Barack Obama a pris un net avantage sur Hillary Clinton à l'occasion des primaires organisées, mardi 12 février, en Virginie, dans le Maryland et dans la capitale fédérale, Washington (District de Columbia). Il dépasse désormais la sénatrice de New York dans la course à l'investiture démocrate pour l'élection présidentielle de novembre. Son adversaire potentiel, le républicain John McCain, s'est encore rapproché de la nomination, mais son score a montré qu'il n'a pas vaincu les résistances des évangéliques à son égard. Après la fermeture des bureaux de vote, Hillary Clinton a parlé la première. Elle se trouvait au Texas, où elle prépare la bataille qu'elle devra absolument gagner, le 4 mars, si elle veut combler l'écart qui est en train de se creuser avec son rival. Elle n'a pas abordé les défaites du jour, ni expliqué la démission de son directeur de campagne adjoint, la deuxième d'un membre de son état-major en quelques jours, se contentant de répéter qu'elle serait “prête dès le premier jour” pour être commandant en chef et relancer l'économie. M.Obama l'a très largement emporté. Dans le district de Columbia, il devance MmeClinton de 50points (75 % contre 24 %). Dans le Maryland, il obtient 60 % contre 37 %. En Virginie (64 % contre 35 %), il a bénéficié des voix des indépendants, qui étaient admis à participer au scrutin. Surtout, il a élargi l'éventail de ses électeurs. Jusqu'à présent, Mme Clinton était plutôt la candidate des “cols bleus”. Dans le Maryland et en Virginie, M. Obama l'a emporté de plus de 20points dans la catégorie des électeurs à bas salaires. Il reste à établir s'il s'agit d'un phénomène propre à la région ou si le sénateur de l'Illinois, qui s'était jusque-là assuré une coalition d'étudiants, de gens aisés et de Noirs, a réussi à faire une percée qui peut lui assurer la nomination. Dès son discours, prononcé dans le Wisconsin, un Etat qui vote le 19 février, il a insisté sur l'économie et promis qu'il serait un président “qui sera du côté des travailleurs”. Il devait annoncer des propositions pour “créer des millions de nouveaux emplois”, mercredi, lors d'un discours à l'usine General Motors de Janesville. Mme Clinton a conservé sa “clientèle” féminine blanche, et le vote rural en Virginie, mais son adversaire a emporté la majorité du vote blanc masculin. Au Texas, elle espère consolider le soutien des “Latinos” en sa faveur. Devant un auditoire de 16 000 personnes dans la ville universitaire de Madison, M. Obama a tenu un discours plus sobre que celui que lui avait écrit, dans le New Hamsphire, sa jeune “plume” de 26 ans, Jon Favreau, un étudiant recruté dans l'équipe de John Kerry à peine sorti de l'université jésuite Holy-Cross du Massachusetts. “Aujourd'hui, nous avons gagné à Washington. Mais ce mouvement ne cessera pas tant qu'il n'y aura pas du changement à Washington”, a dit M.Obama, avant de critiquer, comme il le fait souvent, les “cyniques” qui ne croient pas à son mouvement. “C'est la nouvelle majorité américaine”, a-t-il lancé. M.Obama a attaqué très directement John McCain, qui était venu lui serrer la main, dans la journée, au Sénat. Il a pris soin au préalable de rendre hommage à ses états de service : “John McCain est un héros. Nous applaudissons son service à la nation.” Puis il a préfiguré ses angles d'attaques pour l'éventuelle bataille contre le candidat républicain. La guerre : “M.McCain ne pourra pas dire que j'ai soutenu cette guerre, parce que j'y étais opposé depuis le départ.” Et les réductions d'impôt de 2003, que M. McCain a refusé de voter parce que les plus riches en bénéficiaient alors que le pays était en guerre. Aujourd'hui, M. McCain est favorable à leur renouvellement. “Quelque part sur la route, l'express du parler vrai a perdu une roue”, s'est moqué M.Obama. Quelques instants plus tard, M. McCain a répondu à M.Obama dans son attaque la plus construite à ce jour. Vingt-cinq ans séparent les deux hommes. Sans jamais citer son collègue, M. McCain a montré comment il allait négocier la différence d'âge, si M. Obama devait être le candidat démocrate : par une leçon de choses. “Encourager un pays avec seulement la rhétorique (…) n'est pas une promesse d'espoir. C'est une platitude”, a-t-il dit, avant d'ajouter : “Je ne me présente pas à la présidence avec la présomption que je suis béni d'une telle grandeur personnelle que l'Histoire m'a adoubé pour sauver mon pays dans ce moment de grand besoin. Je me présente avec l'humilité d'un homme qui ne peut pas oublier que son pays l'a sauvé.” Là-dessus, il a fini par une boutade : “Mes amis, je vous le promets : je suis excité et prêt à y aller.” Une expression (“Fired up, ready to go”) qui n'est autre que le slogan de campagne de Barack Obama...