Les cours du pétrole ont terminé en hausse jeudi, le marché continuant à faire peu de cas du bond hebdomadaire des réserves américaines de brut annoncé la veille. Le prix du baril de "light sweet crude" (WTI), référence américaine du brut a monté de 66 cents, à 53,00 dollars sur le contrat pour livraison en mars au New York Mercantile Exchange (Nymex). A Londres, le prix du baril de Brent de la mer du Nord a gagné 51 cents à 55,63 dollars sur le contrat pour livraison en avril à l'Intercontinental Exchange (ICE). Les prix de l'or noir ont poursuivi leur rebond, effaçant une partie de leurs pertes de la semaine, malgré la forte hausse de 13,8 millions de barils des réserves américaines de brut, annoncée mercredi par le département de l'Energie (DoE). "Il n'y a absolument aucun moyen de l'expliquer", s'est exclamé James Williams de WTRG. Certains analystes ont toutefois avancé que les estimations de la fédération privée American Petroleum Institute (API), publiées un jour avant les chiffres officiels, avaient largement préparé le terrain et que l'augmentation des stocks n'avait donc pas été une surprise. "Les investisseurs avaient parié à la baisse parce qu'ils s'attendaient à une forte hausse des réserves de brut. Après la publication des chiffres ils sont repassés à l'achat", a estimé Mike Lynch de Strategic Energy and Economic Research. Sans vouloir minimiser l'ampleur de la progression des stocks de brut, les spécialistes remarquaient par ailleurs que les chiffres du DoE contenaient d'autres aspects plus positifs. Contrairement aux attentes, les réserves d'essence ont reculé de 900 000 barils et les produits distillés sont restés stables. "La baisse des stocks d'essence est attribuable principalement à une hausse de la demande, ce qui a compensé une production d'essence plus élevée", ont expliqué les analystes de Commerzbank dans une note. De son côté Matt Smith, de Clipperdata, avançait comme facteur de soutien aux cours, la bonne tenue des marchés d'actions américains jeudi, les trois principaux indices ayant battu des records en séance. Plus généralement, le baril à New York reste depuis le début de l'année dans une fourchette comprise entre 50 et 55 dollars le baril. "Les opérateurs de marché hésitent entre les réductions de l'offre de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) et la progression à venir de la production américaine de pétrole de schiste", a expliqué James Williams. Les coûteuses extractions de schistes aux Etats-Unis sont justement redevenues rentables grâce à la remontée des cours du brut fin 2016 avec la conclusion d'accords de limitation de la production par l'Opep et ses partenaires dont la Russie. Hausse en Asie Les cours du pétrole poursuivaient leur hausse dans les échanges matinaux en Asie, portés par un affaiblissement du dollar et des signes que l'Opep réduit sa production mais les gains étaient limités par une augmentation de l'offre venant des Etats-Unis, du Nigeria et de Libye. Vers 03h30 GMT, le baril de light sweet crude (WTI), référence américaine du brut, pour livraison en mars, gagnait 26 cents à 52,60 dollars dans les échanges électroniques en Asie. Le prix du baril de Brent, référence européenne, pour avril, prenait 28 cents à 55,40 dollars. Les cours avaient terminé la veille en très légère hausse. Le dollar -- monnaie d'échange du brut-- a reculé "la nuit dernière, ce qui pourrait avoir soutenu les cours", a déclaré Margaret Yang, analyste chez CMC Markets. Les analystes notent aussi des signes que l'Organisation des pays exportateurs de pétrole limite sa production comme prévu. Le 1er janvier sont entrés en vigueur deux accords de réduction des extractions, conclus à l'instigation de l'Opep en son sein et avec ses partenaires dont la Russie. "Mais les investisseurs s'inquiètent qu'une hausse de la production américaine n'annule les effets" de ces accords et "ne fasse baisser les cours", a ajouté Mme Yang. D'après le département américain de l'Energie, la production a de nouveau augmenté cette semaine. Depuis fin septembre, l'extraction de pétrole de schiste américain est redevenue rentable à cause de la remontée des cours de l'or noir. BMI Research écrit aussi que la croissance de la production en Libye et au Nigeria va vraisemblablement limiter la hausse des cours. Ces deux pays ont accru à eux deux "leur production de 200 000 barils par jour en moyenne" en janvier, avec une capacité supplémentaire de 500 000 barils par jour d'ici les six prochains mois", d'après BMI. Bond des stocks de brut américains Les stocks de pétrole brut ont augmenté bien plus fortement que prévu la semaine dernière aux Etats-Unis, selon des chiffres publiés mercredi par le département américain de l'Energie (DoE). Lors de la semaine achevée le 3 février, les réserves commerciales de brut ont bondi de 13,8 millions de barils pour atteindre 508,6 millions de barils. Les analystes interrogés par Bloomberg tablaient de façon médiane sur une hausse de seulement 2,5 millions. Les estimations de la fédération privée American Petroleum Institute avaient en revanche largement préparé les esprits, en anticipant mardi une hausse d'une ampleur encore plus marquée que les chiffres du DoE. A ce niveau les réserves commerciales de brut s'inscrivent en hausse de 8,1% par rapport à la même époque de 2016 et passent au-dessus de la limite supérieure de la fourchette moyenne à cette période. Le DoE a en revanche fait état d'un recul de 900 000 barils des réserves d'essence alors que les experts interrogés par Bloomberg comptaient sur une hausse de 1,5 million de barils. Elles affichent une légère hausse de 0,2% par rapport à la même période de l'année passée et se maintiennent au-dessus de limite supérieure de la fourchette moyenne à cette époque. De leur côté, les stocks de produits distillés (fioul de chauffage, gazole...) sont restés stables. Les experts de Bloomberg anticipaient une hausse de 500 000 barils. Ils s'inscrivent en hausse de 6,1% par rapport à la même époque de l'année précédente et sont au-dessus de la limite supérieure de la fourchette moyenne à cette période. Production en hausse Très surveillée par les analystes dans un contexte d'accord de baisses de production entre d'autres pays, la production américaine a avancé de 63 000 barils par jour (b/j), à 8,978 millions de barils par jour (mbj). Les réserves de brut du terminal de Cushing (Oklahoma, Sud), également scrutées de près car elles servent de référence à la cotation du pétrole à New York, ont progressé de 1,2 million de barils à 65,3 millions. Toutes catégories confondues, les stocks américains pétroliers ont avancé de seulement 1,4 million de barils, le net recul des stocks de propane et de propène pesant sur l'ensemble. Les raffineries américaines, dont la période de maintenance a débuté, ont ralenti la cadence, fonctionnant à 87,7% de leurs capacités, contre 88,2% la semaine précédente. Du côté de la demande, sur les quatre dernières semaines, les Etats-Unis ont consommé en moyenne 19,9 mbj de produits pétroliers, soit une hausse de 0,3% par rapport à la même époque de 2016. La demande d'essence a baissé de 6,0% alors que celle de produits distillés a avancé de 7,6% sur la même période, dans les deux cas sur un an.