Tahar Belabbès. Porte-parole du Comité de défense des droits des chômeurs (CNDDC) «Nous voulons le dialogue mais avec ceux qui détiennent le vrai pouvoir» El Watan le 13.03.13 - Certaines informations font état de l'annulation de la marche de demain. Qu'en est-il au juste ? Non. La marche aura lieu et les préparatifs vont bon train à travers toute la ville de Ouargla. Quant à la guerre médiatique que nous livrent l'administration et ses relais, cela ne nous donne que plus de force. Les jeunes et les chômeurs n'en sont que plus conscients de ce qui se trame contre leurs revendications légitimes. D'ailleurs, ils ne croient plus ni aux promesses ni aux décisions des responsables qui ne cherchent qu'à absorber la colère des jeunes. La campagne d'insultes gratuites et de désinformation contre notre mouvement nous a ramenés d'autres pans de la société qui veulent marcher avec nous le 14. - Quels sont les objectifs que vous vous êtes fixés et quelles sont vos principales revendications ? Notre principale revendication est la création de postes de travail pour les chômeurs. Nous avons aussi pour objectif de barrer la route aux opportunistes qui veulent utiliser nos problèmes sociaux à des fins personnelles et à ceux qui veulent séparer le Sud du Nord. Aujourd'hui, il y a une politique qui s'exerce à l'encontre des gens du Sud pour les pousser à adopter des positions extrémistes. Il y a des parties étrangères qui cherchent à ce que les gens du Sud demandent la scission. Nous, nous allons sortir dans la rue pour demander l'unité nationale parce que nous sommes isolés par le pouvoir algérien. - Le gouvernement vient d'annoncer une série de mesures en faveur des régions du Sud. Qu'en pensez-vous ? Nous ne croyons ni Sellal, ni son gouvernement, ni aucun responsable pour avoir eu une longue expérience de vaines promesses avec eux. Tous leurs décrets et décisions sont restés lettre morte. Rien ne s'est jamais concrétisé. Le meilleur exemple en est le programme du président de la République qui promettait 3 millions de postes de travail et qui ne s'est jamais concrétisé sur le terrain. Nous ne voulons pas d'un dialogue pour la forme. Nous voulons un dialogue avec les vrais responsables, ceux qui ont le pouvoir de décision. Nous voulons dialoguer avec ceux qui détiennent le pouvoir, le vrai pouvoir. Jusqu'à présent, nous n'avons eu pour réponse que la répression et le harcèlement de la part des services de sécurité et de la justice. - Vous ne craignez pas que votre manifestation soit réprimée par les services de sécurité ? Nous avons une longue expérience dans le domaine. Ni le harcèlement judiciaire ni les pratiques policières ne nous font peur. Il y a une cascade de procès un peu partout contre les chômeurs. Au départ, on pensait que c'étaient des dépassements de la part d'individus, mais à la fin, nous sommes convaincus qu'il s'agit d'une politique définie par l'Etat en guise de solution à nos problèmes. La répression ne nous fait pas peur. Aujourd'hui, nous tenons à lui transmettre ce message : «Nous sommes prêts pour la répression et la prison s'il pense que c'est cela la solution.» - Parmi vos revendications, figure en bonne place le départ de Abdelmalek Sellal. Pourquoi au juste ? Sellal ne nous a jamais écoutés, alors que nous ne réclamons que des postes de travail. Depuis que nous demandons le départ de Sellal, cela a créé une vraie tempête au sein du gouvernement et du pouvoir. Nous demanderons son départ tant qu'il ne s'occupera pas du dossier chômage. Notre problème est social pas politique... - Beaucoup de choses ont été dites, notamment sur Tahar Belabbès, ces derniers jours... L'administration a fait courir beaucoup de rumeurs sur moi. Cela fait partie de la guerre psychologique menée contre notre mouvement. A titre d'exemple, on a dit que j'étais à Genève, alors que je suis privé de passeport. Je ne peux même pas visiter la tombe de mon père mort au Caire il y a 9 ans, comment puis-je partir en Suisse alors ? Tout cela n'est pas nouveau. Ils disent que nous sommes des malfaiteurs mus par la main étrangère, mais moi je dis qu'il n'y a pas de mafia plus grande que celle qui vole les richesses du pays et exploite les hommes de ce pays. Ce sont eux qui sont complices avec les sociétés étrangères qui pillent les richesses de ce pays en hypothéquant l'avenir des générations futures. - Donc optimiste pour demain ? Evidemment. Nous sommes convaincus de la réussite de notre marche... - Un million de marcheurs ? C'est symbolique. Il est impossible de réunir un million de marcheurs dans une ville qui ne compte que 850 000 âmes. Nous avons dit un million par rapport à l'immense colère que nous ressentons et à la très grande injustice que nous subissons. Nous voulons des solutions radicales.