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Quel avenir pour l'économie algérienne ?
Publié dans Le Midi Libre le 04 - 11 - 2013

L'Algérie jouit d'une aisance financière confortable dans ses relations avec le reste du monde, puisque son stock de réserves de devises déposées à l'étranger couvre 40 mois d'importations. Mais son économie demeure, plus que jamais, dépendante et volatile.
L'Algérie jouit d'une aisance financière confortable dans ses relations avec le reste du monde, puisque son stock de réserves de devises déposées à l'étranger couvre 40 mois d'importations. Mais son économie demeure, plus que jamais, dépendante et volatile.
Dans ses échanges avec le reste du monde, l'Algérie s'appuie sur les exportations d'hydrocarbures à près de 100% pour financer sa balance des paiements, alors que la fiscalité pétrolière et les autres revenus tirés de ces mêmes exportations représentent près de 75% des recettes budgétaires totales. Ceci, face à une baisse tendancielle confirmée des réserves de pétrole et de gaz et de leur production, en même temps qu'une augmentation sensible de la consommation nationale d'énergie et une augmentation importante des importations de biens et services.
En plus de la dépendance des hydrocarbures, il y a la dépendance alimentaire, puisque 75% des calories consommées par les Algériens sont importées. C'est une économie volatile. L'évolution des paramètres d'exploitation des hydrocarbures est très inquiétante. Durant la décennie 2000-2010, les réserves de pétrole restantes ont baissé de -7,4%. Celles du gaz de -35,7%. La production est en baisse tendancielle depuis 2006. Alors que la consommation interne a augmenté sur la même décennie de 77% pour le pétrole et 36,5% pour le gaz.
Il faut noter le décalage important entre les déclarations officielles et les résultats enregistrés. En janvier 2006, le ministre de l'Energie annonçait la production de 100 millions de tonnes de pétrole et l'exportation de 85 milliards de mètres cubes de gaz en 2010. Les chiffres enregistrés sont de 65,3 millions de tonnes de pétrole produites et de 57,3 milliards de mètres cubes de gaz exportés.
Les importations de marchandises sont passées de 9,48 milliards de dollars en 2001 à 45,10 milliards de dollars en 2011, alors que celles des services (transports à l'étranger, assistance technique, grands travaux, salariés étrangers...) sont passées de 2,44 milliards de dollars en 2001 à 12,30 milliards de dollars en 2011, soit une augmentation de 500%. La volatilité est confirmée par l'entrée dans l'amenuisement de la rente.
La production totale d'hydrocarbures est tombée de 85,60 millions de tonnes en 2006 à 71,30 millions de tonnes en 2011, soit une baisse de -16,7%. Les exportations sont passées de 73,80 millions de tonnes à 57,90 millions de tonnes, soit une baisse de -25,6% sur la même période. Cette baisse de volume ne s'est pas répercutée sur la valeur des recettes d'exportations grâce à l'augmentation des prix qui a atteint 70%, passant de 65,85 dollars par baril en 2006 à 112 dollars en 2011. Mais si les prix ont augmenté de 70%, les valeurs d'exportation n'ont augmenté que de 33,7%, confirmant ainsi la baisse de la production et l'augmentation de la demande nationale d'énergie.
Qu'en sera-t-il en 2016 ? Si nous faisons l'hypothèse de la même tendance enregistrée durant les cinq années, de 2006 à 2011, le volume de production totale d'hydrocarbures se situerait, en 2016, à 59 millions de tonnes et celui des exportations à 43 millions de tonnes. C'est une hypothèse qui devrait être considérée comme optimiste puisqu'elle suppose qu'il n'y aura pas de dégradation dans la gestion des affaires publiques. Pour maintenir les équilibres budgétaires, il faudrait un prix de baril à 190 dollars en 2016 !
Doit-on continuer à hypothéquer l'avenir de la nation algérienne en pariant sur l'augmentation des prix à l'exportation ? Ceci dans un contexte caractérisé par des augmentations importantes des dépenses budgétaires. Le budget de fonctionnement était en augmentation de 50% en 2011 par rapport à celui de 2010. De même, la baisse sensible des exportations en volume des hydrocarbures. Tout ceci, dans le contexte d'une baisse des réserves d'hydrocarbures restantes.
Bien entendu, on peut avancer l'argument de l'exploitation de pétrole et de gaz non conventionnels, gaz de schiste, notamment. Qu'en est-il ? Cette exploitation n'aura de sens que si elle s'inscrit dans une stratégie de transition énergétique bâtie sur un système équilibré et durable que procurent les sources d'énergie renouvelables : solaire, conversion d'hydrogène, etc. Il serait hasardeux pour l'avenir de la nation, de remplacer l'utilisation des ressources non renouvelables par d'autres ressources non renouvelables, sans l'inscrire dans une nouvelle stratégie globale de développement !
Le défi est énorme.
D'abord, trouver de nouvelles sources énergétiques pour satisfaire la demande nationale ainsi que de nouveaux moyens de financer les importations et le budget de l'Etat. Ensuite, réussir la transition énergétique par la décentralisation de l'énergie comme source de bien-être de proximité, créant ainsi une société stable, indépendante, équilibrée et une occupation optimale du territoire. Aussi, l'exploitation de ces nouvelles sources d'énergie comme moteur de développement technologique de pointe, maîtrisé par les compétences nationales.
Pour définir une politique d'exploitation d'hydrocarbures non conventionnels, il faudrait disposer d'informations fiables sur les ressources en place qui dépendent de la géologie ; sur les ressources techniquement recouvrables qui dépendent de la technologie ; sur les ressources économiquement recouvrables qui dépendent du calcul économique. Sans négliger les contraintes environnementales.
Si nous n'avons pas d'inquiétude sur les ressources en place, leur exploitation technique et économique est loin d'être rassurante.
Il faut noter le déclin rapide de la production de ce type de forages en vertical et en horizontal. La production de la deuxième année d'exploitation ne représente plus que 30% de celle de la première année ; celle de la troisième année 20%. Autrement dit, à partir de la troisième année, ces forages ne produisent que moins du cinquième de la production de la première année. Le coût d'achat de ce type de forage est au moins cinq fois plus élevé que celui des forages verticaux actuels.
Reste la contrainte technologique la plus importante : la disponibilité à la vente de ce type de forages. Une fois leur utilisation généralisée à travers le monde, il faudra en produire une quantité importante. L'industrie ne pourra pas faire face, d'où le renchérissement prévisible des prix de vente et les longues listes d'attente sur la livraison.
Sur le plan économique, lorsque l'Algérie sera capable de dépasser la contrainte technologique, les hydrocarbures seront exploités dans une grande partie des pays à technologie plus avancée que nous, en Europe, en Amérique et en Asie. Les produits pétroliers seront disponibles partout dans le monde. Avec une offre importante, les prix de vente seront bas, alors que les coûts de production seront élevés.
Nous sortirons alors de la situation de la rente pour entrer dans celle de l'autosuffisance dans le meilleur des cas. Où trouver les ressources pour financer les importations alimentaires et le budget de l'Etat, qui ne peuvent qu'aller en augmentation sans une refondation fondamentale de notre économie ? La rente ne sera plus là ! Nous sommes bien installés dans l'étape d'amenuisement de la rente ! C'est l'hypothèque sur l'avenir de la nation.
Dans ses échanges avec le reste du monde, l'Algérie s'appuie sur les exportations d'hydrocarbures à près de 100% pour financer sa balance des paiements, alors que la fiscalité pétrolière et les autres revenus tirés de ces mêmes exportations représentent près de 75% des recettes budgétaires totales. Ceci, face à une baisse tendancielle confirmée des réserves de pétrole et de gaz et de leur production, en même temps qu'une augmentation sensible de la consommation nationale d'énergie et une augmentation importante des importations de biens et services.
En plus de la dépendance des hydrocarbures, il y a la dépendance alimentaire, puisque 75% des calories consommées par les Algériens sont importées. C'est une économie volatile. L'évolution des paramètres d'exploitation des hydrocarbures est très inquiétante. Durant la décennie 2000-2010, les réserves de pétrole restantes ont baissé de -7,4%. Celles du gaz de -35,7%. La production est en baisse tendancielle depuis 2006. Alors que la consommation interne a augmenté sur la même décennie de 77% pour le pétrole et 36,5% pour le gaz.
Il faut noter le décalage important entre les déclarations officielles et les résultats enregistrés. En janvier 2006, le ministre de l'Energie annonçait la production de 100 millions de tonnes de pétrole et l'exportation de 85 milliards de mètres cubes de gaz en 2010. Les chiffres enregistrés sont de 65,3 millions de tonnes de pétrole produites et de 57,3 milliards de mètres cubes de gaz exportés.
Les importations de marchandises sont passées de 9,48 milliards de dollars en 2001 à 45,10 milliards de dollars en 2011, alors que celles des services (transports à l'étranger, assistance technique, grands travaux, salariés étrangers...) sont passées de 2,44 milliards de dollars en 2001 à 12,30 milliards de dollars en 2011, soit une augmentation de 500%. La volatilité est confirmée par l'entrée dans l'amenuisement de la rente.
La production totale d'hydrocarbures est tombée de 85,60 millions de tonnes en 2006 à 71,30 millions de tonnes en 2011, soit une baisse de -16,7%. Les exportations sont passées de 73,80 millions de tonnes à 57,90 millions de tonnes, soit une baisse de -25,6% sur la même période. Cette baisse de volume ne s'est pas répercutée sur la valeur des recettes d'exportations grâce à l'augmentation des prix qui a atteint 70%, passant de 65,85 dollars par baril en 2006 à 112 dollars en 2011. Mais si les prix ont augmenté de 70%, les valeurs d'exportation n'ont augmenté que de 33,7%, confirmant ainsi la baisse de la production et l'augmentation de la demande nationale d'énergie.
Qu'en sera-t-il en 2016 ? Si nous faisons l'hypothèse de la même tendance enregistrée durant les cinq années, de 2006 à 2011, le volume de production totale d'hydrocarbures se situerait, en 2016, à 59 millions de tonnes et celui des exportations à 43 millions de tonnes. C'est une hypothèse qui devrait être considérée comme optimiste puisqu'elle suppose qu'il n'y aura pas de dégradation dans la gestion des affaires publiques. Pour maintenir les équilibres budgétaires, il faudrait un prix de baril à 190 dollars en 2016 !
Doit-on continuer à hypothéquer l'avenir de la nation algérienne en pariant sur l'augmentation des prix à l'exportation ? Ceci dans un contexte caractérisé par des augmentations importantes des dépenses budgétaires. Le budget de fonctionnement était en augmentation de 50% en 2011 par rapport à celui de 2010. De même, la baisse sensible des exportations en volume des hydrocarbures. Tout ceci, dans le contexte d'une baisse des réserves d'hydrocarbures restantes.
Bien entendu, on peut avancer l'argument de l'exploitation de pétrole et de gaz non conventionnels, gaz de schiste, notamment. Qu'en est-il ? Cette exploitation n'aura de sens que si elle s'inscrit dans une stratégie de transition énergétique bâtie sur un système équilibré et durable que procurent les sources d'énergie renouvelables : solaire, conversion d'hydrogène, etc. Il serait hasardeux pour l'avenir de la nation, de remplacer l'utilisation des ressources non renouvelables par d'autres ressources non renouvelables, sans l'inscrire dans une nouvelle stratégie globale de développement !
Le défi est énorme.
D'abord, trouver de nouvelles sources énergétiques pour satisfaire la demande nationale ainsi que de nouveaux moyens de financer les importations et le budget de l'Etat. Ensuite, réussir la transition énergétique par la décentralisation de l'énergie comme source de bien-être de proximité, créant ainsi une société stable, indépendante, équilibrée et une occupation optimale du territoire. Aussi, l'exploitation de ces nouvelles sources d'énergie comme moteur de développement technologique de pointe, maîtrisé par les compétences nationales.
Pour définir une politique d'exploitation d'hydrocarbures non conventionnels, il faudrait disposer d'informations fiables sur les ressources en place qui dépendent de la géologie ; sur les ressources techniquement recouvrables qui dépendent de la technologie ; sur les ressources économiquement recouvrables qui dépendent du calcul économique. Sans négliger les contraintes environnementales.
Si nous n'avons pas d'inquiétude sur les ressources en place, leur exploitation technique et économique est loin d'être rassurante.
Il faut noter le déclin rapide de la production de ce type de forages en vertical et en horizontal. La production de la deuxième année d'exploitation ne représente plus que 30% de celle de la première année ; celle de la troisième année 20%. Autrement dit, à partir de la troisième année, ces forages ne produisent que moins du cinquième de la production de la première année. Le coût d'achat de ce type de forage est au moins cinq fois plus élevé que celui des forages verticaux actuels.
Reste la contrainte technologique la plus importante : la disponibilité à la vente de ce type de forages. Une fois leur utilisation généralisée à travers le monde, il faudra en produire une quantité importante. L'industrie ne pourra pas faire face, d'où le renchérissement prévisible des prix de vente et les longues listes d'attente sur la livraison.
Sur le plan économique, lorsque l'Algérie sera capable de dépasser la contrainte technologique, les hydrocarbures seront exploités dans une grande partie des pays à technologie plus avancée que nous, en Europe, en Amérique et en Asie. Les produits pétroliers seront disponibles partout dans le monde. Avec une offre importante, les prix de vente seront bas, alors que les coûts de production seront élevés.
Nous sortirons alors de la situation de la rente pour entrer dans celle de l'autosuffisance dans le meilleur des cas. Où trouver les ressources pour financer les importations alimentaires et le budget de l'Etat, qui ne peuvent qu'aller en augmentation sans une refondation fondamentale de notre économie ? La rente ne sera plus là ! Nous sommes bien installés dans l'étape d'amenuisement de la rente ! C'est l'hypothèque sur l'avenir de la nation.


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