En dépit de leur gravité, les nouvelles accusations marocaines n'ont entraîné aucune réaction des autorités algériennes. Celles-ci sont restées silencieuses tout au long de la journée de mercredi bien que des bruits couraient sur une probable réponse officielle dans une affaire dépassant tout entendement. Abla Chérif - Alger (Le Soir) - Il faut dire aussi que durant cette journée, les réactions de toutes les parties concernées se sont fait connaître, dénonçant les propos tenus mardi par le ministère des Affaires étrangères marocain et dans lesquels il accusait Téhéran de soutenir le Front Polisario. Nacer Bourita a annoncé que son pays détenait «des preuves irréfutables» au sujet d'une prétendue livraison d'armes aux militaires sahraouis et que cette opération a été rendue possible grâce à «un diplomate de l'ambassade iranienne à Alger». La rupture des relations entre le Maroc et l'Iran a été officiellement proclamée à cette même occasion en raison, dit-il, «du soutien du Hezbollah au Polisario». Quelques heures plus tard, le Hezbollah réagissait à cette déclaration en publiant un communiqué repris par la chaîne télévisée libanaise LBC en niant les faits et en «déplorant le fait que le Maroc ait recouru à de tels procédés sous les pressions des Etats-Unis, d'Israël et de l'Arabie Saoudite (...) et qu'il aurait été plus judicieux de trouver des prétextes autres que ceux présentés pour rompre ses relations avec l'Iran». Principalement mise en cause, l'ambassade d'Iran a, elle aussi, réagi en démentant formellement les allégations mensongères marocaines sur une prétendue relation avec le Front Polisario» qu'il qualifie de «représentant légitime du peuple sahraoui». Elle fait part de «son engagement à exercer son rôle légal et naturel dans la consolidation et l'approfondissement des bonnes relations entre les deux pays frères, l'Iran et l'Algérie». Dans un autre communiqué, émanant cette fois du ministère iranien des Affaires étrangères, les autorités iraniennes ont affirmé que «ces accusations sont dénuées de tout fondement (...) l'Iran ayant toujours eu comme ligne de conduite le respect des pays avec lesquels il entretient des relations diplomatiques tout en respectant le principe de non-ingérence dans les affaires internes». Le Front Polisario a, quant à lui, qualifié cette affaire de «petit opportunisme politique visant à contourner la reprise des négociations directes demandées par l'ONU pour le règlement du conflit du Sahara Occidental passant par l'organisation d'un référendum d'autodétermination. M'hamed Kheddad (coordinateur de la Minurso) a nié toute coopération du Front Polisario avec l'Iran, qualifiant les propos du MAE marocain de «mascarade et grand mensonge (...) nous mettons au défi le Maroc d'avoir la moindre preuve, il vit dans la folie et ne sait pas comment échapper à son obligation de dialogue». Le soutien des monarchies du Golfe Les principales monarchies du Golfe ont accueilli avec grande satisfaction l'annonce de la rupture des relations diplomatique du Maroc avec Téhéran. Les Emirats arabes unis, Bahreïn, l'Arabie Saoudite et le Qatar jubilent de manière à peine voilée d'une telle décision et affirment se tenir «aux côtés» de Rabat dans le dossier du Sahara Occidental. Dans leurs communiqués, les dirigeants de ces pays arabes apportent leur soutien total à la démarche de Mohammed VI. Le soutien de ces monarchies n'a jamais fait l'objet d'aucun doute. Peu de temps avant le vote de la résolution (portant sur le Sahara Occidental), le roi n'a lésiné sur aucun moyen pour tenter de faire basculer les voix des membres du Conseil de sécurité en faveur d'un texte différent de celui publié par le SG de l'ONU et dans lequel il est directement accusé de bloquer le plan de paix. Alors que Mohammed VI se trouvait à Paris posant tout sourire avec MBS (le prince saoudien Mohamed Ben Salmane), son ministre des Affaires étrangères sillonnait les principales capitales du monde pouvant l'aider dans sa démarche. Obsédé par la question sahraouie, seul dossier pouvant lui concéder encore une crédibilité auprès de son opinion, le roi a multiplié des opérations de charme envers ses amis du Golfe engagés dans une guerre totale contre Téhéran. Y a-t-il eu deal entre le Maroc et les monarchies ? Les deux parties auraient eu tout à y gagner. Un texte qui ne désavouerait pas Rabat et une voix supplémentaire dans la coalition anti-chiite en quête perpétuelle d'un élargissement du front. Par ricochet, Rabat fait monter la pression dans la région en accusant l'Algérie qu'elle tente, coûte que coûte, d'amener à s'asseoir à la table des négociations en lieu et place des Sahraouis. Pour ce, Mohammed VI semble prêt à tout. Mais jusqu'où ira-t-il ? A. C.