Des européens réduisent leurs achats El Watan le 06.06.13 L'Algérie n'est plus le fournisseur «sûr» de l'Europe en gaz. C'est du moins ce que laissent entendre des responsables de certains clients européens de l'Algérie. L'arrivée de nouveaux producteurs de gaz sur le marché fait planer des risques sur l'Algérie qui voit ainsi ses parts de marché dans le vieux continent se rétrécir comme peau de chagrin. L'agence Reuters a répercuté les dires de certains dirigeants italiens et espagnols qui accréditent, cette fois-ci sans la moindre gêne, leur volonté à réduire leurs approvisionnements en gaz depuis l'Algérie. L'Italie et l'Espagne comptent se réorienter vers de nouvelles sources, dont le niveau des prix est plus approprié à leur économie en crise. En d'autres termes, ces pays ont décidé de s'orienter vers d'autres fournisseurs, après avoir exercé vainement un forcing sur Alger afin de revoir la nature de ses contrats gaziers. L'Algérie est restée scotchée à son modèle de commercialisation de gaz, basé sur des contrats de long terme, dont les prix sont indexés à ceux du pétrole. Pour la précision, l'Italie et l'Espagne importent chacun un tiers de leur gaz depuis l'Algérie. «Nous avons besoin de nouvelles sources d'approvisionnement», a déclaré Leonardo Senni, chef du département de l'énergie au ministère du Développement économique de l'Italie. Les Italiens n'ont pas tardé à mettre à exécution leurs menaces lors du dernier accord gazier conclu entre ENI et Sonatrach. Le groupe italien a, en effet, annoncé, la semaine dernière, avoir conclu avec Sonatrach un accord prévoyant la réduction des volumes de gaz livrés en Italie. Il s'agit plus précisément de la révision de certaines «conditions contractuelles pour les années 2013 et 2014». Les Italiens entendent s'approvisionner désormais en gaz chez les Américains, des pays de l'Afrique de l'Est, de la Méditerranée orientale ainsi que de l'Australie. «L'Italie tente de diversifier ses sources d'approvisionnement en GNL», a déclaré de son côté Fulvio Conti, chef de la direction de l'italien ENEL. Il y a quelques jours, le patron de Sonatrach, Abdelhamid Zerguine, n'a pas hésité à reconnaître que «notre marge de manœuvre est difficile, car il n'y a pas de reprise économique forte et lorsqu'il n'y a pas de reprise forte, commander le marché n'est pas uniquement l'apanage de Sonatrach». D'autant plus que les experts et les analystes s'accordent à dire que l'on s'achemine droit vers un excédent durable de gaz sur le marché. A terme, le risque de voir le gaz de schiste américain inonder le marché contribuera, à coup sûr, à le bouleverser davantage. Cette donne exigerait de Sonatrach de revoir les prix de son gaz conformément à des clauses admissibles sur les marchés de l'énergie. L'Algérie aura inévitablement la corde au cou. Car le gaz américain est appelé à être plus compétitif puisque son prix sera indexé sur le marché libre (spot) américain qui est très en dessous des prix actuels. L'Algérie fait face déjà à une baisse de sa production et de ses ventes d'hydrocarbures depuis au moins 2011. Si les Espagnols venaient à matérialiser par les faits leurs vœux en emboîtant le pas aux Italiens, il serait imprudent que le ministre de l'Energie et des Mines, Youcef Yousfi, entretienne encore son optimisme quant à la capacité de Sonatrach de peser sur le marché. L'Algérie est l'Etat le plus dépendant parmi les pays de l'OPEP de ses recettes d'hydrocarbures. Les ventes du pays en pétrole et en gaz représentent 97% de ses recettes en devises. Ces revenus fournissent près des deux tiers du budget de l'Etat. Les experts d'Oxford Business Group font constater, dans un rapport diffusé cette semaine, que les niveaux de production d'hydrocarbures en Algérie «évoluent à la baisse et cela fait deux ans que la contribution du secteur à la croissance du PIB réel est négative». Si la situation sur les marchés fait avaler les pires couleuvres à l'Algérie, le discours politique se veut néanmoins rassurant. Le contraste est frappant. Exportations d'hydrocarbures en Europe : Les difficultés que rencontre Sonatrach pour vendre son gaz naturel en Europe, où ses principaux clients ont tendance à revoir à la baisse les quantités contractuelles vers ce qu'on appelle les minima, sont essentiellement dues à la crise économique qui y sévit. Le 28 mai dernier, le groupe italien ENI a annoncé être parvenu à un accord avec Sonatrach pour revoir à la baisse les volumes de gaz naturel contractuels pour les années 2013 et 2014. Selon des informations non encore confirmées, un importateur espagnol de gaz naturel algérien s'apprêterait à revoir à la baisse les quantités de gaz naturel achetées à l'Algérie. Depuis 2009, année où la crise économique a commencé à produire ses effets en Europe, qui est le marché naturel de Sonatrach. La production commerciale de l'Algérie, qui a été de 78 milliards de mètres cubes en 2011, était en recul de 3% par rapport à l'année 2010 durant laquelle elle avait enregistré une production de 80,4 milliards de mètres cubes. La baisse avait commencé en 2009, année où la production avait reculé de 6,2 milliards de mètres cubes à 79,6 après avoir atteint 85,8 milliards de mètres cubes en 2008. La consommation nationale a été de 28 milliards de mètres cubes en 2011, en hausse de 6,5% par rapport à 2010. En 2009, elle avait déjà atteint 27,2 milliards de mètres cubes. En 2011, l'Algérie a vendu à l'Italie 21,3 milliards de mètres cubes par gazoduc sur un total de 60,8 et 1,6 en GNL sur un total de 8,7 milliards de mètres cubes. Pour l'Espagne, les exportations de gaz algérien ont atteint 9,4 milliards de mètres cubes par gazoduc sur un total de 12,5 milliards de mètres cubes. L'Espagne a aussi importé d'Algérie 4 milliards de mètres cubes de GNL sur un total de 24,2 milliards de mètres cubes. Des exportations de gaz naturel qui ont atteint 3,7 milliards de mètres cubes ont été réalisées avec le Portugal, la Slovénie et la Tunisie. Les exportations de GNL vers la France ont elles aussi reculé. Alors qu'elles avaient été supérieures à 8 milliards de mètres cubes en 2006, en 2011, elles ont atteint 5,7 sur un total de 14,6 milliards de mètres cubes. Lies Sahar