En dehors de toutes considérations passionnelles, les algériennes et algériens, ont-ils les capacités pour faire un bilan objectif de leur relation avec le Moyen Orient ? Il est claire que le Maghreb dans son ensemble, sera éternellement reconnaissant vis à vis d'un Moyen Orient qui a su nous transmettre le message coranique. Généreux et enthousiastes, les Amazighs adoptèrent l'islam ainsi que la langue arabe et se chargèrent rapidement de diffuser la nouvelle religion au sud vers le reste de l'Afrique et au nord vers l'Andalousie . C'est ainsi que les historiens s'accordent que sur les 16000 soldats musulmans ayant conquis le sud de l'Espagne, 12000 étaient des Amazighs nouvellement convertis. Il est à noter que l'adoption de la langue arabe en sa qualité de langue du Coran par les populations amazighs, s'est faite progressivement le long des 14 siècles . Ce phénomène d'arabisation continue de nos jours à toucher les familles maghrébines. Dans de nombreuses familles, alors que les grands parents s'expriment toujours en Amazigh, les petits enfants naissent arabophones . Ces données montrent que l'appartenance maghrébine à l'arabité est d'ordre culturel et non pas ethnique. Autrement dit, à quelques exceptions près, les maghrébins sont des descendants d'amazighs arabisés culturellement par l'islam . Sur le plan politique, à l'exception des époques des Mourabitounes et des Mouwahidounes qui étaient deux dynasties amazighs, le Maghreb a toujours été considéré par le Moyen Orient comme une simple province rattachée aux dynasties de Damas ou de Baghdad . En effet, berceau des trois religions monothéistes, le Moyen Orient a toujours représenté pour le Maghreb cette flamme qui illumine son chemin et l'exemple qu'il s'est fixé de suivre. Sauf que depuis le 13e siècle, ce même Moyen Orient sombre sous les effets du sous-développement, des dictatures et du fanatisme religieux . Alors qu' en dehors de l'époque Fatimide qui a vu l'Afrique du nord flirter brièvement avec un Chiisme promu par des prédicateurs venus du Moyen Orient, le Maghreb n'a connu depuis sa conversion à l'islam que le Malikisme et l'Ibadisme, il est à constater que le Moyen Orient a transformé l'islam en tendances qui ressemblent de plus en plus à des sectes généralement en guerre les unes contre les autres . C'est ainsi que Ismailites,Alaouites,Yazidites,Chiites,sunnites,salafistes,Wahabites,frères musulmans, Kotbistes…se bousculent , se font concurrence et aspirent séparément ,chacun à sa manière à imposer sa propre vision de l'islam à tout le monde musulman . Ces différentes versions de l'islam, débouchent sur un climat idéologique moyen oriental tendu sur lequel viennent se greffer un ensemble d'églises aussi variées que rivales, représentées par les églises Maronite, Grecque Orthodoxe, Grecque, Catholique, Arménienne Orthodoxe, Arménienne Catholique,Syriaques,Protestante,Latine,Coptes,chaldéenne,nestorienne… Et comme un malheur ne vient jamais seul, s'invite alors à ces cocktails idéologiques moyen orientaux explosifs, un nationalisme arabe aussi hégémonique que dévastateur représenté d'un côté par les versions rivales irakiennes et syriennes du baathiste et de l'autre par le nassérisme ! Après l'occupation de l'Irak, la destruction de la Syrie, l'instabilité aigue qui secoue l'Egypte et la transformation des pays du Golfe en de simples annexes des renseignements américains, que doit faire le Maghreb pour se préserver d'un Moyen Orient qui certes nous a fait découvrir le Coran, mais qui s'avère aujourd'hui une région qui n'a plus rien à exporter en dehors de ses contradictions et ses conflits ? Il est à rappeler que les Etats unis d'Amérique, sont nées suite à une idée de rupture vis à vis d'une Angleterre vieillissante et corrompue. L'Iran n'a pu se préserver de l'hégémonie Ottomane que grâce à Ismael 1er, le fondateur de la dynastie Safawide en 1501,qui imposa le Chiisme à son pays dans le seul but de s'opposer au Sunnisme utilisé par les Califes Ottomans pour justifier les dominations qu'ils exerçaient sur les autres peuples musulmans . De ce fait, le Maghreb et particulièrement l'Algérie, ne pourront échapper aux contradictions et aux conflits culturels, idéologiques et politiques en provenance du Moyen Orient, qu'en se dotant d'une culture enracinée, fédératrice et spécifique à notre région. Ce projet est à rechercher dans nos origines amazighs et dans les travaux des deux réformateurs de l'islam que sont Bennabi et Arkoun . Cette démarche préservera notre appartenance à une culture arabo-islamique authentique et aura pour mérite de faire de notre amazighité à tous , un moyen de rassemblement et de défense et non pas de discorde . L'avenir de l'Algérie se jouera au Maghreb . Il dépendra de nos capacités à consolider l'axe allant d'Alger à Rabat qui représente le support de tout projet d'union maghrébine. Le problème est que ni la France, ni les Etats unis d'Amériques , ni l'Arabie Saoudite, ni les régimes autoritaires d'Alger et de Rabat ,ne sont favorables à des relations algéro-marocaines fondatrices du grand Maghreb et ce contre la volonté et les intérêts des peuples de notre région . Pourtant ce n'est qu'une fois le Maghreb stabilisé dans le cadre d'une union démocratique de ses peuples et de ses Etats, qu'il pourra tendre le bras au Moyen Orient dans le but de l'aider à régler ses différends idéologiques et politiques tout en lui proposant une version de l'islam purifiée de tous les excès .