Après la campagne polémique de l'an dernier, le ministère de la Santé a lancé une autre campagne de vaccination contre la rubéole et la rougeole pour près de 5 millions d'enfants âgés de 6 à 14 ans dans tous les Etablissements publics de santé de proximité (EPSP). Une campagne qui a encore échoué, de l'aveu même du directeur de la prévention et de la promotion de la santé au ministère. Ilhem Tir- Constantine- (Le Soir) - Comment expliquer les réticences multiples et de plus en plus marquées aux différentes campagnes lancées pour la vaccination ? Pourquoi y a-t-il des professionnels de santé qui vont refuser la vaccination à leurs enfants ? La décharge exigée par les directeurs d'établissements en mars 2017 comme préalable à la vaccination a créé un véritable frein et le constat est alarmant. Pour cette dernière campagne, le ministère de la Santé avait décidé qu'elle ne se déroulera pas au sein des établissements scolaires pour éviter la polémique et la psychose qui ont entouré la campagne de 2017. «C'est, là, un premier faux-pas», estime le Dr B. Mohamed Habib qui s'est demandé «Quel est l'intérêt d'une vaccination scolaire qui se passe durant les vacances scolaires». Il ajoute : «Le manque d'information ou la désinformation est à l'origine de la réticence même pour les professionnels de la santé car l'information n'est pas toujours accessible et, généralement, on apprend le décès d'un patient ou le rejet d'un produit par la presse et non pas par les canaux internes, à savoir la Direction de la santé, le ministère ou le centre de pharmacovigilance.» Pour cette dernière campagne, le ministère de la Santé avait annoncé avoir déployé, en coordination avec le ministère de l'Education nationale, tous les moyens matériels et humains. Les équipes médicales ont été renforcées pour aider les staffs des services de la santé scolaire et tout un programme de sensibilisation a été mis en place via des flashs publicitaires sur les chaînes de la Radio nationale et locales ainsi que la distribution de dépliants aux parents. Un effort qui s'est avéré incomplet en l'absence de répondant au premier jour de cette campagne passée inaperçue pour ne pas dire dans l'indifférence totale des parents d'élèves qui précisent qu'ils n'ont pas été informés au préalable. Après les vacances, les parents se sont montrés sceptiques une fois encore. «Je ne suis pas au courant et mon fils ne m'a remis aucune convocation ou rendez-vous pris pour un éventuel vaccin», a souligné Mme Hadj Brahim Saïda, une parente d'élève et présidente de l'association des parents d'élèves d'un CEM à la nouvelle ville Ali-Mendjeli. De son côté, M. Filali, père de 3 enfants scolarisés à la cité Elbir, s'est demandé «pourquoi on vaccine nos enfants alors qu'ils l'ont été déjà. S'agit-il d'un rappel ? On ne sait rien avec ce qui se passe de nos jours, je préfère ne pas le faire.» M. Filali n'est pas seul dans son raisonnement, un autre cadre universitaire témoigne : «J'ai demandé un avis à mon voisin qui est médecin mais lui aussi ne l'a pas fait pour ses enfants, alors...» Par ailleurs, Mme Bader, une enseignante dans le cycle primaire, affirme ne pas recevoir de consignes de la part de la direction de son école pour sensibiliser les élèves et leurs parents. Du côté des EPSP, aucun engouement n'a été enregistré selon les responsables mêmes. Certains parents ayant accompagné leurs enfants au niveau de la polyclinique de la cité Boussouf de Constantine confient avoir vacciné leurs enfants sans hésitation alors que beaucoup affirment avoir «préalablement demandé l'avis d'un pédiatre». Les réticences sont multiples et des fois, les parents se retrouvent face à un dilemme. C'est le cas de M. Foughali, commerçant et père de 4 enfants tous concernés par la vaccination. Ce dernier refuse, pour le moment, l'idée de les soumettre à ce double vaccin contre la rougeole et la rubéole, par peur, dit-il, qu'ils réagissent mal au produit. Pour le Dr Dridi Amel, médecin dans une polyclinique, «la rumeur est à l'origine de la réticence mais le médecin ou le professionnel de santé de proximité peut parvenir à la contrer». Elle estime que «la vaccination repose sur une bonne communication et il faut savoir que tout produit a des effets secondaires et que le risque zéro n'existe pas». Donc, l'échec des campagnes de vaccination est-il dû à une mauvaise communication dès le départ ? I. T.