C'est une infâme mascarade qui prévaut actuellement au centre anticancer de Constantine. Depuis la visite éclair au CHU Ben Badis, le 11 juin dernier, du ministre de la Santé, Djamel Ould Abbès, qui lui a permis d'avoir un aperçu de la misère et de la désolation régnant depuis des années au service de radiothérapie – qui accueille des milliers de cancéreux de 17 wilayas de l'Est, avec pour tout appareillage deux ridicules machines de (cobalt) poussives datant des années 1980 – rien n'a bougé, rien n'a été fait. Sous l'emprise d'une vive émotion (était-elle réelle ?), il avait donné instruction aux autorités locales de débloquer en urgence la situation du service de radiothérapie. En vain ! En quoi consiste ce problème qui vire au cauchemar ? Les travaux pour préparer le bunker devant accueillir les nouvelles machines au cobalt pour remplacer les anciennes, devenues complètement obsolètes, selon l'avis des oncologues, et même dangereuses, aussi bien pour les malades que pour le personnel, n'ont pas démarré. Où placer dans ce cas le matériel, dont une bonne partie a été livrée cette semaine (3 accélérateurs) et l'autre est en attente de dédouanement au port de Skikda ? C'est quoi la raison de ces interminables tergiversations qui hypothèquent allègrement la vie de milliers de malades, alors que le plus important a été fait, à savoir l'achat des équipements ? Selon des sources hospitalières, il s'agirait de lourdeurs bureaucratiques et de non-paiement de l'entrepreneur chargé des travaux en question, mais les patients y voient plutôt l'incurie et une indifférence immorale et abjecte. Sur les 6000 cancéreux en attente de rendez-vous depuis janvier dernier pour une radiothérapie, l'on tente actuellement de traiter 150 à 180 par jour dans des conditions inhumaines. Ils arrivent dans ce service sinistre dès 3h ; ils sont entassés comme du bétail dans les couloirs faisant office de salles d'attente, macérant dans une fournaise sans précédent. Beaucoup d'entre eux sont morts et d'autres feront des métastases durant l'insoutenable attente d'un rendez-vous, nous a-t-on fait savoir. Mais toutes ces raisons ne suffisent pas à provoquer un déclic salvateur. Ainsi, l'on assiste bel et bien à un massacre programmé. Farida Hamadou