3 Mai 2015 Publié par Saoudi Abdelaziz http://www.algerieinfos-saoudi.com/ En 2011, un sondage de la ligue des droits de l'homme indiquait que seuls 5,7% des personnes interrogées étaient satisfaits de la couverture médiatique des affaires de corruption. « La presse elle-aussi n'a rien vu, Khalifa est l'emblème de son échec »écrivait il ya a quelques jours l'ancien éditorialiste d'un quotidien. Y a-t-il eu un changement de vision chez les lecteurs en 2015, à l'heure des comptes rendus quotidiens des grands procès visant la corruption? Notre blog tente depuis sa création de suivre la presse écrite francophone dite indépendante et d'en mesurer la véracité. Quelques flashs backs. 14 décembre 2011 Sondage corruption : justice, police et presse mis en cause Le sondage effectué par la LADDH tord le coup à la mode sociologique qui était de considérer que la société algérienne « rentière » est « complice » de cette pratique. Considérée comme un "crime" pour 82% des sondés, la corruption n'est pas suffisamment sanctionnée à leurs yeux puisque 85% considèrent que les peines prononcées dans les affaires de corruption sont "légères". Si le sondage met donc nettement en cause l'indépendance de la police et de la justice par rapport aux groupes de pression, les sondés n'épargnent pas la presse dont l'insuffisance est pointée par 56,1% des sondés. Seuls 5,7% sont satisfaits de la couverture médiatique des affaires de corruption. 13 août 2012. La presse algérienne ne dérange pas les pouvoirs (13 août 2012) Le chroniqueur Slimane Laouari écrit dans Le Temps d'Algérie : « Il n'y a pas d'information crédible et «sourcée», il n'y a pas d'investigation, il n'y a pas de grands reportages ! Tout le monde sait que c'est l'information et non le commentaire qui peut déranger le pouvoir politique et les intérêts mafieux . » Rude constat sur l'état de la presse algérienne. Le chroniqueur notait d'abord ironiquement: » Plus de deux décennies après l'ouverture de la presse écrite au privé et la profusion de titres qui en a résulté, les observateurs politiques et professionnels étrangers en sont toujours à «reconnaître» la liberté de ton des journaux algériens, rare, disent-ils, «dans le monde arabe et en Afrique». 28 avil 2013 Les journaux algériens sont « menés en bateau » par les clans du sérail C'est ce qu écrit K. Selim dans son dernier édito du quotidien d'Oran. Le journaliste prend ses distances avec l'immersion dans le sérail d'une presse écrite pourtant auto-proclamée « indépendante ». Dans la réalité, dès qu'il s'agit du fonctionnement du système politique, les journalistes politiques sont bridés par des patrons de presse naviguant dans le système et ouverts aux sollicitations des clans dominants. A la veille d'échéances politiques, « les bonnes sources » se déchaînent. Des journalistes, en harmonie avec ces patrons-de-presse-hommes d'affaires, acceptent d'être menés en bateau et d'intoxiquer leurs lecteurs. K. Selim rompt l'omerta et met les pieds dans le plat. Salutaire. Dans son édito intitulé Schmilblick, il écrit notamment: « Non, le schmilblick, celui du «code», celui des«initiés», celui qui veut faire participer la «foule» sans l'éclairer, en la menant par le bout du nez, en lui désignant des «méchants» à défaut d'être en mesure de lui montrer des bons. Certains aiment et pensent que c'est le nec plus ultra de la politique. A chacun ses goûts. Pour ceux qui savent que depuis l'assassinat d'Abane Ramdane l'Algérie a un problème de «règles», ce schmilblick suscite une répulsion légitime. Pour ceux qui savent que l'Algérie a un sacré problème de transparence dans la gestion du domaine public et des deniers de la communauté et même de la ressource humaine, le spectacle des«révélations» qui s'alignent dans la presse n'a rien de réjouissant. Certains même – c'est une suspicion légitime qui remonte à loin – s'inquiètent que des jeux de mots on passe aux jeux de mains ». (Le quotidien d'Oran) 22 juillet 2013 La presse indépendante change d'officier traitant Selon TSA, qui tient l'information de « de sources sûres », le colonel Faouzi, responsable de la presse au DRS, a été relevé de ses fonctions mardi dernier. Le colonel Faouzi avait la gestion directe des relations avec la presse et surtout la gestion de la manne publicitaire publique via l'Anep. Il lui est reproché sa « proximité » avec des journaux algériens qui ont diffusé des informations jugées alarmistes sur l'évolution de l'état de santé du Président. Il a été remplacé par le colonel Okba, toujours selon TSA. 19 septembre 2013 ALGERIE-La faillite des journaux « indépendants » La fin de l'emprise des services secrets sur l'Etat et la société est perçue de plus en plus en Algérie comme la condition principale pour asseoir une gestion rationnelle des affaires du pays dans le cadre de la progression de l'Etat de droit. C'est devenu l'exigence vitale centrale du développement national. Les récentes mesures de restructuration du DRS sont, pour le blogueur, la bonne nouvelle de la rentrée. Ces premiers changements vont dans la bonne direction, même si ils ont été provoqués par la gestion quasi-séditieuse de la crise politique née de la maladie du chef de l'Etat. Gestion séditieuse relayée par les journaux « indépendants » sous influence qui ont soumis les Algériens à un véritable bombardement apocalyptique. Les derniers mois ont mis à l'épreuve la capacité des rédactions à donner les informations permettant de mesurer les enjeux politiques qui concernent les Algériens. Les journaux « indépendants » ont failli à cette mission. Jusqu'ici, pour informer sur les luttes politiques et en dégager les tendances les plus significatives, ces journaux choisissent le raccourci de « sources » provenant du DRS, de la présidence ou de l'Etat-major. Ou de systèmologues attitrés, dont les pronostics, servant à étayer l'opération médiatique spéciale du moment, sont toujours démentis. Aujourd'hui, la presse « indépendante » souffre d'une crise de crédibilité inédite, vingt ans après sa mise en place sous le contrôle des services secrets. L'échec devenu patent du « journalisme de sérail », pourra-t-il libérer les vrais journalistes, qui défendent la déontologie du métier. Les mesures de réorganisations du DRS même si elles peuvent se traduire conjoncturellement par un desserrement de l'emprise sur les rédaction, ne garantissent pas la liberté de la presse car tout pouvoir est par nature enclin à contrôler ce qui se dit. 1er novembre 2013 LA « HARGA » DES JOURNALISTES ALGERIENS Editorialiste au Quotidien d'Oran, M. Saadoune explique pourquoi les journalistes algériens sont incapables de dire à leurs lecteurs ce qui se passe vraiment dans le pays. Il réagit à un billet paru dans le blog (le « vieux militant du Pags » c'est moi). L'exil en inter Extrait « Les lecteurs des journaux algériens meurent d'ennui. C'est ce qu'a écrit, hier, sur son blog, un vieux militant du PAGS qui scanne chaque matin la presse nationale. Un exercice fort usant car au fond, le système est tellement immobile que les journalistes en arrivent, avec les variantes d'usage, à réécrire jusqu'à l'ennui le même papier. Comme dans les années du parti unique «officiel», on choisit de «s'exiler» dans l'internationale pour suivre, commenter ou analyser une actualité qui bouge et où des surprises viennent perturber le cours des choses. Sous le parti unique «officiel», on s'occupait de l'internationale par refus d'écrire des articles présumés «politiques» qui consistaient en général à faire le «pointage» des activités des responsables officiels : des hommes, le plus souvent, assis, presque toujours, sentencieux, tout le temps. On plaignait ceux qui étaient de «corvée» et qui devaient «payer» parfois par des sanctions le fait d'avoir oublié de mentionner qu'untel était membre suppléant du comité central.L'inter, c'était comme entrer dans un roman à rebondissements. Et certains s'offraient même et offraient aux lecteurs qui s'ennuyaient. la possibilité de vivre, par procuration, la vie politique d'autres pays ». ( le Quotidien d'Oran) 5 mai 2014 La « tare originaire » de la presse algérienne Extrait d'un entretien avec Redouane Boudjemaa, professeur à la faculté des sciences de l'information et de la communication d'Alger. Entretien réalisé par Madjid Laribi et paru dans Libre Algérie sous le titre « Il n y a pas de presse libre... il y a quelques journalistes libres ». (…) Après les événements sanglants d'octobre 1988, certains journalistes, issus des médias du système, sont devenus des patrons de presse. A la naissance de cette presse dite indépendante, les cadres politiques et juridiques étaient ceux hérités du parti unique qui se caractérisaient par les monopoles sur l'impression, la distribution et la publicité. C'est, dans son idéologie comme dans ses structures, une presse libre et dépendante ! Cette tare originelle va s'exacerber avec la remise en cause des avancées démocratiques. Suite à la crise politique de 1992 et l'arrêt du processus démocratique, le pouvoir en place distribue de la publicité en contre partie du soutien à sa démarche. Les journaux qui ne s'inscrivent pas dans cette ligne sont éliminés économiquement. On achète le silence, et la collaboration, des journaux grâce à la rente publicitaire. La presse privée fait partie intégrante du système et elle reflète ses réseaux et les contradictions qui les minent (…) 16 juin 2014 Sélection algérienne des espèces. Comment a disparu l'hebdomadaire local Jijel-Infos Témoignage de saoudi Abdelaziz En 2001, après le recul décisif de la fitna dans ma ville natale, j'avais créé Jijel-infos, un hebdomadaire local. Le journal était imprimé à Constantine par l'imprimerie publique de l'Est. Je voudrais témoigner aujourd'hui de la rigueur de gestion de cette imprimerie. Sur ordre supérieur, selon son gestionnaire, elle imposait au nouveau venu le paiement par avance de l'impression de Jijel-infos. Le feu vert n'était donné au tirage que lorsque le regretté Mokhtar Zine faisait parvenir à Constantine, par fax, la copie du virement bancaire payant la prestation. Je voudrais aussi dans la foulée mentionner la rigueur assassine de l'ANEP à l'égard de cet hebdomadaire. Après avoir tâté le terrain, elle avait refusé à Jijel-Infos la petite pub régulière qui aurait permis d'éviter l'asphyxie. Même les annonces de coupure Sonelgaz concernant la ville de Jijel lui étaient refusées. Le colonel DRS de l'ANEP, alors lui même Jijélien dit-on, les faisait publier par des quotidiens nationaux. Quant à la pub des patrons locaux sous influence, en dehors de Tebibel rien à faire… C'est ainsi que disparut-par « sélection algérienne des espèces »- l'hebdomadaire Jijel-Infos qui n'a pas vécu plus de sept mois, à cause de son ignorance des règles de survie auxquels étaient astreints les patrons de presse, règles régies par « l' alchimie pour tous », rappelée récemment par le patron du Quotidien d'Oran. 7 Avril 2015 Affaire Khalifa. « La presse, elle aussi, n'a rien vu ». Mohamed Saadoune, l'ancien éditorialiste du Quotidien d'Oran, évoque la recette Khalifa, dans le Huffpost : « C'est cette combinaison de l'affairisme, de la complaisance politico-médiatique et de la neutralisation des mécanismes de régulation qui rendait -et rend toujours- cette affaire sulfureuse. Malgré la réglementation, les fonds des organismes publics ont quitté le Trésor et les banques publiques pour aller vers une banque privée. La presse, elle aussi, n'a rien vu. Khalifa est l'emblème de son échec, internet et les réseaux sociaux n'étaient pas encore là pour la contraindre au minimum professionnel de pudeur. Car en avril 2002 au moins, l'insolvabilité de Khalifa Bank était déjà une « information » mais elle a été mise sous embargo. Entre-temps, de nouveaux déposants, qui ne possédaient pas l'information, ont continué à être attirés par l'aimant des taux d'intérêt de Khalifa Bank et de sa réputation de société « bénie » par les pouvoirs. Ils auraient pu sauver leur fonds si le « job » de l'information a été fait. Khalifa c'est un miroir grimaçant pour la presse aussi. (huffpost-algérie) * facebook * twitter * google+