Les Emirats Arabes Unis célèbrent le 2 décembre 2011 le 40ème anniversaire de la création de leur Etat. Quel bilan peut-on tirer de cette période relativement courte dans l'histoire des nations ? Loin de moi la prétention de m'engager dans cet inventaire, par contre je peux très bien témoigner des réalisations que j'ai vues de « mes propres yeux» depuis mon installation dans ce pays en août 2002. Commençons par parler des transformations constatées au niveau du quartier « Arous el Bahr » El Khalidyia où j'ai habité de 2002 à 2007. Ce quartier doit son appellation « Arous el Bahr » à un drame vécu lors de sa construction : un jeune promoteur immobilier avait entrepris l'édification d'un bâtiment de 12 étages. La construction achevée, et les premiers locataires installés, le jeune propriétaire contracte mariage et s'en va en voyage de noces avec son épouse sur son propre bateau. Ils n'en sont jamais revenus, d'où ce surnom donné au bâtiment et partant à tout le quartier : «Arous el Bahr »- Les mariés de la mer. Dans ce même quartier, j'ai vu démolir une douzaine de bâtiments de 5 et 12 étages, dont l'un par implosion, j'avais envoyé des photos de cette opération spectaculaire. Et à la place ont été érigées des tours de 20 étages, et même de 40 étages pour les dernières qui avaient été érigées sur le terrain libéré par le bâtiment détruit par implosion. La vitesse de la construction m'a sidéré. Pour preuve : J'avais choisi, comme premier logement, un appartement situé au 17ème étage d'une tour de 20 étages, avec vue panoramique sur la Corniche et la mer. En contrebas, je voyais que des travaux avaient été engagés pour édifier une nouvelle tour. C'était en août 2002. J'avais dit à mon épouse : « aucun risque de voir notre panorama obstrué par cette nouvelle tour ; ils en sont au 8ème étage, nous terminerons notre séjour dans quelques années, ils ne seront pas encore arrivés à notre hauteur ». Et bien, voilà que notre panorama a été barré à 50% par la carcasse de cette nouvelle tour fin novembre 2002, soit en deux mois et demi ! Je voyais les étages s'élever l'un après l'autre à la vitesse d'une dalle par semaine, les travaux en continu H24. Aussitôt inaugurée cette tour, nous avons constaté que des travaux avaient entrepris sur le terrain mitoyen qui servait jusque là de parking. Nous avions pensé qu'il s'agissait d'aménager un parking pour la nouvelle tour. Erreur : la première tour ayant déjà inclus des parkings sur plusieurs niveaux en partant du sous sol, il s'agissait de travaux d'édification d'une deuxième tour de vingt étages. Et voilà, que quatre ans à peine après notre installation, le deuxième tour avait obstrué notre panorama sur 40% supplémentaires : nous ne voyions plus la mer que sur 10% du panorama, et en se tordant le cou. En 2007, nous quittons ce quartier pour habiter une zone résidentielle composée de villas uniquement. En quatre ans, nous avons assisté à la démolition de toutes les anciennes villas qui dataient des années 1980 et à l'émergence de nouvelles « villas », en fait de vrais petits palais, dont un complexe « Liwa Village » comprenant une cinquantaine de villas, avec une Cafétéria « Le Boulanger », appellation bien française, proposant des croissant, gâteaux, et plats français. En ville, nous avons été témoins des nouvelles tours qui émergent sur toutes les surfaces urbanisables avec de nouveaux Malls qui n'existaient pas à notre arrivée : Khalidiya Mall, Al Wahdha Mall, Er Raha Mall, et dernièrement Al Mushreef Mall. Parlons du Centre où je travaille depuis plus de neuf années : « Center for Documentation & Research ». Créé en 1968 par Sheikh Zayed Al Nahyan, Allah Yarhamou, le centre relevait de l'autorité de Sheikh Mansour, directeur du cabinet présidentiel. Sa mission principale : collecter les archives historiques relatives à l'histoire de la région, par l'acquisition de copies auprès des Archives Nationales de différents pays. Aucune activité officielle au niveau des archives des institutions gouvernementales. Comptant un effectif de moins de cent personnes, Il était installé sur deux niveaux dans un « vieux » bâtiment des années 1990. Aujourd'hui, notre centre est devenu National, avec un statut fédéral lui donnant autorité sur toutes les archives produites par tous les organes de l'Etat au niveau fédéral et local. Il est installé depuis novembre 2005 dans un nouveau bâtiment s'élevant sur quatre étages, avec tous les équipements de niveau international lui permettant d'organiser les plus grands évènements, et un effectif qui est passé à 250 personnes. Le « National Center for Documentation & Research » relève toujours de l'autorité de Sheikh Mansour devenu entre temps vice premier ministre et ministre aux affaires présidentielles. J'étais le seul algérien dans ce centre en 2002 : nous sommes quatre algériens aujourd'hui, dont trois experts en archivistique et un expert en bibliothèques. La dimension fédérale du NCDR, et l'autorité de Sheikh Mansour, nous ont permis d'inspecter les archive de tous les organes de l'Etat, ministères, émirats, municipalités, administrations locales. Revenons au développement urbain : plusieurs nouvelles villes ont été édifiées en dehors d'Abu Dhabi, des villas et des appartements luxueux par centaines, avec des locations deux fois moins chers qu'à Abu Dhabi ville. Rappelons qu'Abu Dhabi est une île avec peu d'espaces pour de nouvelles urbanisations. Tous les établissements scolaires, qui occupaient des villas, avaient été invités à quitter la ville pour construire des établissements scolaires confortables dans les villes nouvelles. Parlons du cas de l'Université Paris Sorbonne Abu Dhabi : Je l'ai vue déménager trois fois, toujours dans le souci d'offrir un confort meilleur. Aujourd'hui, cette annexe de la prestigieuse université française est installée dans un nouvel édifice construit spécialement pour elle en rapport avec son prestige, sur l'île Al Reem avec un Dôme qui rappelle celui de l'Université mère à Paris. J'y vais de temps à autre pour assister à des conférences en langue française, dont une somptueuse conférence concert sur la musique andalouse ! Prenons la route de Dubai : A raison de mes fonctions je n'ai cessé de parcourir tous les Emirats, et à chaque fois il me fallait commencer mon périple sur l'autoroute Abu Dhabi-Dubai. J'ai vu s'édifier un deuxième Dubai avec des centaines de tours à plus de 40 kilomètres de l'entrée traditionnelle de l'ancien. Quatre nouveaux malls ont été construits sur cette autoroute, Ibn Battouta Mall (le plus culturel des Malls avec des pavillons reproduisant les voyages du géographe arabe), Mall of The Emirates (Avec sa station de Ski), Dubai Marina Mall, et Dubai Mall (avec son aquarium), ce qui nous évite de pénétrer à Dubai où la circulation est infernale. J'ai assisté aussi ces dernières années à l'érection de Bord Khalifa, la plus haute tour du monde, ainsi qu'à la construction et la mise en circulation du Métro de Dubai le 09/09/2009 ! Mes activités professionnelles me conduisent souvent hors d'Abu Dhabi dans les Emirats de Dubai, Sharjah, Ajman, Ras al Kheima, Fujeirah…Partout des chantiers. Pour se déplacer en évitant Dubai, il existait déjà l'autoroute des Emirats qui reliait les différents émirats. La première fois que j'avais emprunté cette autoroute en 2003, c'était un désert, peu de circulation. Aujourd'hui, c'est une route vraiment encombrée, avec l'édification tout au long du trajet de véritables villes nouvelles. Si bien qu'une deuxième autoroute a été tracée « Dubai by pass » prolongée par « Outer by pass » conduisant jusqu'à Ras Al Kheima. Des bretelles partant de ces autoroutes conduisent vers Dubai International Academic City. La première fois que je me suis rendu sur le site en 2005 pour une mission au Dubai Men's College, qui se trouvait être le seul édifice construit dans les parages, il m'avait été affirmé que cette région désertique allait se transformer en un pôle universitaire dans une région en développement « Dubai Silicon Wadi ». J'étais plutôt sceptique. J'y suis retourné voilà quelques mois pour une mission dans d'autres institutions nouvellement installées. Je n'ai pas su retrouver mon chemin, la région abritant désormais, en plus de nouvelles administrations, près de 30 institutions académiques de 11 pays différents, avec entre autres: Rochester Institute Of Technology (RIT), American University In The Emirates, Murdoch University Dubai, Repton School Dubai…ainsi que le Lycée français international Georges Pompidou. L'énumération des réalisations vues en neuf années de séjour illustre la frénésie de développement tout azimut… Je m'arrête là. Abdelkrim Badjadja Consultant en Archivistique http://badjadja.e-monsite.com/ http://badjadja.over-blog.com/