Sidi Saïd «pense» que l'élection présidentielle est «une formalité. On le savait mais on ne s'attendait pas vraiment à ce qu'on nous le dise à un si haut niveau, pas de responsabilité peut-être mais d'implication, sûrement. Eh bien, puisqu'on n'attendait pas ça parce qu'on se fait encore quelques illusions sur la retenue des courtisans, le «patron» — avec ou sans cynisme dans le choix des mots — de l'UGTA a cru pertinent, voire intelligent, d'aller plus loin que tout ce qu'on pouvait imaginer : «nous, on ne demande pas à Abdelaziz Bouteflika de se présenter aux élections. Il est président de la République et on lui demande de le rester, pour continuer son œuvre» ! On pensait que les partisans d'Abdelaziz Bouteflika, les plus ostentatoires d'entre eux compris, allaient tout de même essayer de vendre l'idée d'une vraie élection où il y aurait de vrais (autres) candidats, d'une vraie confrontation des programmes et des personnalités, d'une compétition transparente et loyale. On pensait même qu'ils vont se mobiliser pour lui trouver des adversaires un tant soit peu crédibles qui puissent introduire quelque suspense dans les résultats sans quoi, un scrutin n'a plus de sens. Il ne doit pas y avoir grand monde à y croire mais on le faisait quand même par le passé, histoire de sauver les minima formels. Des illusions, on s'en faisait manifestement trop. S'il y avait des limites à attendre à ce niveau-là, peut-être que Abdelmadjid Sidi Saïd et Ali Haddad auraient commencé au moins par cette «formalité» : jeter un petit voile pudique sur leur connivence contre-nature qui continue de soulever l'hilarité de tout le cosmos. Le premier responsable d'un syndicat et le «patron des patrons» qui parlent d'une même voix sont d'accord sur tout, soutiennent le Président et le même… candidat et mènent le même «combat» au point qu'on ne voie quasiment jamais l'un sans l'autre, ça ne s'est jamais vu. Même… ici. Et si vous avez d'autres illusions quant à un autre son de cloche du côté syndical ou patronal, le président de la CGEA vous remènera les pieds sur terre : il réclame simplement sa petite place sur l'échiquier du… soutien. Il crie même à la «marginalisation» de sa structure parce que l'UGTA et le FCE sont hégémoniques et ne lui laissent pas le moindre strapontin. Pour y remédier, il se dispense même de l'effort d'investir le «terrain», il en appelle tout simplement au président de la République dont il dit, par ailleurs, qu'il ne peut pas avoir choisi ses favoris, parce qu'il a besoin de tout le monde. Si Abdelaziz Bouteflika se représente, on sait donc ce qui nous attend en termes de «campagne». A moins que sa candidature ne soit pas si évidente. On peut même déceler quelques signes d'hésitation — ou carrément de doute — dans le discours de Sidi Saïd et Haddad. «Continuer à être Président» peut quand même introduire l'éventualité d'une autre option. Et trop d'assurance tuant l'assurance, il pouvait y avoir de la panique. S. L.