Le géant des télécommunications AT&T a annoncé samedi racheter pour 85,4 milliards de dollars Time Warner, propriétaire des chaînes de télévision CNN et HBO et des studios de cinéma Warner Bros, un mariage qui va bouleverser le paysage des médias américains. La transaction s'élève au total à 108,7 milliards de dollars si on inclut la dette, a tenu à préciser AT&T dans un communiqué. Un peu plus tôt, une source bancaire avait indiqué que l'opérateur avait accepté de débourser plus de 80 milliards de dollars pour Time Warner, qui abrite la cultissime série Game of Thrones. Ce mariage crée un mastodonte aussi bien dans les contenus que les tuyaux, avec des parts de marché importantes dans ces deux secteurs aux marges très lucratives, notamment les contenus qui attirent Amazon, Netflix et désormais Google. L'accord est "un assortiment parfait de deux sociétés avec des forces complémentaires qui peuvent apporter une nouvelle vision de la façon dont l'industrie des médias et des télécommunications travaille pour les clients, les créateurs de contenus, les distributeurs et les annonceurs", a déclaré le président d'AT&T, Randall Stephenson, dans un communiqué. Le mariage, qui devrait être finalisé fin 2017, se fera en liquide et en actions. Les actionnaires de Time Warner, qui vont recevoir 107,50 dollars par titre, détiendront ainsi entre 14,4% et 15,7% de la nouvelle entité et ceux de AT&T le solde du capital. Cette fusion devrait être examinée de près par les autorités de la concurrence et la classe politique américaine car la nouvelle entité pèserait à elle seule plus de 300 milliards de dollars en Bourse, avec des activités allant du téléphone aux médias en passant par le câble et internet. En campagne samedi, Donald Trump, le candidat républicain à la Maison Blanche, a d'ores et déjà indiqué qu'il ferait tout pour bloquer le mariage s'il était élu président le 8 novembre prochain. "C'est beaucoup de concentration de pouvoirs dans les mains de peu de personnes", a critiqué M. Trump. 69,6 milliards de dollars de valeur AT&T, fournisseur d'accès aux chaînes payantes et un des deux grands opérateurs télécoms américain, était valorisé 230,6 milliards de dollars vendredi soir à Wall Street, tandis que Time Warner, qui détient 10% du capital du service de vidéo en streaming Hulu, valait 69,6 milliards de dollars. AT&T affirmait avoir 142 millions d'abonnés au wifi fin juin et 30 millions en Amérique du nord et 38 millions à la vidéo via DirectTV. La fusion AT&T-Time Warner est l'un des plus gros mariages entre un fournisseur d'accès aux chaînes payantes et un fournisseur de contenus depuis le rachat en 2011 de NBCUniversal par Comcast. Elle complète le recentrage stratégique vers la vidéo impulsé ces dernières années par AT&T. L'une des opérations les plus "transformatrices" pour l'opérateur de télécoms avait été l'achat à près de 50 milliards de dollars (sans la dette) de DirecTV, bouclé l'été dernier, qui a fait du groupe l'un des plus gros acteurs sur le marché américain de la diffusion télévisée payante. Avec Time Warner, propriétaire des studios Warner Bros ainsi que des chaînes de télévision HBO et CNN, AT&T va mettre cette fois la main sur un important catalogue de contenus recherchés dans le sport, le cinéma ("Suicide Squad" ou "Fantastic Beasts"...) et les séries télévisées telles "Game of Thrones", "The Wire" ou encore "Les Sopranos". Il y a deux ans, Time Warner avait rejeté une offre à plus de 75 milliards de dollars de 21st Century Fox, son rival contrôlé par la famille Murdoch, car le prix proposé était jugé insuffisant. C'est donc une bonne revanche personnelle pour Jeff Bewkes, qui avait été critiqué pour avoir refusé l'offre de Fox. Time Warner a déjà par le passé effectué une tentative de mariage malheureuse. Avec le groupe internet américain AOL en 2000 il s'était soldé par un divorce en 2009. Le groupe représente toutefois un morceau de choix, en raison des contenus de valeur dont il est propriétaire, mais aussi de la structure relativement simple de son actionnariat, avec une seule classe d'actions, selon les analystes de RBC Capital Markets. Beaucoup d'autres grands groupes de médias américains sont en effet protégés par un actionnaire majoritaire verrouillant une large partie des droits de vote, comme la famille Murdoch avec 21st Century Fox ou les Redstone avec Viacom et CBS. "Cela ne laisse fondamentalement que Disney, qui serait une opération impossible avec une capitalisation boursière de près de 150 milliards de dollars", ajoute RBC. Obstacles L'action du groupe de médias, qui avait déjà gagné presque 5% jeudi, a ainsi clôturé vendredi sur un bond de 7,82% à 89,48 dollars. Elle a même franchi en cours de séance la barre des 90 dollars, pour la première fois depuis quinze ans. Ce rapprochement viendrait compléter le recentrage stratégique vers la vidéo engagé ces dernières années par AT&T. L'une des opérations les plus "transformatrices" pour l'opérateur de télécoms avait été l'achat pour près de 50 milliards de dollars (sans la dette) de DirecTV, bouclé l'été dernier, qui a fait du groupe l'un des plus gros acteurs sur le marché américain de la diffusion télévisée payante. Avec Time Warner, propriétaire des studios Warner Bros ainsi que des chaînes de télévision HBO ou CNN, AT&T mettrait cette fois la main sur un important catalogue de contenus recherchés dans le sport, le cinéma ou les séries télévisées. Plusieurs analystes prévenaient toutefois qu'une telle transaction risquait de se heurter à des objections des régulateurs américains. "Nous pensons qu'un long examen antitrust (...) avec un résultat incertain pourrait donner aux deux parties de quoi réfléchir avant de proposer une transaction", note Credit Suisse, rappelant l'examen approfondi qu'avait déjà dû, il y a quelques années, subir le mariage Comcast-NBCUniversal. Il y a deux ans, Time Warner avait rejeté une offre à plus de 75 milliards de dollars de 21st Century Fox, son rival contrôlé par la famille Murdoch, car le prix proposé était jugé insuffisant. Il faudrait sans doute cette fois-ci une prime importante pour convaincre les actionnaires. Time Warner a en outre déjà fait dans le passé une tentative de mariage malheureuse, avec le groupe internet américain AOL en 2000. Cela s'était également soldé par un divorce en 2009. Dans tous les cas, l'intérêt autour de Time Warner "démontre la valeur des médias pour divers distributeurs (télécoms)", ce qui devrait soutenir leurs cours de Bourse à moyen terme, relève RBC Capital Markets. Et de souligner que Time Warner représente dans le secteur un morceau de choix, en raison des contenus de valeur dont il est propriétaire, mais aussi de la structure relativement simple de son actionnariat, avec une seule classe d'actions. Beaucoup d'autres grands groupes de médias américains sont en effet protégés par un actionnaire majoritaire verrouillant une large partie des droits de vote, comme la famille Murdoch avec 21st Century Fox ou les Redstone avec Viacom et CBS. "Cela ne laisse fondamentalement que Disney, qui serait une opération impossible avec une capitalisation boursière de près de 150 milliards de dollars", ajoute RBC.