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Police politique et nouveaux janissaires
Publié dans Le Quotidien d'Algérie le 15 - 12 - 2010

Il me semble que nous pourrions rester des siècles à débattre ainsi sur la cause première de la faillite de notre pays et de toutes les dérives sanglantes : est-ce la prédisposition du peuple algérien au DRS-sage (dressage) qui lui a fait accepter sans réagir toutes les atrocités que lui ont fait subir les cerveaux de la police politique (SM puis DRS) ou bien est-ce le pouvoir de nuisance très élevé de ces institutions maléfiques qui a progressivement transformé le peuple algérien en légume, en lui injectant chaque jour que Dieu fait un produit actif dont les cerveaux des Tagarins ont le secret?
Pour celles et ceux qui ne l'ont pas encore fait, je conseille de retourner aux livres d'histoire – en particulier le livre de Mouloud Gaïd, L'Algérie sous les Turcs – pour se rendre compte que, malgré la présence des janissaires au sommet de la pyramide, les élites algériennes autochtones n'avaient jamais cessé, durant les trois siècles que dura la «présence » turque dans notre pays, de se soulever et de remettre en question cette tutelle, dont ils ne pouvaient se passer entièrement du fait de la menace espagnole et des rivalités internes qui affaiblissaient la cohésion nationale, mais qu'ils auraient voulue moins pesante. Le dernier soulèvement en date avant l'occupation française fut celui du Cheikh Mahieddine, le père de l'Emir Abdelkader, en 1827.
La résistance à la colonisation française est plus connue et il n'ya pas lieu d'y revenir. Il est vrai qu'entre la défaite d'El-Mokrani et l'apparition des premiers leaders nationalistes dans les années 20-30, il y eut une relative accalmie qui fit croire aux colons que la partie était définitivement gagnée mais, depuis la constitution de l'ENA, la revendication ne cessa jamais et ce jusqu'à la déflagration du 1er novembre 54.
Où est donc la prédisposition du peuple algérien à accepter la colonisation et le despotisme? Malgré la faiblesse des moyens et la pauvreté, les populations ont toujours répondu présent aux patriotes qui les ont sollicitées.
La période qui commence en 1962 est totalement nouvelle dans l'histoire de notre pays. Pour la première fois dans l'histoire multimillénaire de notre région le territoire qui s'appelle aujourd'hui Algérie est unifié et indépendant, nul occupant étranger n'étant là pour imposer sa loi. Après la chute de l'empire almohade, deux royaumes, celui des Hafcides de Tunis et celui des Zyanides de Tlemcen, se disputèrent la suprématie sur ce territoire, sans que l'un arrive à s'imposer définitivement et à construire un pouvoir central fort, reconnu par toutes les populations, d'Annaba à Magnia et d'Alger à Tamanrasset. Cette rivalité facilita la tâche des Espagnols et les villes côtières tombèrent une à une, suite à l'offensive généralisée que ces derniers lancèrent au Maghreb, dans l'élan de la Reconquista. En 1962, après trois siècles de tutelle turque et 132 ans de colonisation française, une nouvelle ère commençait enfin pour le peuple algérien. Le grand drame fut qu'aucune figure sage ne put s'imposer d'emblée à tous les combattants de la guerre de libération, comme le fut Mohammed V au Maroc et Bourguiba en Tunisie. L'absence de cette figure charismatique a lourdement pesé sur l'avenir de notre pays. Messali Hadj, Ferhat Abbas et Cheikh El-Ibrahimi auraient dû logiquement être, de par leur passé de leaders à la tête des trois courants qui composaient le mouvement nationalistes (les communistes ayant eu une attitude ambiguë jusqu'en 1954), les dépositaires de la légitimité et les supports d'une structure politique démocratique. L'histoire en décida autrement et les jeunes loups s'entre-déchirèrent jusqu'à ce que le plus décidé d'entre eux prenne le pouvoir, en s'appuyant sur l'armée des frontières, qui lui était totalement acquise.
C'est cette rupture entre la génération des trois leaders charismatiques et celle des chefs de l'insurrection qui mena le pays au désastre après 62. Le règne de la force, avec ses corollaires, l'exclusion et l'élimination de toute forme d'opposition légale, commença et la SM n'avait d'autre raison d'exister que la surveillance et la répression des opposants au pouvoir en place. Messali Hadj, Ferhat Abbas et Cheikh el-Ibrahimi rangés dans le camp des traitres et de la réaction, les colonels de l'ALN et les chefs historiques du FLN dispersés aux quatre vents par le souffle violent de la discorde et de la lutte pour le koursi, que restait-il au peuple algérien? Il était orphelin. Il fut livré pieds et poings liés à Boumédiène et ses alliés du Conseil de la Révolution, Kasdi Merbah et ses sbires de la SM montant la garde jour et nuit.
Qui pouvait constituer ne serait-ce qu'une association de quartier sans l'accord du pouvoir? Dans quel journal pouvait-on publier ne serait-ce qu'une opinion qui divergeait avec ce que décidait Boumédiène? Comment le peuple algérien aurait-il pu se défendre contre l'emprise des colonels, ces nouveaux janissaires, alors qu'il était orphelin, livré à lui-même? Boumédiène concentra entre ses mains tous les pouvoirs civils et militaires et ce jusqu'à sa mort. Bien sûr, il y eut beaucoup de cadres civils – Ahmed Taleb, Belaïd Abdesselam, Ghozali, etc. – qui acceptèrent de collaborer avec lui, en toute bonne foi peut-être. Mais là n'est pas le plus important. Le plus important est que ceux qui n'étaient pas d'accord avec sa démarche ne purent jamais s'exprimer et agir dans la légalité à l'intérieur du pays afin de proposer au peuple algérien d'autres alternatives. Et la SM veillait à ce qu'aucune voix discordante ne s'élevât pour perturber la belle symphonie – dont on découvrira plus tard qu'elle était mensongère et empoisonnée – que jouaient tous les organes de propagande du régime. La SM protégeait-elle le pays ou bien le pouvoir en place? Aït-Ahmed, Boudiaf, Krim Belkacem, Mohammed Khider, Benkedda, Ferhat Abbas, pour ne citer que quelques uns, étaient-ils des ennemis de l'Algérie? Pourquoi le peuple algérien devait-il avoir peur d'eux? Parce que Ben Bella puis Boumédiène en avaient décidé ainsi.
L'engrenage qui entraina notre peuple et le mena pas à pas vers l'abattoir, comme le mouton de l'Aïd, fut conçu et mis en place par une équipe restreinte qui s'étaitt appuyée sur une armée acquise à sa cause, tout comme les janissaires des siècles passés. Une fois le vide fait et le peuple dressé par treize années de pensée unique – dont El-Moudjahid et la RTA étaient les dépositaires et le gardiens – et une fois le dictateur qui tenait tous les molosses en laisse mort et enterré, le bal des vampires pouvait commencer. La meute se constitua rapidement à l'ombre de l'incompétence et affuta ses griffes et ses crocs. L'Algérie était prête à être dépecée et déchirée à belles dents. La lutte au sommet pour le partage du gâteau s'engagea et personne ne fit attention à cet éternel oublié, ce larbin méprisable, ce ghachi qui se faisait cracher dessus sans réagir, depuis si longtemps.
L'exclusion, le mépris et l'arbitraire ont été érigés en système de gouvernement par le pouvoir algérien depuis son avènement, tout comme celui des janissaires turcs. La SM et le DRS ont toujours été au service exclusif de ce pouvoir et ont servi à le protéger contre les opposants issus du peuple algérien. Ils ont pu jouer à titre secondaire un rôle dans la protection du pays contre les «prédateurs étrangers» – ce dont je doute fort – mais il ne fait aucun doute que la raison principale de leur existence était – est – de surveiller et de pourchasser les opposants, que ce soient les historiques du FLN, la «réaction», les communistes, les berbéristes ou les islamistes. Leur champ d'action est national et international. Ce n'est un secret pour personne que la police politique (SM puis DRS) a ses agents dans toutes les ambassades d'Algérie à l'étranger chargés de surveiller tous ceux parmi les algériens exilés qui auraient la prétention de remettre en question la suprématie des janissaires d'Alger. Il y a certes des agents du DRS (et de la SM par le passé) dans les institutions de l'Etat, les médias et les entreprises économiques dont le rôle est d'assurer la sécurité préventive, mais tout le monde sait qu'en plus de leur rôle strictement sécuritaire, ils servent de relais à la machine de surveillance et de propagande du pouvoir. Ils veillent à détecter le moindre mouvement de contestation et s'emploient à le neutraliser par tous les moyens. Ils diffusent des rumeurs et de fausses informations afin de semer la confusion et dévier les regards. Ils fabriquent des dossiers contre ceux qui risquent de constituer une menace pour leur pouvoir et liquident sans état d'âme ceux qui sont jugé irrécupérables.
Venons-en maintenant au plus lourd passif de l'Algérie indépendante, celui de la décennie noire. Après octobre 88, et dans la foulée de la chute du mur de Berlin, notre pays aurait pu entamer une nouvelle ère, celle de la démocratie véritable, du pluralisme politique, de la liberté d'opinion, de l'Etat de droit. L'échec du processus démocratique entamé avec la Constitution de Février 89 n'a pas encore livré tous ses secrets, car beaucoup de protagonistes n'ont pas encore témoigné en toute honnêteté devant le peuple algérien et l'histoire. Quel rôle a joué le DRS dans la tragédie vécue par notre pays? Cette question prête encore à controverse, malgré les nombreux témoignages d'anciens officiers du DRS, et elle ne sera définitivement tranchée qu'après que des enquêtes impartiales aient été menées au sujet des assassinats, massacres et disparitions. Une chose est sûre : le DRS n'a pas joué le rôle de pompier, mais celui de pyromane. Tous ceux qui avaient appelé au dialogue et à la mesure ont été systématiquement taxés de traîtres et de fossoyeurs de la démocratie. Pourtant le DRS est bien placé pour connaître la réalité du terrain. Les chefs du DRS et de l'ANP savent très bien que les partisans du FIS sont nombreux dans la société algérienne et que la seule solution pour notre pays est le dialogue et l'appel à la sagesse. Ne pas être d'accord avec un autre algérien sur la meilleure manière de gérer le pays ne nous donne pas le droit de l'exclure et de l'empêcher de s'exprimer. Le DRS a toujours rejeté toute tentative de dialogue avec les islamistes, assimilant ces derniers au mal suprême.
Pourquoi vivons-nous encore sous l'état d'urgence? Pourquoi, alors que les anciens dirigeants du FIS sont soit morts, soit exilés, soit sous étroite surveillance, et que le fondateur du GSPC, Hassan Hattab, a été arrêté, y a-t-il encore des terroristes dans les maquis de Kabylie? La vérité finira bien par éclater au grand jour et les Algériennes et les Algériens sauront enfin à quoi s'en tenir au sujet de ceux qui les ont dirigés depuis 1962, en s'appuyant sur l'Armée et la police politique. Ils sauront enfin qui étaient les vrais patriotes et qui étaient les traitres. Alors, nous pourrons peut-être oublier définitivement le règne des janissaires.


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