L'option d'organiser des élections législatives anticipées pour débloquer l'impasse politique au Venezuela est en cours d'examen au sein de l'Assemblée nationale constituante (ANC ''parlement citoyen''), à la demande du président Nicolas Maduro, reconnu notamment par l'ONU, qui a réitéré son offre de "bons offices" pour désamorcer la crise dans le pays. La situation politique est tendue au Venezuela depuis que Juan Guaido, président de l'Assemblée nationale, s'est autoproclamé "président par intérim" le 23 janvier et soutenu par quelques pays étrangers, dont les Etats-Unis. Les troubles ont fait une quarantaine de morts et plus de 850 personnes ont été arrêtées. Mais l'ONU et plusieurs pays dont la Russie reconnaissent le président Maduro, qui ne cesse de dénoncer l'"impérialisme" et "le plan macabre" des Etats-Unis. S'adressant à des milliers de partisans rassemblés sur l'avenue Bolivar de Caracas à l'occasion de la célébration des 20 ans de l'assermentation d'Hugo Chavez en tant que président de la République, M. Maduro, 56 ans, a déclaré samedi que l'Assemblée nationale constituante, sous contrôle de l'Etat, déciderait si des élections anticipées devaient ou non être organisées, cette année, pour l'Assemblée nationale (parlement monocaméral) dominée par l'opposition. Il a ajouté qu'une telle décision visait à "légitimer le pouvoir législatif du pays" et que "nous devrions tenir des élections libres, avec la garantie que le peuple choisisse une nouvelle Assemblée nationale". Le successeur de Hugo Chavez (décédé en 2013) a ainsi demandé au président de l'ANC, Diosdado Cabello, de mener "une consultation nationale par le biais de conseils bolivariens ouverts" afin de demander aux citoyens s'ils étaient d'accord avec cette solution politique à ce qu'il considérait comme "une crise du pouvoir législatif". Il a ajouté que cette solution pouvait être mise en œuvre en concertation avec l'opposition par le biais des tables de dialogue. Le mandat actuel des députés, élus fin 2015, court de janvier 2016 à janvier 2021. Et les prochaines législatives devraient normalement avoir lieu fin 2020. Pour rappel, six pays européens (Espagne, France, Allemagne, Royaume-Uni, Pays-Bas et Portugal), ont donné jusqu'à dimanche dernier à Nicolas Maduro pour convoquer une nouvelle présidentielle, faute de quoi ils reconnaîtront son adversaire, Juan Guaido, comme l'a déjà fait Washington. Dans ce contexte, le président Maduro a rappelé samedi que "l'élection présidentielle a eu lieu il y a moins d'un an (10 mois)", rejetant "tout ultimatum émanent de l'étranger". "Nous n'acceptons pas le chantage. L'élection présidentielle a eu lieu au Venezuela et si les impérialistes veulent une nouvelle élection, qu'ils attendent 2025", a martelé le président vénézuélien.
Guaido campe sur sa position et appelle à de nouvelles manifestations Parallèlement au rassemblement de soutien à Maduro, des dizaines de milliers de manifestants sont descendus samedi dans les rues de Caracas, pour exiger le "départ" de l'actuel président du Venezuela. Depuis une estrade devant la représentation de l'Union européenne à Caracas, le chef de l'opposition Guaido, 35 ans, a annoncé l'arrivée dans les prochains jours d'une aide humanitaire destinée au pays à la frontière colombienne, au Brésil et sur une "île des Caraïbes", en demandant à l'armée de la laisser entrer. Il a aussi appelé ses partisans à ne pas relâcher la pression, lors d'une nouvelle manifestation le 12 février, Jour de la jeunesse au Venezuela. Une autre mobilisation, liée à la distribution de l'aide humanitaire, est prévue dans les prochains jours, a-t-il lancé, sans plus de précision. Le président Maduro a de son côté rétorqué: "Nous n'avons pas été et ne serons pas un pays de mendiants", avant d'ajouter "il y a en certains qui se sentent mendiants de l'impérialisme et vendent leur patrie pour 20 millions de dollars", en référence au montant de l'aide humanitaire promise par les Etats-Unis à Juan Guaido, mais qui ne peut pas être acheminée sans l'accord des autorités et de l'armée. Dans ce contexte, le secrétaire général de l'ONU, le Portugais Ant?nio Guterres, a envoyé une lettre à Juan Guaid?, dans laquelle il explique qu'il considère le gouvernement de Nicolas Maduro comme "le seul autorisé à demander une assistance humanitaire". Guterres a déclaré qu'il jugeait vital de mener à bien toutes les activités nécessaires pour alléger les souffrances de la population, mais a averti que "pour cela, les Nations unies ont besoin du consentement et de la coopération du gouvernement". "J'aimerais souligner à cet égard qu'il n'appartient pas au Secrétariat mais aux Etats Membres de reconnaître les gouvernements des autres pays. Dans ses relations avec les Etats Membres, le Secrétariat doit donc respecter les décisions des organes intergouvernementaux, en particulier de l'Assemblée générale et du Conseil de sécurité ", indique la lettre. Se disant "préoccupé" par la situation vénézuélienne, M. Guterres a rappelé à M. Guaido que plusieurs agences des Nations unies travaillaient déjà au Venezuela et souligné que l'ONU était prête à "renforcer sa coopération à tout moment". M. Guterres a, en outre, réaffirmé sa volonté d'intervenir, à la demande des parties, en mettant ses "bons offices au service de la recherche d'une solution à la crise politique".