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Monsieur le Président, refusez que le sang des algériens soit de nouveau versé !
Publié dans Le Quotidien d'Algérie le 13 - 02 - 2010


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« » Qu'a-t-il à craindre de la colère des Hommes, celui qui ne craint que la colère de Dieu ? « » (auteur anonyme)
En conclusion de la lettre ouverte que je vous adressais en date du 14 Septembre 2007 (1) et dans laquelle je vous conjurais de réagir à l'état de déliquescence qui rongeait déjà si profondément notre pays, Institutions et Société, je vous écrivais en particulier :
« »Mon souhait immédiat est que vous fassiez tout ce qui est en votre pouvoir, pour éviter à ce pays meurtri, de s'empêtrer davantage sous les fourches caudines d'une oligarchie aux aguets de toutes les opportunités. Une oligarchie sans âme et sans état d'âme, qui n'a plus aujourd'hui pour Dieu qu'elle-même, l'argent et le pouvoir pour le pouvoir. Quant à mon vœu ultime, c'est celui d'être entendu, ce qui m'exonérera d'avoir à exciper de cette lettre, lorsque nous comparaîtrons tous deux demain, devant Le Juge Suprême. » »
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Aujourd'hui en ce mois de Février 2010, la terrible régression de notre pays au plan sociopolitique comme aux plans moral et civique, n'est plus un secret pour personne, à l'intérieur comme à l'extérieur. A commencer par les officines et autres Chancelleries accréditées à Alger, dont certaines sont devenues – en l'absence d'un Etat en décomposition avancée – de véritables bourses au renseignement, à la débauche et à l'affairisme mafieux de toutes sortes, où l'on connaît par le menu, les échos sur les derniers scandales, sur les derniers gros contrats, ou sur les derniers bijoux de telle rombière sulfureuse. L'Etat algérien, ses Institutions, ses dirigeants, y sont, dédaignés, brocardés, méprisés.
Comment s'étonner dans ces conditions, de ces nombreux cas de traitements racistes et vexatoires des autorités de tel ou tel pays, à l'égard de nos concitoyens émigrés ou en déplacement à l'étranger sans que cela n'entraine la moindre réaction officielle algérienne ? Comme si ce pouvoir à l'agonie, conscient de sa propre illégitimité, de sa propre corruption, de son propre discrédit moral, n'avait plus d'autre choix que de pratiquer la politique de l'autruche Avec cette différence il est vrai, que le geste de cet animal cherchant à cacher sa tête, procède probablement chez lui, d'une sorte de sens atavique de la pudeur, que beaucoup de nos dirigeants pourraient lui envier.
Comment donc s'étonner aujourd'hui, de tous ces témoignages en cascade dont se font l'écho depuis quelques jours, les médias nationaux et internationaux – tous supports confondus – à propos d'enquêtes sur ces pillages sans nom et ces détournements hors normes se chiffrant par milliards de dollars, qui saignent l'économie nationale depuis des années ? En mettant en cause qui plus est, les plus hauts responsables de l'Etat, y compris des membres de votre entourage immédiat M. le Président, ainsi que dans les rangs de votre gouvernement. Sans parler de contre-enquêtes faisant état de la réouverture de certains dossiers liés à des crimes de sang qu'on s'obstine depuis tant d'années à feindre d'ignorer – comme l'assassinat du Président Boudiaf – et de tant d'autres victimes civiles, connues ou moins connues, tombées durant les évènements de la décennie noire. Sans oublier les crimes de masse perpétrés à Raïs, Bentalha ou Relizane, entre autres, et dont les milliers de victimes attendent justice dans leurs fosses communes.
C'est cette subite aggravation de la crise nationale qui m'amène aujourd'hui, M. le Président, à réitérer ma démarche d'hier – Septembre 2007 – celle d'un simple citoyen ordinaire qui vous conjure une fois de plus, d'user de votre position de Chef de l'Exécutif. Non pas au service de votre ego, ni au service d'une oligarchie civile et militaire discréditée, mais au service des intérêts supérieurs de la Nation, ainsi que le requiert la morale d'abord, et subsidiairement une Constitution pour le respect de laquelle vous avez prêté serment par trois fois déjà, lors de vos investitures successives.
Car, les graves dissensions qui s'étalent aujourd'hui au sommet de l'Etat, ne sont après tout qu'un nouvel épisode de ces « guerres de clans » qui ont malheureusement émaillé l'histoire récente de notre pays. Des guerres de clans qui ont souvent entraîné dans leur sillage tragique – selon leur intensité – des dizaines ou des milliers de morts, en majorité des innocents, quand ce ne sont pas des centaines de milliers de morts comme durant la décennie noire qui a suivi le Coup d'Etat de Janvier 1992 perpétré par des généraux putschistes félons, qui ont délibérément violé la Constitution et foulé à leurs pieds – j'allais dire à leurs bottes – la volonté souveraine d'un Peuple.
Une chose est sûre, M. le Président, hormis les solidarités clientélistes calculées qui gravitent autour de votre personne ou les solidarités corporatistes en usage chez ceux qu'on appelle « les décideurs de l'ombre » – en parlant de l'oligarchie de l'armée – il ne se trouvera pas grand monde au sein du bon peuple algérien, pour entrer dans le jeu des uns ou des autres. Parce que ce bon peuple algérien vous a depuis longtemps définitivement rejetés et condamnés, les uns comme les autres, pour des forfaitures aussi accablantes les unes que les autres, dont ce n'est pas le lieu ici, d'en dresser la longue et terrible énumération, qui va des pillages organisés du patrimoine de la Nation, jusqu'aux aux crimes de masse imprescriptibles et des plus abjects, contre des populations civiles.
Or – est-ce utile de le rappeler ? – ces « guerres de clans » récurrentes ne sont elles-mêmes que la conséquence logique de l'arbitraire, de l'incompétence, de la corruption et du caractère mafieux et criminel d'un régime politique frappé par la malédiction de son illégitimité originelle. Un régime mafieux et criminel qui refuse obstinément depuis tant d'années de se réformer dans la transparence et l'honnêteté, en engageant loyalement le pays et la société dans la voie d'une démocratisation authentique des Institutions et partant, en restituant au peuple, le plein exercice de sa souveraineté dont il a été spolié. Une souveraineté populaire confisquée dès l'Indépendance, tantôt par l'usage de la force brutale, de la répression ou du fait accompli, tantôt au moyen de la manipulation des faits et des discours trompeurs. Tantôt enfin, en abusant l'opinion publique intérieure ou extérieure par l'envoi de signaux mensongers de prétendue démocratisation, en dotant le pays de prétendues Constitutions aussitôt violées et en organisant des élections régulièrement falsifiées. Des élections préfabriquées, mettant tout aussi régulièrement en selle, une clientèle politique faite de bric et de broc, ne représentant qu'elle-même, en grande partie composée d'un ramassis d'opportunistes voire de vrais délinquants, dont certains ont même durablement occupé les plus hauts postes de souveraineté, donnant ainsi raison à cet anonyme algérien qui, déjà dans les années 80, parlait de « pays de Mikey ».
Monsieur le Président,
Dans quel autre pays que le nôtre en effet, des crimes de masse imprescriptibles, perpétrés contre des populations innocentes, peuvent-ils rester impunis, à l'ombre d'un Etat d'Urgence qui perdure et sous le couvert d'une loi scélérate d'autoamnistie, en violation totale de la Morale, de la Justice et du Droit international ?
Dans quel autre pays que le nôtre, a-t-on vu des barons de la hiérarchie militaire s'octroyer des droits régaliens sur le patrimoine national voire, aller se servir directement à la Banque d'Algérie, comme par exemple, lors des multiples déplacements à l'étranger de certains d'entre eux ? Comme si l'argent public était leur propriété. Pourquoi le Gouverneur de la Banque d'Algérie garde-t-il le silence sur de tels abus, alors qu'il est le gardien des fonds publics et de la monnaie ?
Dans quel autre pays que le nôtre, des pourparlers secrets en dehors de la consultation du peuple algérien – comme s'il n'existait pas – continuent d'avoir lieu, autour de la présence ou non de forces étrangères sur notre sol, sous le fallacieux prétexte de « lutte internationale contre le terrorisme » dont on voit les résultats aujourd'hui en Irak et en Afghanistan ?
Dans quel autre pays que le nôtre aura-t-on vu un délinquant à demi analphabète, devenir en quelques mois, le 3ème personnage de l'Etat et profiter de sa position pour obtenir des marchés publics portant sur des milliards de dinars, avec la complaisance de son ami et complice, alors ministre de l'agriculture ?
Dans quel autre pays que le nôtre, des ministres notoirement corrompus, continuent depuis des années et au mépris de l'opinion publique, de faire partie du gouvernement alors que l'un d'eux a même été publiquement stigmatisé et dénoncé par vous-même, M. le Président, sur une Chaîne télévisée internationale ?
Dans quel autre pays que le nôtre, des sommes colossales se montant à plusieurs dizaines de milliards de dollars sont placées à l'étranger dans l'opacité la plus totale, comme si le peuple algérien n'était en aucune manière concerné ?
Dans quel autre pays que le nôtre, des Institutions comme la Sonatrach, qui génère plus de 95% de nos revenus en devises, ou la Banque d'Algérie qui est le miroir de notre économie ne publient-elles jamais de bilans périodiques destinés à l'information des citoyens ?
Dans quel autre pays que le nôtre, tel leader syndicaliste véreux et plein de morgue, s'enorgueillit en pleine audience publique d'un Tribunal Correctionnel, quant à sa responsabilité, d'avoir placé plus 40 milliards de dinars de cotisations sociales des travailleurs, définitivement perdus dans la faillite de Khalifa Bank ?
Dans quel autre pays que le nôtre, a-t-on vu un ministre de l'Education nationale aussi incompétent que plein de suffisance, rester si longtemps à la tête de son département –16 ans ! – malgré sa responsabilité directe, lui et son équipe d'aventuriers pédagogiques dans la catastrophe qui frappe l'Ecole algérienne aujourd'hui sinistrée – tous cycles confondus – une catastrophe dont les effets se ressentiront pendant longtemps encore sur l'avenir de nos générations futures ?
Monsieur le Président,
De gros nuages noirs chargés de menaces, s'amoncellent aujourd'hui au-dessus d'une population algérienne minée, démoralisée, au bord de l'explosion, avec pour cadre, une scène politique délétère et corrompue, propice à toutes les conspirations, à toutes les compromissions, à toutes les trahisons contre la paix sociale et l'unité nationale. Aucune manipulation psychologique des foules, à l'image de cette grossière initiative de votre Premier Ministre M. Ouyahia – lui-même suspect de prévarications – et prétendant sans rire, combattre la corruption (!) ; aucuns discours creux ou promesses mensongères, ne pourront avoir de prise désormais, sur un mouvement de ras-le-bol collectif qui frise l'explosion et dont personne ne pourra prédire, ni le moment critique, ni les développements ni l'aboutissement.
Votre devoir de Chef d'Etat, Monsieur le Président est de réagir, promptement, énergiquement, patriotiquement, en vous détournant avec détermination, aussi bien des « BRQ » maquillés que des avis des « conseilleurs » et autres laudateurs professionnels qui sévissent dans les allées du pouvoir. Encore que certains semblent avoir déjà quitté le bateau qui coule.
L'Algérie va mal ! Le Peuple va mal ! Le régime, tout comme la quasi-totalité des dirigeants qui le composent – les civils comme les militaires – sont aujourd'hui définitivement usés, finis, discrédités ! L'Etat a besoin de se renouveler au plan des Hommes, au plan des Institutions, comme au plan des principes moraux qui doivent guider la bonne gouvernance et la bonne gestion des affaires du pays. Nul n'est indispensable pour l'Algérie, pas plus le général Médiène dit « Toufik » et ses séides que votre propre personne. Il vous suffit de visiter les cimetières !
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Monsieur le Président,
En l'espace de moins de deux années – si Dieu vous prête vie – vous pouvez, si vous le voulez, grâce à vos pouvoirs constitutionnels, épargner à notre patrie, de nouveaux déchirements, de nouveaux désordres, de nouvelles tragédies, avec leur cortège de sang, de larmes et de misère tant morale que matérielle, qui mettraient sérieusement en péril cette fois-ci, l'unité-même de la Nation algérienne.
Le temps des « Conférences des Cadres » est révolu, M. le Président. Aujourd'hui, la sagesse vous commande d'annoncer solennellement au peuple algérien et au monde, la tenue, sous un délai maximum de deux ans, d'élections au suffrage universel, pour la mise en place d'une Assemblée Nationale Constituante. Une Assemblée authentiquement représentative de toutes les sensibilités politiques et de toutes les régions du pays, chargée de doter le pays d'une nouvelle Constitution d'inspiration authentiquement démocratique, garantissant l'ensemble des libertés publiques et des Droits de l'Homme, en particulier le respect de la dignité et de l'intégrité physique, psychique et morale de l'être humain. Une Constitution qui proclame solennellement l'indépendance du pouvoir Judiciaire et du pouvoir Législatif, vis-à-vis du pouvoir Exécutif.
Dans cet intervalle, vous vous saisirez pleinement de votre faculté constitutionnelle de légiférer par Ordonnances pour proclamer simultanément :
– la levée de l'Etat d'Urgence ;
– la dissolution de l'Assemblée Populaire Nationale
– la dissolution du Sénat ;
– la dissolution du Conseil Constitutionnel ;
– la destitution de tous les responsables civils et militaires sur qui, pèsent de graves présomptions de crimes imprescriptibles ;
– la nomination d'un Gouvernement d'Union Nationale pour la transition.
Ce Gouvernement sera en particulier chargé :
1 – de la gestion courante des affaires du pays ; des affaires civiles comme des affaires militaires ;
2 – de prendre toutes les mesures conservatoires, administratives, judiciaires ou financières nécessaires à la sauvegarde des intérêts supérieurs de la nation ;
3 – d'organiser dans toute la transparence requise, les élections d'une Assemblée Constituante.
La composition humaine d'un tel Gouvernement, devra refléter aussi fidèlement que possible, les sensibilités politiques, culturelles et régionales du pays dans ses diversités sociologiques, mais aussi les compétences scientifiques, techniques et managériales nécessaires à l'exercice de la fonction, que ces compétences se trouvent à l'intérieur du pays ou parmi nos compatriotes expatriés. Aucun ministre du gouvernement actuel ne devrait en faire partie. Question d'éthique !
Ce Gouvernement devra avoir toutes les prérogatives généralement dévolues à tout gouvernement de redressement national. En particulier le pouvoir de Réglementation par Décrets. Il sera habilité en particulier à requérir, en tant que de besoin, l'audition en Conseil de Gouvernement, de toute personnalité qu'il juge utile – civile ou militaire, quels que soit son rang ou son grade, à l'exception de la personne du Chef de l'Etat – ayant exercé ou exerçant encore, des responsabilités de gestion au sein de la haute Administration ou de commandement au sein de l'Armée, afin de s'assurer des meilleures conditions de fonctionnement de la période transitoire.
Dès la validation des mandats des membres de l'Assemblée Constituante et l'élection du Bureau et du Président de ladite Assemblée, cette Institution sera solennellement proclamée comme étant officiellement dépositaire de la Souveraineté nationale, conjointement avec vous-même, en tant que Président de la République, pour une nouvelle période transitoire d'une année qui sera consacrée à l'élaboration de la nouvelle Constitution. Dans les 6 mois qui suivront l'adoption et la publication de cette nouvelle Constitution, il sera procédé à l'élection simultanée, d'un nouveau Président de la République, et d'une nouvelle Assemblée Nationale. Cette simultanéité ayant pour objectif pédagogique de marquer psychologiquement dans l'esprit du citoyen-électeur, la distinction entre les deux pouvoirs : l'Exécutif et le Législatif. .
Telles sont je crois, Monsieur le Président, en mon âme et conscience de citoyen, les démarches urgentes qui me paraissent propres à casser l'élan de cette course vers le chaos et l'abîme, dans laquelle semble actuellement s'engager une fois de plus, notre pauvre pays.
Refusez que le sang des algériens soit de nouveau versé, Monsieur le Président ! Et saisissez la chance providentielle de vous retirer élégamment de la scène politique, par la grande porte de l'Histoire.
(1) http://www.hoggar.org/index.php?option=com_content&task=view&id=335&Itemid=64
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