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La Tunisie sous le choc de l'affaire Oussama Achouri
Publié dans Le Quotidien d'Algérie le 19 - 05 - 2011

Onde de choc après les déclarations d'un manifestant qui dit avoir été violé par un agent de police
mercredi 18 mai 2011 / par Maryam Mnaouar
Un jeune manifestant, Oussama Achouri, déclare dans une vidéo publiée sur facebook qu'il a été violé par un agent le 12 mai 2011 après son arrestation. Les tunisiens avaient découvert ce jeune homme de 22 ans dans le journal télévisé du jeudi soir avouant qu'il avait commis des actes de vandalisme sur ordre de Hamma Hammami et Siham ben Sedrine, respectivement secrétaire général du parti communiste POCT et célèbre militante des droits de l'homme.
Dans sa vidéo, Oussama revient sur ses déclarations à la tv nationale et explique qu'il a été obligé de tenir ces propos a la suite d'actes de violence dont le viol subi. Il n'expliquera pas la présence de la caméra ni les circonstances de l'enregistrement. Al jazzera relaye l'info, et dans la foulée le secrétaire d'état à la jeunesse déclare sur sa page officielle avoir lui même emmené Oussama à l'hôpital où un certificat médical lui a été délivré. Puis samedi 14, nouvel émoi, Oussama se serait fait arrêter à nouveau et la communauté du web s'enflamme. Communiqué aussitôt sur la page facebook de la police, Oussama n'a pas été arrêté, il aurait juste été entendu dans le cadre de cette affaire » prise très au sérieux » par le ministère de l'intérieur et il est libre de ses mouvements.
Joint par afrik.com, le syndicat de la police, reste égal à lui même : tout dépassement de la loi, même par un agent sera réprimé, mais de rappeler que tout reste au stade d'allégations tant que cela n'a pas été prouvé. Les investigations seraient en cours et la communication sera transparente et sereine.
Slim amamou, le secrétaire d'état à la jeunesse, confirme les faits indiqués sur son blog, il ne connait pas directement Oussama, c'est un autre blogueur qui l'a joint pour solliciter son aide après avoir constaté le refus d'ausculter Oussama.
Taoufik bouderbala, dit avoir eu connaissance de ce fait d'actualité, mais que ce jeune homme ne s'est pas présenté à sa commission, il est important qu'il vienne exposer son cas pour être pris en charge et permettre toute la lumière sur cette affaire. Il rajoute que le président de la commission a la latitude pour solliciter les hôpitaux pour les expertises en vertu de la circulaire du premier ministre de février 2011.
Bechir Warda, président de l'Observatoire National de la presse, interrogé par afrik.com sur la déontologie des chaines qui ont diffusé des séquences de personnes en détention sans vérification, sans publier de démenti quand la personne est revenue sur ses déclarations, trouve que le procédé est contraire à la déontologie, le travail journalistique a manifestement été bâclé, les conditions d'enregistrement restant floues. Sur les déclarations du jeune Oussama, M. Warda a beaucoup de doutes, il s'interroge notamment sur le fait qu'en tant que victime il n'ait toujours pas porté l'affaire devant la justice. Il rajoute par ailleurs que la haute autorité n'a été saisie d'aucune plainte.
Oussama Achouri, lui, reste jusqu'à ce mercredi matin injoignable, il serait caché par des camarades qui ne précisent pas ce qu'ils craignent. Le plus actif d'entre eux, Naim Jouini, un jeune de 22 ans, fait le relais entre lui, les médias, les avocats, et même la police qui l'a joint alors qu'afrik.com recueillait ses propos. Il enregistre au passage des témoignages sur facebook et donne des précisions sur l'affaire lorsque afrik.com tente de poser les interrogations directement à Oussama : Oussama n'est pas un blogueur, ce serait un manifestant de la kasbah, c'est là qu'ils auraient fait connaissance. Il aurait été arrêté jeudi 12 en début d'après midi lors d'un contrôle d'identité à Tunis. Relâché, il aurait parlé a ses amis du viol qu'il aurait subi par un agent suite à un premier refus de faire des aveux dictés à la tv. L'affaire commence par la publication de la vidéo de Oussama sur facebook. Naim et un autre camarade l'auraient emmené pour effectuer un constat médical, mais ils se seraient heurtés à un refus, sans plus de précision. C'est là qu'ils ont eu l'idée de faire appel à Slim Amamou.
Sur les faits du samedi 14, Naim déclare qu'Oussama aurait été interpellé à la terrasse d'un café alors qu'il était en sa compagnie avec d'autres amis. Il aurait eu un malaise en découvrant son agresseur dans le camion de police. Les agents auraient indiqué qu'ils voulaient entendre Oussama pour lui rendre justice et comprendre ce qui s'était passé. Il aurait été donc entendu dans les locaux de la police judiciaire et on lui aurait montré des pages facebook et un historique internet démontrant un penchant homosexuel, ce qu'il aurait refusé de signer. il sorti libre du poste le jour même et il n'est pas en détention comme le suggèrent les internautes.
Afrik qui est sur l'affaire depuis dimanche n'arrive pas à avoir accès à Oussama, son protecteur ne donne pas de raisons précises, il dit juste avoir mis deux avocats sur l'affaire et indique se méfier beaucoup. Il pointe aussi un manque de soutien logistique et financier, mais refuse l'accès d'un avocat supplémentaire conseillé par afrik.com au dossier et à Oussama.
Oussama est apparu entre temps dans une nouvelle vidéo datant du 15 mai en réponse au communiqué du ministère de l'intérieur, pointant du doigt des incohérences grossières dans leur déclaration, notamment le fait de dire qu'il a été arrêté vendredi alors qu'il s'agit de jeudi, l'intervention tv du jeudi soir au poste, et le certificat médical datant de vendredi faisant foi. Il donne aussi plus de détails sur le viol qu'il aurait subi ; il aurait été immobilisé par un agent corpulent pendant qu'un autre le sodomisait. Ce dernier, lui aurait déjà fait des gestes et allusions obscènes alors qu'il montait les escaliers une heure avant l'agression. Toujours selon Oussama dans sa vidéo, pour Nawat.org, le chef de poste qui nie avoir eu connaissance des faits, aurait admis lors de la 2eme arrestation d'Oussama qu'il savait qu'on l'avait séparé des autres jeunes et qu'on l'avait placé seul dans une pièce. Concernant la présence des caméras, il ne fournit pas d'explication sur les circonstances de leur présence et si elles étaient là depuis le début, on apprendra que NESSMA TV a été la première à recueillir ses propos 1 quart d'heure après le viol et qu'il était en pleurs dans la séquence. Impossible de mettre la main sur cette séquence aujourd'hui, une heure plus tard il fait les déclarations à la tv nationale déterminé, dit-il, à dire ce qu'il faut pour sortir du poste. Autre caméra présente, celle du ministère de l'intérieur qui aurait dépêché une équipe sur place.
Autre apparition de Oussama, au micro de Shems FM et de Mosaïque FM et à au haut comité de réalisation des objectifs de la révolution, le quel comité s'est montré très concerné.
L'émoi est vif sur la toile, le spectre policier refait surface, et déjà, on se divise : Ce jeune qui a déjà tenu des propos sur lesquels il est revenu est-il crédible ? Autre question récurrente, le timing de ces déclarations : le lendemain de l'interview de Baji Kaid Sebsi qui avait désigné sans les nommer des partis politiques derrière les actes de vandalisme.
Mais au delà de ces divisions en pour et contre, la grande question est : les arrestations après le 14 janvier sont elles toutes saines et sereines ? Ceux que la télévision nationale exhibe comme des casseurs et criminels, le sont-ils vraiment ? Comment en être certain, alors que tout le monde est tourné vers les faits précédent le 14 janvier, que les médias versent encore dans le sensationnel et que le ministère de l'intérieur n'a pas encore atteint la phase ou il désigne et se détache publiquement des éléments qui ont mal agi et entaché sa réputation durant et avant la révolution. Le doute est permis et bénéficiera toujours, tant que l'enquête ne s'est pas prononcée, à ceux qui se déclarent victimes de bavures de la part de l'état.
Afrik ne manquera pas de revenir sur l'affaire.
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