Ouargla est en ébullition à la veille de la marche de ce 14 mars. Deux camps se distinguent : celui qui prône l'annulation et celui qui termine les préparatifs de dernière minute. Ouargla. De notre bureau
Au moment où le noyau dur de Tahar Belabbès organise un regroupement populaire au quartier Gherbouz pour mobiliser les troupes, celui de l'aile Dechache Abdelkader, en compagnie des députés et sénateurs de la wilaya de Ouargla, organise une rencontre avec le nouveau wali pour appeler la rue au calme et reporter la marche d'un mois afin d'attendre la mise en place des mesures édictées par le Premier ministre. A Ouargla, des gens arrivent de partout, par bus ou par avion, pour vivre cet événement unique en son genre où un groupe de chômeurs veut la tête du gouvernement et refuse de céder à une nouvelle tentative de torpiller leur mouvement. Des journalistes qui découvrent Ouargla pour la première fois, des parlementaires et militants des droits de l'homme venus des quatre coins du pays et même Mme Benhabyles dépêchée en pompier. La dissidence au sein du mouvement des chômeurs a-t-elle porté un coup fatal à l'organisation de la marche ? Pour Tahar Belabbès, «les porte-parole accrédités par l'administration ont rejoint le comité de défense des chômeurs depuis peu et ont créé ce mouvement de dissidence sous prétexte qu'ils sont universitaires, donc plus aptes à porter la voix des chômeurs et prendre de bonnes décisions vis-à-vis des pouvoirs publics». Dechache Abdelkader affirme en revanche que «la hantise d'une manipulation politique ou un détournement d'un combat si précieux pour la dignité des chômeurs a poussé une large frange des chômeurs à se démarquer et reporter la marche à une date ultérieure tout en exigeant des décisions urgentes à Sellal». Les décisions de l'avant-veille ne sont donc pas suffisantes pour les deux camps qui mettent un bémol : les dissidents exigent le limogeage immédiat de M. Berrihane (directeur régional de l'ANEM) et le recrutement des 4000 chômeurs recensés à Ouargla dans un délai d'un mois afin d'amorcer un dialogue et concrétiser la satisfaction du reste des revendications concernant l'organisation du marché de l'emploi ; le groupe de Belabbès, quant à lui, ne fait pas confiance aux mesures annoncées par le gouvernement, déjà faites en 2004 et en 2007, selon eux. Pour le reste, le CNDDC estime que «les appels à la dissidence et cette soudaine oreille tendue des autorités tant locales que centrales ne répond en aucun cas à la revendication de l'emploi qui, elle, date de 2004 ; la main tendue des pouvoirs publics est en effet une réponse à notre appel au départ du gouvernement». Ainsi, explique Belabbès, «l'historique du mouvement des chômeurs démontre que de tout temps, le mépris des doléances des chômeurs a prévalu sur leur détresse». Le dialogue de sourds instauré par toutes les instances de l'emploi, poussant parfois les jeunes à tenter le suicide collectif et individuel, multipliant les procès en justice, n'a pas entamé la volonté du mouvement. Et même quand les autorités locales favorisaient le tout-sécuritaire en renforçant la présence des forces de l'ordre avec pour directive de casser les marches et meetings organisés ces derniers mois pour dénoncer la multiplication des arrestations et procès, la présence des chômeurs dans la rue n'a jamais été aussi forte. Et c'est cette détermination qui semble désarçonner le gouvernement aujourd'hui.