Le ministre des Affaires étrangères, Abdelkader Messahel a souligné, jeudi à Washington, que l'Algérie assumait son histoire trois fois millénaire marquée par une diversité culturelle. Dans son intervention à la Conférence ministérielle sur les libertés religieuses, M. Messahel a indiqué que "l'Algérie, terre d'Islam, a enfanté Saint Augustin et donné à la chrétienté l'un de ses plus illustres et plus brillants théologiens". Il a rappelé, à cet égard, que "l'Algérie, à l'initiative du président de la République, Abdelaziz Bouteflika, a honoré sa mémoire en organisant en 2001 à Annaba, près de sa ville natale Taghaste (aujourd'hui Souk Ahras), un imposant symposium international sur son œuvre et sa contribution à l'enrichissement de la pensée et de la foi chrétiennes". "L'Algérie, terre d'Islam, a aussi donné à l'humanité El Amir Abdelkader, qui avait, en son temps, sauvé la vie à des milliers de chrétiens lors de son exil à Damas, et avait été le premier à avoir posé les règles du droit international humanitaire, selon le témoignage du président actuel du CICR lui-même". A ses ennemis, durant la résistance qu'il dirigeait face à l'occupant colonialiste, il écrivait en 1845 aux généraux français au sujet de leurs soldats faits prisonniers "Envoyez un prêtre dans mon camp. Il ne manquera de rien. Je veillerai à ce qu'il soit honoré et respecté comme il convient (...). Il priera chaque jour avec les prisonniers, il les réconfortera, il correspondra avec leurs familles". L'histoire retiendra aussi qu'il a été communément reconnu comme un "acteur de la paix religieuse" parce qu'il répétait souvent que "Si les musulmans et les chrétiens avaient voulu me prêter leur attention, j'aurais fait cesser leurs querelles: ils seraient devenus, extérieurement et intérieurement, des frères". "l'Algérie, terre d'Islam, a, tout autant, une histoire dans laquelle la religion judaïque et ses adeptes, autochtones comme réfugiés fuyant notamment l'inquisition, y avaient trouvé leur place et s'y étaient épanouis, comme en témoigne la tombe et le mausolée de l'un des rabbins les plus renommés au monde se trouvant à Tlemcen, en Algérie, et qui sont régulièrement visités par des ressortissants étrangers de confession juive". (M. Messahel) Le ministre des Affaires étrangères a également rappelé que l'Algérie a toujours tenu à prendre en charge les préoccupations liées à la construction d'un Etat moderne et d'une nation tolérante fondés sur les valeurs identitaires du peuple algérien, dont celles portées par la religion musulmane elle-même, laquelle enseigne qu'il n'y a "nulle contrainte en religion", ainsi que sur les valeurs universelles qui unissent aujourd'hui la communauté internationale et l'humanité tout entière. Cette préoccupation, a-t-il ajouté, a été affirmée précocement et avec beaucoup de conviction et de vision par l'Appel lançant la Révolution du 1er Novembre 1954, dans lequel il avait été établi comme objectif de la lutte de libération nationale, la création d'un Etat démocratique et social fondé, notamment, sur "le respect de toutes les libertés fondamentales sans distinction de races ou de confessions".
Garanties offertes par la Constitution et les lois algériennes M. Messahel a mis en exergue, les garanties constitutionnelles des libertés de conscience, d'opinion et d'exercice du culte en Algérie. Dans le cadre de sa participation à la Conférence ministérielle sur les libertés religieuses, sur invitation du Secrétaire d'Etat américain Mike Pompeo, M. Messahel a notamment rappelé les dispositions de l'article 42 de la Constitution algérienne qui stipule que "La liberté de conscience et la liberté d'opinion sont inviolables. La liberté d'exercice du culte est garantie dans le respect de la loi". Il a tenu à souligner que la réunion de Washington "intervient dans un contexte international marqué par la montée des intolérances de toutes natures, par la xénophobie, l'islamophobie et un amalgame dévastateur entre la religion musulmane et le fléau du terrorisme". M. Messahel a, par ailleurs, souligné "l'attachement du législateur comme des institutions algériennes chargées de l'application de la loi à veiller à la réunion de toutes les conditions requises pour favoriser les libertés consacrées par la Constitution et les lois de la République". Il a indiqué "qu'en Algérie, l'exercice du culte, musulman ou autre, se fait dans le cadre de la loi qui est opposable à l'ensemble des citoyens et concerne l'ensemble des religions". Il a précisé que "les lois algériennes sont conformes dans leur énoncé aux engagements internationaux pris par l'Algérie et à leurs dispositions relatives à l'exercice de la liberté de religion, en accordant un traitement légal à la religion musulmane et aux autres religions". "Le ministère en charge du culte ne s'appelle d'ailleurs pas ministère des affaires islamiques, mais le ministère des Affaires religieuses et des Waqfs", a-t-il ajouté. "C'est dans cette logique et à cette fin que s'inscrivent les politiques, stratégies, programmes d'action et initiatives mis en œuvre par l'Etat algérien. La tolérance, la modération, le dialogue, la négociation, l'inclusion, l'égalité des chances et des opportunités, la justice sociale, la concorde civile, la réconciliation nationale et le vivre-ensemble en paix sont, à cet égard, les vecteurs porteurs de cette démarche que l'Algérie s'est choisie pour asseoir durablement la paix, la sécurité, la fraternité et l'égalité entre tous ses citoyens", a conclu M. Messahel.
Un espace de confrontation entre les peuples D'autre part, le ministre a souligné que "la religion ne doit pas devenir une ligne de rupture et un espace de confrontation entre les individus et entre les peuples, comme le veulent les idéologues de l'extrémisme et du sectarisme religieux". Dans son intervention à la Conférence ministérielle sur les libertés religieuses, le ministre des Affaires étrangères a ajouté que "la différence ne véhicule pas nécessairement une menace, comme la diversité recèle toujours un grand potentiel d'enrichissement mutuel". "La pratique de la foi est une forme importante d'expression de la liberté individuelle et doit le rester et être protégée contre les logiques et les attitudes d'intolérance et d'exclusion". (M. Messahel) Il a, dans le même temps, souligné que "cette finalité requiert la promotion d'un environnement institutionnel favorable, reposant sur le solide socle de la primauté du droit et de l'égalité des droits sans discrimination ou distinction aucune". M. Messahel a également souligné que "ce défi partagé qui interpelle toutes les Nations appelle à plus de mesures de nature à consolider davantage l'universalité des règles auxquelles les pays ont volontairement adhéré dans le cadre du Pacte international relatif aux droits civils et politiques". Enfin, le Chef de la diplomatie algérienne a souligné que "l'exercice de la liberté de culte ne doit en aucun cas servir de prétexte pour porter atteinte à l'ordre, la sécurité et la santé publics, ou à la morale et les libertés et les droits fondamentaux d'autrui". L'exercice de la liberté de culte "ne doit pas, non plus, servir de vecteur et de motif d'interférence étrangère dans les affaires intérieures des Etats, et que bien au contraire, dans ce monde instable, les religions doivent rester des sources de fraternité et de paix, et non pas de haine et de conflits", a ajouté M. Messahel. "C'est la conviction de l'Algérie et c'est la finalité de son action à l'intérieur de ses frontières et sur le plan international", a conclu le ministre des Affaires étrangères.
Un plan d'action mondial Le secrétaire d'Etat américain, Mike Pompeo, a déclaré jeudi que les Etats-Unis s'engageaient à promouvoir la liberté religieuse, annonçant dans la foulée un plan d'action prévoyant "des moyens concrets" pour protéger la liberté de culte et les minorités religieuses vulnérables. "Plus tard dans la journée, nous publierons la Déclaration de Potomac et le Plan d'action de Potomac. Ces documents réaffirment l'engagement inébranlable des Etats-Unis à promouvoir et à défendre la liberté de religion", a déclaré Mike Pompeo à la session plénière de la réunion ministérielle sur la liberté religieuse qui se tient à Washington et à laquelle prend part le chef de la diplomatie algérienne, Abdelkader Messahel. Pompeo a ajouté que la déclaration et le plan d'action "recommandent des moyens concrets par lesquels communauté internationale et gouvernements peuvent faire plus pour protéger la liberté religieuse et les communautés religieuses vulnérables". Le secrétaire d'Etat américain a annoncé lors de son intervention une aide supplémentaire de 17 millions de dollars pour financer le déminage de la province de Ninive en Irak, où vit une minorité chrétienne irakienne qui a été chassée de ses terres par l'organisation de l'Etat Islamique. Le montant s'ajoute aux 90 millions de dollars décaissés cette année pour financer les opérations de déminage dans l'ensemble de l'Irak. De son côté, le vice-président américain, Mike Pence qui a donné le coup d'envoi de la session plénière, a annoncé deux initiatives portant sur l'établissement d'un programme de soutien aux victimes de génocides et de persécutions et la création d'un fonds international pour la liberté religieuse. Mike Pence a précisé que le programme de soutien aux victimes de persécutions sera axé comme première étape sur l'Irak et sera financé conjointement par le gouvernement américain et le réseau des philanthropes aux Etats-Unis. La session plénière qui se poursuit jeudi à Washington a été précédée de deux journées d'échange et de discussions sur les questions de liberté religieuse. La parole a été donnée aux victimes ayant vécu des situations de persécution pour livrer leurs témoignages. Le département d'Etat a déclaré jeudi qu'il allait rééditer cet événement l'année prochaine.
Entretien fructueux Le ministre des Affaires étrangères, s'est entretenu, jeudi en marge de la Conférence ministérielle sur les libertés religieuses qui se tient à Washington, avec Mme Tina Kaidanov, Assistante du Secrétaire d'Etat américain, en charge des Affaires politiques et militaires, indique un communiqué du ministère des Affaires étrangères. L'entretien a permis aux deux parties de discuter des relations bilatérales, notamment "dans le domaine sécuritaire et des voies et moyens de leur renforcement", ajoute le communiqué. La situation dans la région du Sahel, notamment en Libye, a également été évoquée. A ce sujet, les deux responsables ont souligné leur "attachement à la stabilité de la Libye et à la nécessité d'une solution politique, seule à même de permettre à l'ensemble de la région de faire face aux défis et menaces qui y sévissent, en particulier le terrorisme, le crime organisé et l'immigration clandestine", souligne la même source. Les deux parties ont également procédé à un échange de vues sur les principales thématiques inscrites à l'ordre du jour de la Conférence sur les libertés religieuses. D'un autre côté, le ministre s'est entretenu, avec le président de la Commission des Affaires étrangères de la chambre des Représentants des Etats-Unis, M. Ed Royce, en marge de la conférence ministérielle sur les libertés religieuses, indique un communiqué du ministère des Affaires étrangères. MM. Messahel et Royce "se sont félicités de la qualité des relations qu'entretiennent l'Algérie et les Etats-Unis d'Amérique en réaffirmant la volonté des deux pays de travailler ensemble pour leur raffermissement et leur diversification, notamment dans les domaines économique et commercial, de la formation et de la coopération parlementaire", souligne la même source. Les deux responsables qui ont également procédé à "un échange de vue sur les situations de crise et de conflit, notamment dans la région du Sahel", ont abordé aussi les thématiques liées à "la lutte contre le terrorisme et aux politiques de déradicalisation", relève le communiqué. Sur cette question, M. Messahel a exposé l'expérience algérienne en la matière, souligne le MAE.