Autrefois, la désignation par l'ONU d'une Année internationale avait un sens. Mais que penser de " l'Année de la pomme de terre proclamée pour 2008 ? " Tel était le ton caustique d'un éditorial récent, publié dans un quotidien canadien en ligne, qui rapportait que l'Année internationale de la pomme de terre 2008 aboutirait à une "Déclaration des droits de la pomme de terre et autres tubulaires comestibles". L'éditorialiste a révélé non seulement, un manque de connaissances générales en botanique - puisque la pomme de terre n'est pas un "tubulaire", mais un "tubercule"! - mais, surtout, qu'il n'avait aucune idée de sa place dans l'agriculture, l'économie et la sécurité alimentaire notamment dans les pays pauvres. Pour ne citer que le cas algérien, la hausse des prix de ce tubercule a provoqué une polémique et a suscité un débat sans précédant dans les rangs des autorités et des citoyens. Certains parlent de " crise de la pomme de terre " . d'autres évoquent " un scandale ". Ce qui démontre, de manière indélébile, la place qu'occupe ce produit de large consommation dans l'organigramme culinaire des Algériens. Pas seulement des Algériens, d'ailleurs, mais de beaucoup de personnes dans le monde en développement. En termes de quantités récoltées, notre humble tubercule est, en réalité, la quatrième culture vivrière au monde - après le maïs, le blé et le riz - avec une production de plus de 323 millions de tonnes en 2005. Pour les 10 premiers pays producteurs, qui assurent les deux tiers de la production mondiale de pommes de terre, la valeur totale de la culture était estimée aux alentours de 40 milliards de dollars. Les pommes de terre sont, en outre, indispensables à la sécurité alimentaire de centaines de millions de personnes vivant dans le monde en développement, où la consommation annuelle est passée de 10 kg par habitant au début des années 60 à environ 15kg. Si la production de pommes de terre a reculé en Europe, sa croissance est si forte dans les pays en développement- notamment en Chine et en Inde, que la production mondiale a quasiment doublé au cours des 20 dernières années. Depuis le début des années 60, selon la FAO, l'accroissement des superficies consacrée aux cultures de pommes de terre dans le monde en développement a dépassé celui de toutes les autres principales denrées vivrières, et d'ici 2020, la demande de pomme de terre devrait s'établir à deux fois celle de 1993. En ce qui concerne l'Algérie, elle a presque doublé sa production de pomme de terre en l'espace de cinq ans, passant de 12 760 000 quintaux en 2000 à 21 765 000 quintaux en 2005, selon les chiffres du ministère de l'Agriculture. Avec ce niveau de production, l'Algérie est ainsi le premier producteur de pommes de terre dans le monde arabe et le deuxième en Afrique après l'Afrique du Sud. Mais la production est jugée insuffisante. Beaucoup reste à faire , de l'avis même des responsables en charge du secteur, pour développer cette filière notamment en matière de disponibilité de la semence et de commercialisation . Autant dire que pour les populations à faible revenu des zones urbaines comme rurales, de par le monde, la pomme de terre est un véritable trésor enfoui qui fera fonction d'unité chef de file de la FAO pour la mise en œuvre de l'IYP 2008. Elle pousse vite, est adaptable, a des rendements élevés et se contente de faibles quantités d'intrants. Les pommes de terre sont parfaitement adaptées aux sites qui abondent en terres et en main d'œuvre, conditions qui caractérisent une grande partie du monde en développement. Elle détient en outre un potentiel considérable d'accroissement des rendements et de la productivité, en particulier dans certaines zones agricoles marginales inadaptées à d'autres cultures.