L'Espagne a été secouée durant l'année 2017 par une grave crise politique en Catalogne, où les revendications des souverainistes ont envenimé les relations entre le gouvernement régional et l'Etat espagnol. L'année s'achève sur une crise qui persiste et une forte incertitude, conséquence d'une volonté de passer d'un autonomisme dominé par un souverainisme modéré à une volonté de déconnexion avec l'Espagne et à une proclamation de la république catalane indépendante. Cette question catalane qui a créé une situation politique inédite dans l'histoire récente de la démocratie espagnole embarrasse également Bruxelles, la capitale européenne soucieuse de l'intégrité, de la stabilité et de l'unité de l'un de ses importants membres. Avec le Brexit, la montée du populisme en Europe et la question catalane, l'Union européenne a depuis le début de la crise catalane exprimé son soutien au gouvernement espagnol, plaidé pour le respect des règles constitutionnelles espagnoles et évoqué une affaire intérieure. La Commission européenne a refusé de reconnaître la légalité du référendum sur l'indépendance du premier octobre en Catalogne, en prônant le dialogue entre les deux parties et en rejetant l'idée d'une médiation réclamée par le bloc sécessionniste catalan et rejetée par Madrid. Décidé plus que jamais à faire aboutir son projet indépendantiste, le gouvernement de la généralité de la Catalogne présidé par Carles Puigdemont, destitué par la suite, avait annoncé en juin 2017, son intention d'organiser un référendum d'indépendance en dépit des avertissements de Madrid qui a tout mis en œuvre pour empêcher la tenue de ce référendum interdit par la justice espagnole. Référendum du 1 octobre : le "oui" l'emporte dans un climat de violence Le premier octobre 2017, le gouvernement catalan est parvenu à organiser le référendum sur l'indépendance en dépit de son interdiction par la justice espagnole. La consultation s'est déroulée dans un climat tendu et émaillé d'incidents, et avec la participation de 2,26 millions de Catalans dont 2,02 millions qui se sont exprimés en faveur de l'indépendance. Le "oui" a gagné avec 90 pour cent des voix, selon le gouvernement catalan. Carles Puigdemont avait alors indiqué que la Catalogne avait gagné le droit d'avoir un Etat indépendant sous la forme d'une république, alors que le chef du gouvernement central espagnol Mariano Rajoy avait déclaré que son gouvernement ne reconnaît pas la légitimité du scrutin et qu'il avait agi avec fermeté, sérénité et dans le cadre de la loi. Sollicitant l'Union européenne à superviser une médiation internationale entre Madrid et Barcelone, M. Puigdemont constate le soutien de l'exécutif européen à M. Rajoy, en appelant toutefois à "passer rapidement de la confrontation au dialogue". La plupart des dirigeants européens n'avaient fait aucune déclaration. La question est d'autant plus sensible que d'autres pays membres, comme le Royaume Uni avec l'Ecosse, la Belgique avec la Flandre, sont eux mêmes confrontés aux volontés sécessionnistes de certaines régions, par contre le parlement européen avait souligné que la consultation sur l'indépendance de la Catalogne était inconstitutionnelle et illégale. Le 27 octobre, le parlement catalan déclare unilatéralement l'indépendance de la Catalogne qui sera suivie juste après par l'application de l'article 155 de la Constitution espagnole, qui a mis sous tutelle la Catalogne, destitué son gouvernement et convoqué de nouvelles élections régionales pour le 21 décembre. Poursuivis par la justice espagnole pour "sédition, rébellion et malversation", des membres de l'ex-gouvernement catalan seront emprisonnés alors que l'ex-président de la généralité Carles Puigdemont s'exile en Belgique avec quatre de ses anciens ministres pour faire ensuite l'objet d'un mandat d'arrêt européen, retiré finalement par la justice espagnole le 5 décembre .
Elections du 21 décembre : incertaines mais redonnent la majorité aux indépendantistes Les élections s'annoncent cruciales avec cependant une campagne électorale inédite puisque deux candidats sont soit en exil (Carles Puigdemont), soit en prison pour Oriol Junqueras. Partant divisés à ces élections, les formations indépendantistes avaient prédit les sondages, allaient perdre leur majorité au parlement. Se déroulant sans incidents, ces élections ont finalement redonné la majorité parlementaire au bloc sécessionniste avec cependant une surprise de taille. La victoire a été remportée pour la première fois en Catalogne par un parti constitutionnaliste en l'occurrence le parti Ciudadanos, qui obtenu 25 pc des voix et 37 des 135 sièges du Parlement régional, mais ce résultat ne lui permet pas de gouverner car le bloc indépendantiste (JXCAT, ERC, CUP) a obtenu 70 des 135 sièges du parlement avec une majorité absolue estimée à 47,6 pc des voix. Les partis constitutionnalistes (PPC, PSC, Ciudadanos) n'ont cumulé ensemble que 43,3 pc des voix. Même si le gouvernement central de Madrid se dit ouvert au dialogue avec le futur gouvernement catalan dans le cadre de la loi, l'investiture du prochain chef du gouvernement catalan reste compromise par la situation judiciaire de Carles Puigdemont et le manque de consensus entre indépendantistes. De nombreux analystes estiment que l'UE et ses institutions se doivent de régler ce différend "car ce qui se joue en Catalogne n'est pas seulement une affaire espagnole mais touche l'Union européenne en ses fondations".