Est-ce que le monde arabe n'existe que pour servir les autres, assurer au bon prix l'approvisionnement énergétique des puissances occidentales et laisser l'Etat clandestin d'Israël se construire aux dépens des palestiniens ? Alger, le Caire, Baghdad, Damas... depuis le printemps arabe,tout le discours des élites arabes tourne de manière à faire penser qu'en dehors de l'armée et des islamistes, il n'y a point d'autre alternative aux peuples arabes. Les peuples arabes sont-ils pour autant condamnés à cette bipolarité dont les modes d'articulation sont l'armée et l'islamisme ? Tout le monde arabe est réduit, conditionné par cette vision du militaire laïc, moderniste en train d'assurer la sécurité des biens et des personnes contre l'islamiste terroriste et djihadiste qui veut refonder la Califat. Les dirigeants arabes sont chimériques. Outre qu'ils refusent de sortir de leurs visions passéistes, ils pensent sincèrement qu'ils sont des atouts incontournables dans le jeu international. Ils pensent que sans eux, l'univers va s'écrouler. A les voir agir et gouverner leurs peuples avec ce paternalisme à la fois condescendant et rétrograde, on se demande si le Mur de Berlin est bien tombé. On se demande aussi si le printemps arabe a changé quoi que ce soit dans les habitudes des élites arabes, incapables d'envisager la moindre perspective et la moindre initiative sans l'aval des caporaux et des islamistes. De ce fait, les peuples arabes pensent naïvement que seuls les militaires et les islamistes ont cette légitimité pour présider aux plus hautes destinées de leurs pays. Les autres n'existent pas. C'est ce que nous ont montré les scrutins qui ont suivi le printemps arabe, notamment en Tunisie, Egypte, Tripoli... Si les élites algériennes ne changent pas de discours, ne renoncent pas à leur complaisance avec les généraux incultes et cupides, nous risquons de vivre la même expérience que celle de nos frères arabes de L'Egypte...Les minorités laïco assimilationnistes, séparatistes et danseuses du ventre dont l'influence ne dépassent pas la caserne ou elles ont été conçues, doivent cesser de brouiller les pistes et d'induire en erreur les esprits crédules : il existe en Algérie une troisième force qui représente la majorité écrasante du peuple ; une troisième force qui n'est ni contre les valeurs de l'Islam ni pour la pendaison en masse des caporaux. Et c'est cette troisième voie totalement affranchie des tutelles d'ici et d'ailleurs que nos élites doivent promouvoir. Il n'y a point de salut dans les stratégies de la violence et dans les complicités avec les régimes caporalisés. Outre les événements douloureux qui secouent l'Egypte en ce moment, il y a les enseignements de la guerre imposée par les militaires au peuple algérien. Le salut est dans le savoir, la science, le dialogue et surtout dans la refondation de vraies institutions comptables devant les représentations légitimes du peuple… C'est ce qu'auraient dit Hannibal et Ramsès aux tunisiens et aux égyptiens.