30 juin 2012 Les pays du Maghreb suivront-ils l'exemple de la Tunisie ? La Tunisie a décidé d'instaurer « unilatéralement » la liberté de circulation, de résidence, de travail, d'investissement et du vote aux élections municipales pour les citoyens maghrébins sans obligation d'octroi d'autorisations préalables auprès l'administration tunisienne à partir du 1er juillet. Cette décision, décriée par certains politiques, médias et un pan de la société civile, est interprétée comme un geste fort de la Tunisie pour relancer la construction du Maghreb « profitable à tout le monde », soutient l'économiste Camille Sari. « J'ai une bonne et mauvaise nouvelle : la mauvaise est que la Tunisie n'a aucun avenir en Tunisie. La bonne nouvelle est que la Tunisie est en train de bâtir un espace maghrébin pour s'épanouir », avait déclaré le 21 juin dernier Moncef Marzouki, président provisoire de la République tunisienne faisant référence aux « cinq libertés » nécessaires pour redynamiser l'Union du Maghreb Arabe (UMA). Cette décision confirmée par le secrétaire d'Etat chargé des Affaires arabes et africaines, Abdallah Triki, en fin de semaine passée, a valu à Moncef Marzouki les foudres d'une large partie de la presse tunisienne qui voit en cette décision une menace pour la sécurité intérieure de la Tunisie. Cette décision a été aussi décriée par certains partis politiques et une partie de la société civile en Tunisie. Cependant, Marzouki croit dur comme fer, en panarabe et Maghrébin convaincu, que « nous avons besoin de nos frères Algériens, Marocains, Libyens et Mauritaniens » et la Tunisie « a pris l'initiative pour gagner ». « Nous somme dans l'obligation d'ouvrir l'espace maghrébin. C'est ça notre avenir », avait-il insisté dans son discours télévisé, affirmant que ce « cadeau est offert en prévision du prochain sommet de l'UMA », en comptant en retour sur la « générosité séculaire » des Algériens, Marocains et autres Maghrébins. Un premier jalon de la (re)construction de l'espace commun maghrébin Au-delà de l'interprétation politique en « interne » qu'on peut donner à cette décision lourde de conséquences, dans le contexte politique actuel dans lequel baigne la Tunisie, Moncef Marzouki veut donner l'exemple aux dirigeants du Maghreb pour redynamiser l'espace commun qui ne peut qu'être que bénéfique pour tous les pays de la région, estime Camille Sari, spécialiste de l'intégration économique maghrébine. « Il faut bien commencer par des initiatives de ce genre pour parvenir à l'édification de l'UMA », a-t-il indiqué dans une déclaration à Maghreb Emergent, exprimant une conviction que les autres pays maghrébins vont suivre « l'exemple ». Pour lui, l'Algérie comme tous les pays du Maghreb a son avenir dans un espace commun. Cependant, a-t-il ajouté, la Tunisie a non seulement posé une première pierre à l'édifice de l'UMA, mais aussi sa décision va avoir comme effet immédiat la relance de l'économie tunisienne « en reconstruction » après les bouleversements qu'elle a connu. Contrairement aux appréhensions de certains, Camille Sari soutient que ces « largesses » vont certainement accroitre les flux de touristes, des capitaux et des investissements. L'argument de la menace sur la sécurité intérieure de la Tunisie ne tient pas le coup selon lui. Surtout que l'accès au territoire tunisien par simple carte d'identité (sans passeport) sera assujetti à une coopération sécuritaire intermaghrébine. « Il faut combattre l'idée partagée par certains selon laquelle la construction d'un espace commun maghrébin va profiter à tel ou tel pays. Ça va bénéficier à tout le monde mais à des niveaux différents », a conclu notre interlocuteur. Nombre de lectures: 1606