A'ûdhu bi Llâhi min ash-shaytâni ar-rajîm Je demande la protection de Dieu contre Satan le lapidé. Par Tahar Gaïd « Sois indulgent, ordonne selon les convenances, mais écarte-toi des idolâtres. * Si une quelconque agacerie te vient de Satan, cherche alors refuge en Dieu (contre lui) : Il est Entendant, Connaissant. » (S.7, 199 et 200) « Repousse ce qui est mauvais par ce qui est meilleur. Nous sommes mieux que personne Informé de ce qu'ils (les associationnistes) fabulent. * Dis : Seigneur, en Toi est mon refuge contre les pressions de Satan. * En Toi est mon refuge (y compris) contre son approche. » (S.23, 96 à 98) « Belle et mauvaise action ne s'équivalent pas : repousse donc (la mauvaise) par une belle action. C'est alors que l'inimitié de celui qui s'opposait à toi prend les traits d'un allié chaleureux. * Une telle (magnanimité) n'est rencontrée que les patients et le bénéficiaire d'une chance insigne * Si une démoniaque démangeaison te démange : réfugie-toi en Dieu car Il est l'Entendant, le Connaissant. » (S.41, 34 à 36) Le sens de cet ensemble de versets indique que Dieu ordonne de se comporter d'une manière convenable, y compris avec l'ennemi. Cette courtoise attitude envers lui pourrait réanimer sa nature originelle et le ramener ainsi à de bons sentiments. Par contre, Dieu commande de se prémunir chaque fois contre Satan en se réfugiant en Lui. C'est ce que cet être diabolique a juré la perte du genre humain à partir du moment où il refusa de s'incliner devant cette merveilleuse création qu'est l'Homme. En effet, Iblîs, s'adressant au Seigneur, dit à propos de tous les êtres humains : « Alors, par Ta toute-puissance ! Puissé-je tous les fourvoyer * sauf, parmi eux, Tes adorateurs dévoués. » (S.38, 82 et 83) S'il est possible de remédier aux maux et préjudices causés par l'homme et d'en faire ensuite de ce dernier un ami, il n'en est pas de même du Diable. Celui-ci, aussi vindicatif que revanchard, n'accepte aucune conciliation susceptible d'établir de bonnes et fructueuses relations avec lui, sachant que sa seule et unique préoccupation consiste à nuire aux fils d'Adam, en raison de cette forte animosité qu'il a éprouvé à l'égard de leur père. C'est bien pour s'épargner cette nuisance que le Seigneur de l'univers avertit ainsi l'être humain : « Ô fils d'Adam ! Que ne vous séduise pas Satan comme il le fit avec vos parents ; il les fit sortir du Jardin en leur ôtant leur vêture, découvrant ainsi leur honte. Car, il vous voit lui et sa gent, par où vous ne le voyez point. Nous avons donné des diables comme protecteurs aux incroyants. » (S.7, 27) ; « Satan vous est ennemi. Traitez-le en ennemi. Il n'applique sa clique qu'à devenir des compagnons de l'Enfer. » (S.35, 6) ; « Le prendrez-vous, lui et sa descendance, comme protecteurs au lieu de Moi, quand ils vous sont ennemis ? » (S.18, 50) Satan, étant l'ennemi irréductible de l'homme, il cherchera, par tous les moyens, à l'écarter du droit chemin. Il ne manquera pas de s'interposer entre lui et son salut. Et qui a-t-il de plus sûr garant contre l'égarement, si ce n'est la fidélité à la Parole de Dieu. Aussi convient-il de se protéger contre ses manœuvres diaboliques au moment d'entamer la récitation du Coran. A cet effet, Dieu dit : « Quand tu veux psalmodier le Coran, demande à Dieu asile contre Satan le lapidé. * Satan n'a nul pouvoir sur ceux quoi croient, font confiance à leur Seigneur. *Son pouvoir se borne à ceux qui le prennent comme protecteur, à ceux qui, par lui, se font associationnistes. » (S.16, 98) En évoquant Dieu, lors de la lecture du Coran, donc également au moment de s'acquitter de la salât quotidienne, l'Orant s'assure de Sa protection. Le Prophète (s) donnait l'exemple, lui qui, en dépit de sa perfection, n'échappait pas aux agissements perfides de Satan. Quand il se levait, la nuit, pour s'acquitter de son devoir religieux, il avait pour habitude de dire après le takbîr (Allâhu Akbar) : Subhâna Allâhumma wa bi hamdika, wa tabaraka ismika, wa ta'âla jidduka, wa lâ ilâha ghyruka. (Gloire à Dieu ! Que Tes louanges soient exaltées, que Ton nom soit béni et que la et (sagesse) de Tes actes soit élevée. Il disait ensuite trois fois de suite : « Lâ ilâha illâ-l-lLâh » (Il n'y a de dieu que Dieu), suivi de : « A'îdhu bi-l-Lâhi as-Samî' al-‘alîm, mina-sh-shaytâni ar-râjîm, min hamzihi, wa najkhihi, wa nafthihi (Je me réfugie en Dieu, l'Entendant, le Connaissant, contre Satan le lapidé, contre son aliénation mentale, son souffle (démoniaque) et son crachat (venimeux). » La plupart des ‘uléma font de l'isti'âdha un acte recommandable et non point obligatoire ; son observance ne relève pas, disent-ils, des péchés reconnus. Certains avancent que l'assiduité de son énoncé incombait principalement au Prophète (s) et ne s'imposait donc pas à sa communauté. Aussi, Ibn Sayrîne admet que sa formulation une fois dans la vie suffit, ce qui entraîne la levée de l'état de nécessité. Par contre, ar-Râzî repousse ces opinions et déclare que du moment que le Prophète (s), étant le modèle des pratiques cultuelles, il est alors du devoir du croyant d‘en faire usage lors de la salât et chaque fois qu'il récite le Coran. C'est que la pratique de l'isti'âdha s'érige en rempart contre les assauts de Satan et contrecarre, dès lors, ses malicieux agissements. C'est dans cette perspective que la persévérance, dans sa formulation, devient obligatoire. Ash-Shâfi'î dit qu'al-isti'âdha se prononce à haute voix à la manière d'Abâ Hurayra ou récitée à voix basse, en suivant l'exemple d'Ibn ‘Umar. Dans un cas comme dans l'autre, il n'y a aucun préjudice, dit-il. Toutefois, la question qu'il se pose consiste à savoir s'il est vraiment obligatoire de la formuer à chacune des raka'ât de la salât ou seulement au moment de l'accomplissement de la première d'entre elles. Sa réponse est à la fois positive et négative, tout en privilégiant la seconde solution. Ainsi, il suffit de dire une seule fois : a'dhû bi-l-Llâhi min ash-shaytânî ar-rajîm = Je demande la protection de Dieu contre Stan le lapidé. Abû Hanifa s'accorde avec ash-Shâfi'î sur ce dernier point. Ath-Thawrî et al Awzâ'î nuancent la formule et prononcent ainsi : asta'îdhu bi-l-Llâhi min ash-shaytâni ar-rajîm, inna-l-Llâha Huwa as-Samî' al-aqlîm. Il faut dire que l'énoncé de l'isti'âdha aide à purifier ce qui sort de la bouche, sachant qu'avant d'aborder la salât, elle pourrait être souillée, entre autres, par des paroles de méchancetés ou des propos licencieux. Il adoucit, par conséquent, ce qui sort de la bouche. Ceci est d'autant plus agréable que l'orant s'apprête à réciter la Parole de Dieu. De plus, la demande d'aide, qui s'y contient, représente la reconnaissance, d'un côté, de la puissance du Seigneur des mondes et, de l'autre, la faiblesse de Son serviteur ainsi que son incapacité à lutter contre cet ennemi implacable, tout à la fois apparent et invisible. Il est vrai que Seul Dieu, étant Son Créateur, est en mesure de le repousser. A ce sujet, il est dit dans le Coran : « Seigneur, dit Iblîs, de ce fourvoiement font Tu m'accables, je jure de me parer sur la terre à leurs yeux, de sorte à les fourvoyer tous * à l'exception de Tes adorateurs dévoués. » Dieu dit : « Voici, J'en réponds, une voie de rectitude :* que tu n'aies sur Mes adorateurs aucun pouvoir, sauf sur les fourvoyés qui t'auront suivi. * La Géhenne sera leur synode général ». (S.15, 39 à 41) En effet, al-isti'âdha consiste à se réfugier auprès de Dieu, le Très-Haut, le Tout-Puissant, pour lui demander secours et assistance contre les maux provoqués par tous les malfaisants. Elle comporte effectivement deux aspects : al ‘iyâdh (le refuge) implique le refoulement de la vilenie et al-liyâdh (le retranchement) dans le but d'attirer le bien vers soi. Autrement dit, le croyant s'adresse à Dieu et l'implore de l'assister de sorte que Satan ne le plonge pas dans l'impiété ou ne lui fasse pas commettre des impuretés sur le plan spirituel et temporel ou encore l'accule à entreprendre, malgré lui, des actes répréhensibles. Afin de bien saisir les néfastes conséquences de Satan, il convient de comprendre le sens de shaytân. Il dérive de shatana qui veut dire s'éloigner de...En effet, la nature de Satan est celle d'éloigner le genre humain du bien et du convenable, tant du point de vue du mode de vie que du comportement moral. D'aucuns disent que le nom dérive plutôt de shâta parce que le Démon a été créé de feu. D'autres admettent les deux points de vue. En fait, le premier semble le plus correct car les Arabes disaient « tashaytana (dérivation de shatana) et non pas tashîtu (dérivation de shâta) à quelqu'un dont les actes s'identifient à ceux du Diable. Aussi se nomment-ils shaytân (plu. shayatîn) toute être, djinn, homme ou animal, qui fait montre de révolte. C'est d'ailleurs dans ce sens que le Coran l'emploie : « Ainsi dressons-Nous en ennemis de tout prophète des satans d'entre les humains et les djinns, les uns soufflant aux autres des joliesses de langage, en pure illusion... » (S.6, 112) Le Prophète use aussi ce terme pour indiquer la nature diabolique de certains hommes, bien qu'ils soient créés de terre et d'eau. Ce nom leur est appliqué à cause du mal qu'ils commettent aux autres, aussi de leur méchanceté, voire de la haine qu'ils éprouvent à l'égard de leurs semblables et de la révolte dont ils font preuve vis-à-vis de la Loi de Dieu. « Ô Abû Dhar ! Demande la protection de Dieu contre les shayâtîn, qu'ils soient humains pu djinns », a dit le Messager de Dieu (s). Cet événement montre que le terme shaytân désigné aussi les animaux en proie à des accès de fureur ou secoués par de fortes agitations. Ainsi, un jour que ‘Umar Ibn al-Khattâb monta sur un cheval de charge. Celui-ci se mit à dandiner et à ruer si fortement que le cavalier ne pout rester dessus. ‘Umar dit alors à ses compagnons : « Vous m'avez fait porter par un shaytân ». Il reste à expliquer le mot rajîm = marjûm. On dit qu'il a pour sens râjim du fait que Satan harcèle les croyants de ses susurrements ravageurs, de la même manière qu'on lance contre l'ennemi des projectiles destructeurs. En fait sa signification la plus correcte se traduit par « lapidé » mais aussi par « chassé de toutes les formes du bien », comme le mentionne, entre autres, ce verset : « Nous avons posé dans le ciel des châteaux (des constellations) que Nous parons aux regards * et préservons de tout satan lapidé * à moins que l'un d'entre eux n'en dérobe l'écoute, mais alors le pourchasse un éclatant météore. » (S.15, 16 à 18)