marché, une nouvelle hausse d'un quart de point dans deux semaines n'est pas complètement exclue, ce qui modère l'optimisme", a-t-il dit. En outre, vu la résistance des seuils des 17 000 et 2 000 points, "je ne serais pas surpris de voir quelques prises de bénéfices la semaine prochaine", a-t-il dit.
Boom des ventes de Smith & Wesson HP Enterprise (HPE), regroupant les services et activités à destination des entreprises de l'ex-Hewlett Packard depuis novembre, s'est envolé de 13,53% à 15,44 dollars après des résultats au-dessus des attentes, malgré une baisse du chiffre d'affaires mise sur le compte des taux de change. Le fabricant d'armes à feu Smith & Wesson a bondi de 6,50% à 27,05 dollars après des résultats meilleurs que prévu, bénéficiant toujours du débat provoqué par la succession de tueries aux Etats-Unis qui pousse les consommateurs à s'équiper avant d'éventuelles mesures de contrôle renforcé. Le titre a presque doublé de valeur en un an. L'opérateur de salles de cinémas Carmike a logiquement bondi de 16,49% à 29,25 dollars après l'annonce de son rachat par son rival AMC Entertainment, propriété d'un groupe chinois, moyennant 1,1 milliard de dollars. La chaîne d'habillement Gap a gagné 2,63% à 29,29 dollars après l'annonce de ventes de février conformes aux attentes, bien qu'en chute de 2% en raison de la désaffection pour ses magasins haut de gamme Banana Republic. Le réseau social Facebook a cédé 1,09% à 108,39 dollars après avoir annoncé qu'il changerait la domiciliation fiscale des facturations réalisées au Royaume Uni, ce qui devrait alourdir son taux de taxation. Le distributeur de papeterie et articles de bureau Staples a perdu 2,74% à 9,60 dollars après des résultats trimestriels décevants.
La place tokyoïte finit en petite hausse La Bourse de Tokyo a fini en petite hausse vendredi, signant sa quatrième séance positive dans le sillage de la progression de Wall Street, sur fond de prudence des investisseurs avant la publication des chiffres mensuels de l'emploi américain. Le Nikkei des 225 valeurs vedettes a gagné 0,32% (+54,62 points) à l'issue des échanges, à 17 014,78 points, portant à 5,10% ses gains sur l'ensemble de la semaine. L'indice élargi Topix de tous les titres du premier tableau a pour sa part avancé de 0,46% (+6,30 points) à 1 375,35 points. L'activité a été intense, avec 2,65 milliards de titres échangés sur le premier marché. Sur le volet des changes, le dollar se situait au même moment autour de 133,84 yens, contre 114,10 yens jeudi à la fermeture de la place tokyoïte. L'euro a au contraire poursuivi sa remontée, à 124,70 yens, contre 123,90 yens la veille. Le Nikkei a retrouvé des couleurs ces derniers temps après un début d'année exécrable. "Les statistiques américaines continuent de briller, le pétrole se redresse et l'appétit du risque revient sur les marchés", a résumé pour l'agence Bloomberg Angus Nicholson, analyste chez IG à Melbourne. La hausse a cependant été limitée ce vendredi dans l'attente d'un rapport sur les créations d'emploi aux Etats-Unis. Les investisseurs vont par ailleurs surveiller ce week-end la session annuelle du Parlement chinois. Il doit entériner le nouveau plan quinquennal qui devra répondre aux défis du ralentissement économique du pays. "Les attentes sont grandes quant à l'annonce d'un nouveau plan de relance budgétaire", souligne M. Nicholson. Dans l'actualité nippone, le gouvernement de Shinzo Abe a choisi vendredi un économiste de 70 ans, Makoto Sakurai, pour occuper un des futurs sièges vacants au sein du comité de politique monétaire de la Banque du Japon (BoJ), divisé sur la ligne à suivre. La composition du comité de la BoJ est un enjeu important, alors que la décision d'instaurer des taux négatifs, prise fin janvier sous l'impulsion du gouverneur Haruhiko Kuroda, s'était heurtée à l'opposition de quatre des neuf membres, dont deux en partance. Sur le front des valeurs, c'est l'action Sharp qui a fait la course en tête (+9,42% à 151 yens), dopée par la perspective imminente d'un accord définitif avec le géant taïwanais Hon Hai/Foxconn. Parmi les autres titres en verve, se sont glissés Toshiba (+5,54% à 209,3 yens), ainsi que les groupes pétroliers Inpex (+6,83% à 971,3 yens) et JX Holdings (+1,87% à 479,3 yens). Dans l'automobile, les hausses ont été modestes: Toyota a grignoté 0,83% à 6 229 yens, Nissan 0,92% à 1 096,5 yens et Honda 0,37% à 3 188 yens. Du côté de l'autre secteur phare qu'est l'électronique, Sony a bondi de 2,87% à 2 592,5 yens.