Il était une fois un jeune homme Algérien bien charmant vivant aux temps modernes, qui avait rencontré sa moitié et qui avait décidé de l'épouser. Ma mère était une cousine de la moitié en question, donc je fus invitée à assister à la cérémonie de mariage. Ça se passait dans une salle des fêtes comme la modernité matrimoniale avait coutume de faire, c'était une salle avec vue sur mer, décorée par un designer de renom avec bien sûr service compris, c'était la salle du moment, ZE salle. Arrivée sur les lieux je pus m'en rendre compte par moi-même. Les dames évoluant sur la piste de danse étaient scintillantes dans des gandouras bling-bling et ressemblaient à des étoiles filantes qui se seraient données rendez vous pour une boum. Guindée dans une discrète robe noire, Je m'étais assise là où on me l'avait indiqué, un café chaud atterrissait sur ma table accompagné d'une multitude de gâteaux aussi aguichants que sophistiqués. Un des gâteaux servis me faisait carrément de l'œil, je pris un temps pour méditer la dessus ; où nous avait mené notre excès de modernisation, à des gâteaux mutants qui draguaient les invitées. C'était un gâteau d'un rouge sang à priori à base d'amandes fait avec des kilos de colorant artificiel, il brillait de mille feux grâce au must du moment que toute pâtissière digne de ce nom avait dans son placard, j'ai nommé ZE brillant alimentaire. Le truc c'est que j'étais persuadée que si j'en mangeais j'aurais soit augmenté mes chances de faire un cancer du côlon ou alors dans l'immédiat d'obtenir une scintigraphie si on me prenait en photo. Mes camarades de table quant à elles se regardaient en chien de faïence, se narguaient subtilement les unes les autres en détaillant au millimètre près chaque perle, chaque grain de poudre, se jaugeaient pour juger à la fin du prestige de la toilette de chaque potentielle concurrente. Aussitôt le one shot fait, elles s'adressaient des sourires mielleux prémices d'une discussion aussi promettante qu'une enquête policière. L'orchestre qui m'assommait les tympans était incapable de passer une chanson entraînante pour se dandiner dessus, moi qui aimait danser c'était le seul refuge qui pouvait m'abritait du profond ennui qui me guettait. Toutefois certaines danseuses aguerries aimaient bien et chaloupaient avec grande virtuose. Le reste des dames présentes qui malgré leur manifeste excès de poids jouaient au défilé de mode en changeant à tout bout de champ de gandouras. Et vas y que je mette la bleue avec tout le tralala assorti et vas y que je mette la rose et vas y que je mette la verte, ah non l'argentée c'est mieux, l'autre est « trop » simple…. De temps à autres, quelques invitées me reconnaissaient, j'étais alors obligée de servir un sourire et un « comment ça va » qui avait pour inévitable ricochet un « wallah labess et toi» et à mon tour je ripostais « wallah je vais bien aussi », bienséance oblige. Mais quand les pies endimanchées dans leurs costumes d'apparat tout d'or éclaboussées cherchaient à savoir si vraiment le mari de ma cousine s'était remarié en cachette. là encore la bienséance prenait le dessus sur mes pulsions de meurtrière inavouée et je servais envers et contre tout un « noooon » serti d'un rictus crispé rêvant en secret d'emplumer ces cocottes farcies bien trop curieuses et peu modestes à mon goût. Et la mariée vint enfin avec ZE robe blanche, une traîne de 10 mètres, un voile piqué de 1000 perles et un diadème digne de Walt Disney. Rentrée bien après minuit, je m'affalais sur mon lit les oreilles bourdonnantes, je fermais les yeux et je vis danser tout autour de moi des dragées multicolores, des ceintures en or, des gâteaux divers aux couleurs d'arc-en-ciel, les grosses dames aux lourds déhanchés, de bons plats arrivant en masse, pleins de vaisselle de cuillers et de tasses… Tous les éléments étaient réunis pour faire de ce mariage, ZE mariage du siècle le plus fastueux, le plus onéreux et donc le plus réussi. Toute cette opulence pour montrer qu'on avait bien fait les choses, de satisfaire les bonne dames- qui à mon humble avis auront toujours quelque chose à redire- que tout ce faste est finalement aussi peu garant du bonheur des mariés, finalement la seule chose qui avait véritablement de la valeur pour moi. Lectures: