Omar Belhouchet et Chawki Amari, respectivement directeur et chroniqueur du quotidien indépendant El Watan, ont été condamnés, mardi dernier, en appel à deux mois de prison ferme et à une amende d'un million de dinars par le tribunal de Jijel, pour diffamation et injures. A l'origine de leur condamnation, une plainte en diffamation déposée par le wali de Jijel, suite à la parution, en juin 2006, d'une chronique de Chawki Amari intitulée "Un bel été à Jilel", dans laquelle le journaliste évoquait des malversations dont se serait rendu coupable ce wali. L'avocat de MM. Belhouchet et Amari a jugé leur condamnation "injustifiable" et surtout "excessive". "Elle donne une piètre image de la conception des libertés. Prononcer des peines de prison à l'encontre des journalistes relève d'un autre temps", a déclaré Me Zoubeir Soudani, dans un communiqué mis en ligne par El Watan. De son côté, El Watan a exprimé sa "profonde inquiétude" concernant ce verdict. "Le journal se demande si ce verdict, sans commune mesure avec les faits reprochés, n'est pas motivé par une volonté de museler le journal" écrit le journal. Cependant, celui-ci, "interpelle l'opinion publique nationale et internationale sur la gravité du verdict prononcé par la cour de Jijel et sur ses conséquences sur l'exercice du métier d'informer en Algérie". Pour Omar Belhouchet, ce verdict est la conséquence de l'arsenal juridique réprimant le délit de presse instauré il y a quelques années. "Arsenal injuste et à refaire" estime-t-il, notamment, car la justice n'a pas à prononcer des peines de prison ferme contre des journalistes. "C'est ça le problème dans notre pays. On s'est battu en 2001 et en 2002 quand le gouvernement a proposé à ce que le délit de presse soit pénalisé et que les journalistes et les directeurs des journaux aillent en prison pour leurs écrits et cela a été introduit dans la loi ; les juges se cachent derrière ces nouvelles dispositions de loi pour proposer des peines de prison. La loi est très sévère chez nous, il faut la refaire, elle est injuste dans notre pays, s'agissant des délits de presse. Nous sommes l'un des rares pays au monde à avoir une loi sur les délits de presse aussi sévères. Il y a beaucoup de pays africains qui sont dans des situations de transition démocratique mais qui n'ont tout de même pas cet arsenal juridique extrêmement sévère contre les journalistes" expliquera-t-il. Par ailleurs, dans un communiqué transmis au journal, la Fédération internationale des journalistes se dit "inquiète au plus haut point de la lourde condamnation". Durant l'audience, le procureur avait requis un an de prison ferme contre Omar Belhouchet et Chawki Amari et une amende de deux millions de dinars. En première instance, les deux journalistes avaient été condamnés, le 24 décembre 2006, à trois mois de prison ferme chacun. Me Zoubeir Soudani a annoncé mercredi qu'il allait se tourner vers la Cour suprême pour contester le jugement. Les deux journalistes restent en liberté en attendant que cette dernière se prononce.