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«Le scoutisme est une passion, un art de vivre et un don de soi»
Entretien avec Miloud Touati :
Publié dans Le Soir d'Algérie le 13 - 03 - 2018

Miloud Touati est un «vieux» scout qui a gardé pour le mouvement un amour intact. C'est l'un des pionniers du scoutisme de l'après-indépendance dans la région de Djelfa. Il vient de publier un livre qui présente les grands axes de cette organisation et raconte son développement à travers le pays des Naïlis et l'Algérie. Dans cette interview, il nous livre des bribes sur l'histoire des scouts dans la région de Djelfa et livre ses impressions sur l'état actuel du scoutisme SDF et son avenir.
Le Soir d'Algerie : Pourquoi ce livre maintenant et à qui s'adresse-t-il?
Miloud Touati : L'idée d'écrire ce manuel m'est venue lors d'un rassemblement de scout des pays du Maghreb à Ghardaïa. Ayant remarqué que les interventions techniques étaient en dents de scie, j'ai consulté timidement feu le Dr M. Kaddache pour connaître son avis. Il m'a encouragé et même félicité pour cela. A mon retour à Djelfa, j'ai commencé un travail de fourmi en allant faire le porte à porte au domicile des chefs les plus âgés, c'est-à-dire les créateurs du scoutisme de Djelfa. J'étais bien reçu et ces derniers m'ont apporté toute leur aide et leur sympathie. Ce livre est écrit dans les deux langues arabe et français. Il est le troisième de son genre en Algérie et le premier en langue arabe car il est destiné aux cadres et leurs éléments d'active qui ont reçu l'enseignement en arabe plus que le français. La partie en arabe est celle qui vient d'être éditée, quant à la version en langue étrangère, elle connaîtra son édition pendant les prochaines vacances de printemps. A l'époque où j'ai commencé cette œuvre, il n'y avait pas d'internet, ni de portable et il a fallu être fidèle et tenace pour servir le scoutisme. C'est après des efforts personnels continus que j'ai pu concrétiser ce projet. Une fois, je suis allé à Alger voir une imprimerie et j'ai découvert un autre monde.Je fus découragé et suis revenu bredouille car dans le monde du livre, il faut être riche ou avoir des connaissances pour sortir un manuel. Vu mon manque d'expérience, je croyais au départ qu'imprimer un livre était facile! Mais ça, c'est de la théorie...
Toute votre vie a été consacrée au scoutisme.Quel bilan faites-vous de cette participation soutenue à un mouvement qui fut actif durant la Révolution avant de constituer un élément déterminant de la société civile ?
Le scoutisme a la particularité d'être simple et objectif.La majorité de ses adhérents appartient à la classe moyenne. Mais l'éducation par le scoutisme s'adresse à tous. Effectivement, j'ai connu et côtoyé toute une génération de bons scouts. Parmi eux, j'ai encore bon nombre d'amis dans toute l'Algérie : Nord, Sud, Est, Ouest.
Le suivi et la communication avec les étrangers sont facilités grâce à l'internet. En France, le scoutisme est tellement bien pris en charge qu'il fonctionne comme si c'était un ministère ! Des chefs bénévoles s'acharnent à rendre le meilleur service possible à leur pays.
Là-bas, l'âge n'a aucune considération, ils peuvent activer de 7 à 77 ans. En Algérie, le scoutisme fut la première organisation nationale et son histoire est truffée de hauts faits dans le cadre de la réappropriation de l'identité nationale. D'ailleurs, les scouts algériens ont participé d'une manière significative aux manifestations de Sétif, Guelma, Kherrata. N'oublions pas que le premier chahid algérien de cette épopée fut Saâl Bouzid, tué par le commissaire de police de Sétif lors d'un défilé. Il est tombé le drapeau algérien à la main... J'ai été marqué par le sacrifice des scouts de l'époque. Ils avaient tous un mot d'ordre : «l'Algérie en échange de nos vies» ! Dans la vie civile, le scout donne l'exemple par son engagement au service du pays, dans son travail, son comportement, sa parole en famille et parmi les voisins. Une autre particularité chez nos chefs : chacun travaillait dans une administration différente, ce qui facilitera les informations des chefs qui ont à charge les jeunes. Le scoutisme à l'époque était plus «technique» qu'administratif. Pas comme maintenant...
La région de Djelfa a compté de nombreux scouts.Que pouvons-nous savoir de l'implantation du mouvement dans cette région et de ses grands hommes ?
Djelfa, comme vous l'avez si bien dit, fut une pépinière scoute en Algérie et ce depuis 1939, grâce à la diversité des mouvements scouts qui y activaient, à savoir les S.M.A, les B.S.M.A. et les scouts de France. Les premiers relèvent de l'organisation de feu Mohamed Bouras, les seconds ont une autre vue politique que les précédents et les troisièmes étaient les enfants des colons. Malgré ces différentes apellations, le but était le même pour tous : éduquer.
La concurrence était de rigueur. Les SMA avaient un petit avantage, celui de la langue car ils connaissaient l'arabe et le français. Dans chaque habitation djelfaouie, il y avait au moins un scout. L'Association des éclaireurs de France introduira le scoutisme en Algérie en 1914 pour les enfants d'européens installés en Algérie.Le premier groupe El Falah fut lancé en 1935 et surtout à partir de 1936 pour les autres villes du pays. Deux événements ont pu déclencher cet engouement pour le scoutisme :
a - le déploiement-manifestation particulièrement spectaculaire regroupant 3 000 éclaireurs, qui fut organisé à Alger à l'occasion des fêtes du centenaire en avril 1930.
b - l'accession du roi Farouk au trône d'Egypte, un pays musulman qu'on connaissait déjà par la presse et les oulémas. Le roi avait alors 16 ans et il a été présenté en tenue scoute ! L'image joua le rôle d'un catalyseur. A l'époque, c'est à travers le Pathé Journal, projeté avant chaque film au cinéma, que le public découvrit ce jeune souverain. Les musulmans vont donc s'intéresser au scoutisme car impressionnés par les manifestations ou fascinés par le portrait de Farouk. Enfin, des jeunes ayant fait le scoutisme chez les éclaireurs de France, iront créer des groupes S.M.A à Djelfa-ville, feu Mohamed Boussaïd, le créateur du groupe mythique groupe El Amel, avait un chantier de peinture à Aïn-Oussera. Durant cette époque, il n'y avait pas de distraction ou de loisirs. Alors notre peintre et ses amis, après leur travail, changeaient leur tenues vestimentaires et se dirigeaient à la gare voir les voyageurs monter et descendre du train. Quand, soudain, un jeune homme vêtu d'une chemisette avec des insignes colorés, portant un béret, un foulard au cou et un poignard à sa hanche fixa des yeux Si Mohamed et se dirigea vers lui. Il lui dit : «Pourrez-vous me prêter 20 sous car j'ai envie de continuer sur Djelfa et ma bécane est en panne.» Boussaïd lui répondit : «Est-ce que vous êtes sûr de me rembourser ?»
«Pour ça, n'ayez crainte».
Boussaïd insista pour savoir qui est cet «énèrgumène» :
«Vous qu'est-ce que vous êtes ?»
- «Je suis un scout de France
Notre jeune homme échangea l'adresse avec son bailleur et continua son chemin. Le travail fini, Boussaïd retourna à Djelfa et après quelques mois, il reçut un colis et un mandat. C'était le mandat du Français. Dans le colis, il y avait un livre intitulé Pour entrer dans le jeu. Boussaïd était très content. C'est lui-même qui me raconta cette histoire. Il m'avait dit qu'il avait lu et relu ce manuel qui tombait à pic.Il eut l'idée de prêter ce livre à son meilleur ami en l'occurrence feu Mohamed Benhadj qui fut également émerveillé par le contenu de ce livre. Ils échangèrent quelques mots et la décision fut prise rapidement : ils allaient mettre en pratique le contenu du livre. Sitôt chose faite, l'agrément fut donné par l'administration coloniale en un temps très court car nos chefs avaient eu le génie et l'intelligence de mettre un Français comme président d'honneur du groupe. Il s'agit de Yves Debrochard, le directeur du bureau de l'alfa de Djelfa.Mohamed Boussaïd était membre de la section des oulémas de Djelfa. Il correspondait avec Abdelhamid Ben Badis qui, à son tour, venait d'ouvrir un groupe scout à Constantine en 1936. Ce groupe s'appelait Essabah et son chant s'intitulait : «khodnaki lil majde wa samaa».
Ces frères philantropes ont su, par monts et vaux, faire démarrer le groupe El Amel de Djelfa, lui donner ce souffle de vie qui marquera de son empreinte la région et les enfants. Le scoutisme, partout en Algérie, a vécu ses très belles années de 1935 à 1975. A cette dernière date, il fut mis en veilleuse par une décision politique qui plaça le scoutisme sous la coupe de l'UNJA, en mai 1975. Les créateurs du groupe El Amel sont connus:
- Président d'honneur du groupe Yves Debrochard, directeur de la société d'alfa à Djelfa.
- Membres : Zenati Mohamed, Boussaïd Mohamed, Benhadj Mohamed, Si Saâd Benalia Ali, Lagoun Ali, Rahmani Abdelkader, Djaballah Bouhali, Hadjadji Mohamed, Meftah Saïd, Younès Belkheir, Cheikh Abderrahmane et Naâs Abdallah.
La loi scoute avec ses 10 articles est une merveille d'éducation religieuse et nationaliste. Grand nombre de jeunes qui ont fait l'école scoute devinrent utiles à la société, certains sont tombés au champ d'honneur tels que les frères Derrouazi, Benaïssa Dahmane et Nadjem Ahmed, lors de la guerre de Libération 1954-1962.
Comment voyez- vous l'avenir du scoutisme chez nous et dans le monde ?
Il y va de l'Algérie et surtout de sa jeunesse de voir unifier les deux fédérations nationales : celle des SMA, qui ont leur bureau au boulevard Zighoud-Youcef à Alger et les anciens qui sont à la rue Mohamed-Bouras de Bab-El-Oued (Alger). Car de toutes les organisations nationales, il n'y a que le scoutisme, phénomène mondial, qui est sérieux dans sa tâche pédagogique universelle et dont les membres pourraient, plus tard, encadrer les autres organisations de la société civile. Tout cela bénévolement. Comme l'a souligné le chef Mohamed Boussaïd «ya ouihe limane yatfa el michaâl fi yadih «(Gare à celui qui voit s'éteindre le flambeau entre ses mains). Ces dernières années, bien que ramant à contre-courant, la barque a été maintenue à flots et a même, par moments, procuré des satisfactions. Cette ténacité est un signe probant de la volonté de tous à demeurer sur la scène du mouvement associatif. Cette scène dont il est le foyer avec plus de 80 ans d'existence. Un scoutisme uni mérite politiquement un clin d'œil en reconnaissance de toutes ses contributions. En témoignage à cette œuvre colossale qu'est le scoutisme, un musée scout est en cours d'édification pour donner aux générations futures l'image d'un mouvement unique. Dans le monde, les Etats investissent encore davantage dans le scoutisme. Ils ont compris qu'il est le réservoir de cadres pour une vie sociale qu'ils veulent épanouir. Un penseur en a souligné l'intérêt : «Une nation vaut ce que vaut son scoutisme.»
Propos recueillis par R. R.


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