Alger: tirage au sort pour le quota supplémentaire des livrets Hadj    Prévention des risques du gaz: lancement de la deuxième phase de l'installation de détecteurs de monoxyde de carbone à Ouargla et Touggourt    Mandats d'arrêt contre deux responsables sionistes: HRW exhorte la communauté internationale à soutenir la CPI    Nâama: colloque sur "Le rôle des institutions spécialisées dans la promotion de la langue arabe"    Agression sioniste: "Ce qui se passe à Ghaza est une tragédie"    Canoë-Kayak/Championnats arabes: 1e médaille d'or pour le duo Oualah et Bekhtaoui    Salon international des dattes: une diversité de variétés au cœur du terroir algérien    Décès de Mohamed Smaïn: le ministre de la Communication présente ses condoléances    Mouloudji effectue une sortie nocturne à Alger pour s'enquérir de l'opération de prise en charge des sans-abri    Cisjordanie occupée: au moins 15 Palestiniens arrêtés en 24 heures par les forces d'occupation    Oran: décès du journaliste Mohamed Smain    Production prévisionnelle de plus de 1,8 million de litres d'huile d'olive    US Biskra : Séparation à l'amiable avec l'entraîneur Zeghdoud    Le MCA goûte sa première défaite, le CSC en tête    Ligue 2 amateur (Centre-Ouest) : Chaude empoignade entre El Biar et Kouba    L'importance de la numérisation du domaine notarial soulignée    Les impacts des tensions géostratégiques au Moyen-Orient Iran/Israël et les facteurs déterminants du cours des hydrocarbures    Plus de 1.4 million de personnes déplacées    Importante caravane de solidarité en faveur des enfants nécessiteux et des personnes âgées    Réhabilitation du réseau d'éclairage public à la cité    1 kg de kif traité saisi, 01 suspect arrêté    Prison ferme pour un homme qui avait menacé d'incendier des mosquées    «L'Occident cherche l'escalade» selon Sergueï Lavrov    Action en justice contre Kamel Daoud    La 4e édition du 25 au 29 novembre à Alger    Plus de 4 millions de visiteurs    Réunion OPEP-Russie : l'importance de la stabilité des marchés pétroliers et énergétiques soulignée    CAN-2025 U20 (Zone UNAF) 4e journée (Tunisie-Algérie) : victoire impérative pour les "Verts"    Jeux Africains militaires–2024 : l'équipe nationale algérienne en finale    Startups : Les mécanismes de financement devraient être diversifiés    La Révolution du 1er novembre, un long processus de luttes et de sacrifices    Nécessité de renforcer la coopération entre les Etats membres et d'intensifier le soutien pour atteindre les objectifs    Le Général d'Armée Chanegriha préside la cérémonie d'installation officielle du Commandant de la 3ème Région militaire    Les ministres nommés ont pris leurs fonctions    «Dynamiser les investissements pour un développement global»    Le point de départ d'une nouvelle étape    L'Algérie happée par le maelström malien    Un jour ou l'autre.    En Algérie, la Cour constitutionnelle double, sans convaincre, le nombre de votants à la présidentielle    Tunisie. Une élection sans opposition pour Kaïs Saïed    Algérie : l'inquiétant fossé entre le régime et la population    BOUSBAA بوصبع : VICTIME OU COUPABLE ?    Des casernes au parlement : Naviguer les difficiles chemins de la gouvernance civile en Algérie    Les larmes de Imane    Algérie assoiffée : Une nation riche en pétrole, perdue dans le désert de ses priorités    Prise de Position : Solidarité avec l'entraîneur Belmadi malgré l'échec    Suite à la rumeur faisant état de 5 décès pour manque d'oxygène: L'EHU dément et installe une cellule de crise    Pôle urbain Ahmed Zabana: Ouverture prochaine d'une classe pour enfants trisomiques    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



« Les jeunes Arabes ont le sentiment de s'être fait voler leur révolution »
Publié dans Le Quotidien d'Algérie le 27 - 07 - 2011


Vincent Geisser
Mardi 26 Juillet 2011
De nombreuses manifestations ont eu lieu ce week-end en Tunisie et en Egypte. Certaines d'entre elles ont été violemment réprimées, rappelant les techniques violentes des anciennes dictatures. Au cœur des revendications : l'accélération du changement de régime et davantage de transparence du pouvoir en place. La démocratie attendra encore un peu…
Atlantico : La contestation continue en Egypte et en Tunisie. « L'après-révolution » serait-elle plus compliquée que prévue ?
Vincent Geisser : Il ne faut pas raisonner en terme d'avant et d'après. Nous sommes dans des processus « révolutionnaires » qui perdurent. Autrement dit, l'illusion que nous avons souvent, c'est que l'on passe d'un régime à un autre, d'un régime autoritaire, comme celui de Ben Ali et de Moubarak, à un nouveau régime qui peut-être démocratique ou autre.
Or, cela ne se fait jamais de manière aussi brutale. La chute des régimes totalitaires et dictatoriaux est souvent suivie d'une période d'incertitude politique, et de refondation politique. Mais cette période est aussi porteuse de ruptures nouvelles. Même si cette situation est regrettable et porteuse d'angoisse, elle est conforme à ce qu'on pouvait prédire, au regard des expériences latino-américaines ou européennes au cours du XIXème et du XXème siècle.
Cette période d'incertitude va-t-elle forcément déboucher sur l'accomplissement des idéaux pour lesquelles les Tunisiens et les Egyptiens se sont battus ?
Tout d'abord, il est faux de croire que la chute d'un régime totalitaire débouche nécessairement sur une démocratie. Dans un phénomène de recomposition politique, on constate toujours la survie de ce qu'on appelle des enclaves autoritaires. Autrement dit, le dictateur est tombé mais les structures de la dictature continuent à agir et à structurer non seulement la société, mais aussi les modes de pensée, les comportements et les habitudes. De ce point de vue-là, nous voyons bien que la manière dont les nouvelles manifestations ont été réprimées en Tunisie et en Egypte, montre que les codes de maintien de l'ordre sont directement hérités de l'ancien régime.
Il est même possible que la survie de ces enclaves totalitaires, dans les régimes de transition en Tunisie et en Egypte, puisse durer assez longtemps et même faire qu'au bout du compte des régimes hybrides s'installent, au lieu d'un régime démocratique. Ces régimes hybrides relèvent à la fois de tendances démocratiques et autoritaires. Il se pourrait que la Tunisie et l'Egypte deviennent des régimes qu'on pourrait qualifier de démocraties autoritaires ou d'autoritarisme démocratique.
Sachant que ces pays sont aux mains de dictateurs depuis plus de 40 ans, comment est-il possible d »y mettre en place un régime démocratique sans en connaître les fonctionnements institutionnels ?
Il y a eu une certaine myopie européenne et américaine sur le fait que les sociétés tunisiennes et égyptiennes se sont quand même démocratisées en dépit des régimes autoritaires. Contrairement à ce que nous avons pu croire, les jeunesses tunisiennes et égyptiennes étaient parfaitement infusées par la culture des droits de l'Homme et par la notion de démocratie. Elles en étaient parfois même critiques mais elles en avaient conscience. Ces sociétés arabes ce sont, au travers de l'espace audiovisuel, des réseaux sociaux et des phénomènes de contact direct avec l'international, démocratisés, bien qu'ils soient gérés par des régimes profondément dictatoriaux.
L'espace audiovisuel du monde arabe offre une étonnante vision pluraliste aux regards des régimes qui, eux, relèvent d'un autre siècle, voire d'un archaïsme politique. De ce point de vue-là, je ne suis pas pessimiste sur ce qu'on pourrait appeler la culture démocratique, dans les pays arabes. Je pense qu'elle était acquise depuis de très nombreuses années et qu'elle avait depuis bien longtemps infusé les consciences. C'est d'ailleurs ce qui a creusé le décalage entre une jeunesse porteuse de ces idéaux et des régimes porteurs d'idéaux anciens se référant à l'autoritarisme.
Que faire pour que cette conscience démocratique devienne un régime politique ?
Le problème n'est pas au niveau des valeurs et des principes, mais plutôt de ceux qui les incarnent. Les régimes dictatoriaux n'ont cessé de réprimer les partis politiques, les ligues des droits de l'Homme et les associations. C'est-à-dire qu'aujourd'hui dans la jeunesse du monde arabe, en Egypte comme en Tunisie, il existe une véritable défiance, une véritable suspicion, à l'égard des formes organisées, des leaderships et des partis politiques. Même des partis qui pourraient mettre en avant leur histoire de lutte envers les régimes totalitaires apparaissent suspects.
C'est pour cela que les jeunes, que ce soit au Caire ou à Tunis, ont du mal à se reconnaitre dans les acteurs de la transition, indépendamment du fait que ces acteurs sont des anciens du régime ou même des anciens résistants. Les hommes politiques de la transition ont du mal à se construire une légitimité auprès de la jeunesse. Cette dernière est porteuse d'une démocratie radicale. Elle n'est pas satisfaite des réformes et des idées trop timides, qui ne leur apparaissent pas sérieuses au regard du chantier qui est devant eux.
Cette jeunesse se sent peu représentée. Le sentiment qui domine aujourd'hui à la fois dans la jeunesse, mais aussi au sein des populations pauvres, c'est qu'ils ont le sentiment de s'être fait voler leur révolution. C'est-à-dire que les élites, même les plus honnêtes, apparaissent comme suspectes. Elles sont marquées par cette suspicion, du fait qu'elles appartiennent au milieu urbain et apparaissent relativement âgées. Il existe un vrai problème générationnel par rapport à ces révolutions portées par les milieux modestes et par les jeunes. Il existe un décalage entre les élites qui occupent la scène de la transition démocratique et la majorité des acteurs de la révolution qui ne se sentent pas représentés par ces élites.
Est-il nécessaire de juger les dictateurs ? Cela fait-il partie de la transition démocratique ?
Il ne faut pas confondre procès d'exception et procès exceptionnel. En Tunisie, Ben Ali est d'abord jugé pour des affaires de drogues, de détournements de fond… Il faut des procès, cela constitue la vertu pédagogique. Mais on s'aperçoit que dans le cas tunisien, la vertu politique est totalement oubliée. C'est-à-dire qu'on juge pour se débarrasser du poids des dictateurs, de ce qu'ils véhiculent autour d'eux, tout cela pour ne pas montrer que la dictature n'était pas seulement un problème de personne. La dictature ne dépendait pas que d'une personne, mais c'était un système, elle reposait sur des modes de fonctionnement.
C'est un peu comme la collaboration en France. On juge Pétain et c'est fini, alors que la collaboration correspondait à toute une administration, avec l'appui des fonctionnaires, des commissaires de police, des magistrats, qui avaient prêté serment au Maréchal Pétain. La sortie de la dictature est similaire.
On en vient à faire une forme d'exutoire comme en Roumanie. On sacrifie les têtes de la dictature et on oublie de faire un procès de vertu pédagogique, le procès du régime, pour repartir sur de nouvelles bases. C'est-à-dire, d'expliquer comment cette dictature a pu survivre et piller le pays. Il ne s'agit pas de faire une épuration mais de juger pour l'Histoire, notamment pour cette nouvelle génération. Il faut faire des procès de reconstruction et non pas de division. Mais le véritable problème réside dans le fait qu'ils font le procès des dictateurs avec la justice des dictatures. C'est-à-dire une justice expéditive et mal faite.
Lectures:


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.