Donald Trump a surpris les Européens en exigeant samedi "l'abandon" des barrières douanières et règlementaires sur les produits américains, pour être exempté des lourdes taxes imposées sur l'acier et l'aluminium importés. Le président américain a lancé cette mise en garde sur Twitter quelques heures après une réunion infructueuse sur le sujet à Bruxelles entre son représentant au commerce Robert Lighthizer et la Commission européenne. "L'Union européenne, des pays merveilleux qui traitent très mal les Etats-Unis dans le commerce, se plaignent des droits sur l'acier et l'aluminium", a écrit M. Trump. "S'ils abandonnent leurs horribles obstacles et leurs droits de douane sur les produits américains, nous abandonnerons les nôtres. Sinon, nous taxons les voitures etc. Honnête !", a-t-il ajouté.
Européens surpris Les Européens ont été surpris par les déclarations du président américain et par leur imprécision, mais ils se sont refusés dimanche à tout commentaire, "pour éviter la surenchère", a expliqué une source européenne. Ils attendent des explications lors des discussions prévues la semaine prochaine. Mais aucune réunion n'est prévue entre la Commissaire au Commerce Cecila Malmstrom et ses interlocuteurs américains, a-t-on précisé. Le président américain dénonce en particulier les droits de douane de 10% imposés par l'UE sur les véhicules, alors que les droits américains sont de 2,5%. Mais les droits européens sont appliqués à tous les véhicules importés, et pas seulement aux véhicules américains. En outre, la très grande partie des véhicules dits "européens" vendus aux Etats-Unis sont fabriqués sur le territoire des Etats-Unis. "La réalité est plus complexe qu'elle n'est présentée", souligne-t-on à Bruxelles. Le président américain a défendu sa position samedi lors d'un rassemblement politique en Pennsylvanie, important producteur d'acier, et a qualifié de "merde" l'acier d'importation. "Beaucoup d'aciéries ouvrent maintenant suite à ce que j'ai fait. L'acier est de retour et l'aluminium est de retour", a-t-il affirmé. Les attaques lancées samedi par Donald Trump semblent une réponse du président américain au mécontentement exprimé samedi par les Européens à Robert Lighthizer lors d'une rencontre prévue de longue date avec la commissaire au Commerce Cecilia Malmström et le ministre japonais de l'Economie Hiroshige Seko. Le Japon, comme l'Union européenne, exige d'être exempté des taxes américaines. Le Mexique et le Canada bénéficient d'une dérogation à ces taxes de 25% sur l'acier et 10% sur l'aluminium, et Donald Trump a signalé qu'un traitement de faveur était aussi envisageable pour l'Australie. "La discussion a été franche" mais "nous n'avons pas obtenu de clarté immédiate sur la procédure pour être exemptés", a annoncé Mme Malmström à l'issue de la rencontre. "Nous sommes un allié proche et un partenaire commercial des Etats-Unis. A ce titre, l'Union européenne doit être exclue des mesures annoncées" par le président Trump, a-t-elle répété. La surprise des Européens est d'autant plus grande que les entretiens à Bruxelles ont surtout porté sur la coopération entre les trois partenaires pour lutter contre les pratiques de dumping et les problèmes posés par les surcapacités dans la sidérurgie. Les Européens ont fait état de bons résultats sur cette partie de la rencontre et espèrent encore que leurs efforts seront pris en compte par Donald Trump. Les Européens et les Japonais n'attendaient pas de décision samedi, mais ils ont souhaité mettre la pression sur les Américains et ont mis en garde Washington contre les conséquences d'une telle décision. "L'Europe répondra de manière claire et proportionnée" à "toute pratique infondée et contraire aux règles du commerce mondial", a ainsi averti le président français Emmanuel Macron lors d'un entretien vendredi avec Donald Trump.
Contre-mesures européennes L'UE a préparé des contre-mesures si Donald Trump persiste dans son intention de sanctionner ses sidérurgistes. La plus immédiate, applicable en trois mois, consisterait à taxer lourdement, en guise de rétorsion, certains produits américains emblématiques - dont Bruxelles a établi une liste - comme les jeans, les motos de grosse cylindrée et le beurre de cacahuète. L'UE envisage également de mettre en oeuvre des mesures dites "de sauvegarde" pour protéger son industrie des importations étrangères d'acier et d'aluminium. Elle prévoit, enfin, de déposer, le cas échéant, une plainte devant l'Organisation mondiale du commerce (OMC), estimant que les mesures prises par les Etats-Unis, sous couvert de protéger la sécurité nationale, ne servent qu'à avantager leurs entreprises. L'Europe a exporté en 2017 vers les Etats-Unis pour 5,3 milliards d'euros d'acier et pour 1,1 milliard d'euros d'aluminium. L'affrontement entre Donald Trump et l'Union européenne fait le jeu de la Chine, de loin le premier producteur mondial d'acier, qui est régulièrement accusée d'être à l'origine de la surcapacité dans le secteur en raison de ses subventions massives, souligne-t-on à Bruxelles.
L'Europe unie L'unité de l'Europe est le "meilleur bouclier" face au "risque majeur" d'une guerre commerciale, a déclaré lundi Benoît Coeuré, membre du directoire de la Banque centrale européenne (BCE), au micro de BFM Business. "L'Europe reste le meilleur bouclier dans une économie mondiale qui est pleine de risques, qui est dangereuse", a-t-il dit, interrogé sur la politique commerciale américaine. "Le risque d'une guerre commerciale est le risque majeur", a-t-il reconnu, mais "c'est une occasion pour l'Europe de montrer son unité". "On n'affronte pas le peuple américain ni l'économie américaine" mais "il faut refuser le langage guerrier" pour préserver "un mode de fonctionnement de l'économie mondiale juste et équilibré", a-t-il estimé. Une guerre commerciale constituerait "potentiellement un choc négatif pour l'économie mondiale", a prévenu le responsable français, tout en soulignant que les travailleurs américains seront "les premiers à souffrir". "La croissance européenne est forte et bien distribuée", a souligné par ailleurs M. Coeuré, estimant nécessaire de "dépasser la distinction entre nord et sud", une fragmentation politique qui, selon lui, "n'a pas de sens". Il faut, a-t-il dit, "que la croissance de l'investissement et de la consommation prennent le relais de la politique monétaire" après que la BCE a annoncé jeudi amorcer un prudent retrait de son vaste soutien à l'économie en ralentissant son programme de rachats de dette. Interrogé sur un éventuel scénario de hausse des taux d'intérêts à mi-2019, M. Coeuré a fait savoir que "c'est ce que prévoient les marchés (...). En revanche, le conseil des gouverneurs n'a jamais discuté de cela".
Nouvelles discussions la semaine prochaine L'Union européenne n'a pas obtenu satisfaction sur sa demande d'être exemptée des droits de douane imposée par Washington sur les importations d'acier et d'aluminium, a annoncé samedi la commissaire au Commerce Cecilia Malmström, à l'issue d'une réunion avec un émissaire américain à Bruxelles. "Nous n'avons pas obtenu de clarté immédiate sur la procédure pour être exemptés et les discussions vont se poursuivre la semaine prochaine", a fait savoir Mme Malmström sur son compte Twitter. "Nous sommes un allié proche et un partenaire commercial des Etats-Unis et à ce titre l'Union européenne doit être exclue des mesures annoncées" par le président Donald Trump, a répété la commissaire. Des explications ont été réclamées samedi au représentant au Commerce américain Robert Lighthizer, allé à Bruxelles pour une réunion prévue de longue date avec Mme Malmström et le ministre japonais de l'Economie Hiroshige Seko. Le Japon, comme l'Union européenne, exige d'être exempté des droits de douane américains. "La discussion a été franche sur le sérieux problème posé" par les taxes américaines, a précisé Mme Malmström. Donald Trump a décidé d'imposer des droits de douane de 25% sur l'acier et de 10% sur l'aluminium. L'Europe a exporté en 2017 vers les Etats-Unis pour 5,3 milliards d'euros d'acier et pour 1,1 milliard d'euros d'aluminium.
Eviter une guerre commerciale "désastreuse" Pékin poursuivra ses discussions avec Washington afin d'éviter une guerre commerciale "désastreuse" pour le monde, a assuré dimanche le ministre chinois du Commerce Zhong Shan, tout en assurant que le géant asiatique "défendra fermement ses intérêts". "Je peux vous dire que nous poursuivrons nos discussions (sur le commerce), les canaux de communication n'ont pas été coupés (...) car personne ne veut d'une guerre commerciale", a déclaré M. Zhong, alors que les Etats-Unis ont confirmé l'imposition de lourdes taxes sur leurs importations d'acier et d'aluminium. "Non seulement nous discutons, mais les deux parties sont déterminées à poursuivre les discussions", a insisté le ministre, lors d'une conférence de presse. Pour autant, "dans ce type de négociations, une seule des parties ne peut mener la danse à elle toute seule", a averti le responsable, qui s'exprimait en marge de la session plénière annuelle du parlement chinois. Premier producteur mondial d'acier et d'aluminium, la Chine ne fournit qu'une partie (2,7% pour l'acier et 9,7% pour l'aluminium) des importations américaines dans ces secteurs, mais est critiquée pour sa colossale surproduction, largement subventionnée. Déjà visé aux Etats-Unis par de multiples enquêtes et mesures antidumping, Pékin redoute une escalade des tensions tous azimuts qui ferait dérailler la fragile économie du globe. "Une guerre commerciale n'aurait pas de vainqueur, elle ne pourrait être que catastrophique pour la Chine, les Etats-Unis et le reste du monde (...) La Chine ne veut pas de guerre commerciale, ni en lancer une", a déclaré le ministre. Prêt à discuter, le géant asiatique agite néanmoins la menace de représailles: "Nous sommes en mesure de résister à n'importe quel défi et de défendre fermement les intérêts du pays et du peuple", a martelé M. Zhong. Il n'a cependant pas précisé sur quels types de produits américains la Chine envisageait de prendre éventuellement des mesures de rétorsion. Le régime communiste a déjà ouvert une enquête antidumping sur le sorgho des Etats-Unis et n'exclut pas de cibler le soja. L'enjeu est de taille: la Chine a acheté l'an dernier pour 14 milliards de dollars de soja américain. La Fédération chinoise de l'acier et du fer a appelé vendredi Pékin à adopter de "fermes représailles" visant les exportations américaines d'acier inoxydable, de conduites sans soudure, mais surtout "de charbon, de produits agricoles et de biens électroniques" --ce qui pourrait pénaliser l'emploi de régions favorables à M. Trump.
Déficit 'structurel' Le président américain Donald Trump a formalisé jeudi sa décision d'imposer des taxes à l'importation de 25% sur l'acier et de 10% sur l'aluminium. Dans le même temps, il s'est montré relativement conciliant avec la Chine, évoquant à nouveau des négociations en cours pour réduire le déficit commercial de Washington envers Pékin. Sur l'ensemble de 2017, ce déficit a atteint le niveau record de 275,8 milliards de dollars selon les douanes chinoises... mais de 375,2 milliards selon Washington. Selon Zhong Shan, les statistiques américaines "surévaluent" l'ampleur réelle du déficit. Le déséquilibre des échanges transpacifiques est "structurel", a-t-il estimé, rappelant que les Etats-Unis exportaient davantage de services que de biens, et que les restrictions imposées par Washington sur l'exportation de technologies jugées sensibles à la Chine contribuaient à creuser l'écart. La Chine à l'inverse "ne cesse de s'ouvrir" aux firmes étrangères, a assuré le ministre. Washington et Bruxelles dénoncent au contraire le protectionnisme du géant asiatique et ses restrictions persistantes à l'encontre des entreprises étrangères. Par ailleurs, le régime va continuer de serrer la vis aux acquisitions chinoises jugées "irrationnelles" à l'étranger, a insisté Zhong Shan. Les investissements chinois à l'étranger ont déjà plongé de 30% l'an dernier, reflet du durcissement de Pékin sur les achats des groupes chinois à l'international dans le sport, le divertissement et l'immobilier. De quoi maintenir la pression sur les conglomérats privés très endettés, à l'image de Wanda ou de HNA, déjà dans le viseur des autorités de régulation. Kamel A.