A touché le fond mais creuse encore ? Entre une équipe à la dérive et un management versatile à sa tête, Leonardo Jardim est condamné à réussir l'exploit de transformer le cancre Monaco, 19e de L1 avec 15 points, en formation studieuse capable d'assurer son maintien. La nouvelle déroute samedi soir (2-0), à Dijon cette fois, a encore mis en lumière le mal qui ronge le club de la Principauté: personne n'est dans son assiette à Monaco, champion de France 2017 désormais condamné à jouer sa survie dans l'élite, et ce, à tous les échelons du club. La façon et le timing avec lesquels la direction a précipité le départ de Thierry Henry jeudi, laissant Franck Passi seul dans le rôle précaire de l'intérimaire, et les joueurs dans l'attente de l'arrivée de Leonardo Jardim, appelé à la rescousse quelques mois après avoir été poussé vers la sortie, feraient presque penser que ce match a été sacrifié. Outre les nombreuses erreurs effectuées depuis le début de la saison, notamment en terme de recrutement, le président Dmitri Rybolovlev et son bras droit Vadim Vasilyev paraissent aussi fautifs dans ce cas précis. Quant au directeur sportif Michael Emenalo, il n'a pas été force d'alerte. Car Passi, par fidélité et manque de temps, n'a rien changé à ce qu'Henry avait prévu. Et Jardim, pour ne pas entacher sa panoplie de sauveur et par manque de temps, n'a pas donné d'orientation nouvelle. «Groupe très perturbé» A un moment si important, contre un concurrent direct au maintien, chacun a donc laissé l'équipe couler dans un système de jeu qui n'est clairement pas adapté à la situation. La force de Monaco ces dernières saisons était son quatuor axial défensif, généralement dans un dispositif en 4-2-3-1. Actuellement, l'axe défensif n'est pas protégé. Dès la moindre erreur, la sanction tombe à l'image des deux cartons rouges reçus par la recrue Naldo... en trois matchs ! Quant aux milieux Benjamin Henrichs, Youri Tielemans ou Cesc Fabregas, ils ne sont pas dans le registre de Fabinho, Tiémoué Bakayoko ou Geoffrey Kondogbia. Aujourd'hui, outre la qualité de jeu totalement dégradée, les têtes n'y sont plus. Djibril Sidibé, transparent cette saison, l'avoue sans détour : «C'est très compliqué. On sent un groupe très perturbé avec ces changements d'entraîneurs. La réalité est que l'on est relégable aujourd'hui». Désormais, «on va attendre le discours de l'entraîneur pour essayer de nous remobiliser», a-t-il même lâché dès la fin de la rencontre en Bourgogne, avant un candide : «Tant qu'il y a de l'espoir, on va continuer à travailler et aller chercher des points». Le champion du monde paraît dépassé par la situation. Il n'est pas le seul. Le coup de massue est si fort que peu en interne sont capables de montrer une force de caractère. Souvent critiqué la saison dernière pour sa gestion très personnelle avant la Coupe du monde, Radamel Falcao semble, lui, être l'un des rares à y parvenir.
Catastrophe industrielle Moins vulgaire que la recrue William Vainqueur qui appelle à mettre ses «couilles sur le terrain», le capitaine colombien reste mobilisateur. «Nous sommes tous dans le même bateau (...). Avec Thierry Henry, nous n'avons pas réussi à changer la situation. Il faut continuer avec un meilleur esprit et lutter tous ensemble», a-t-il souhaité. Ce sera désormais avec son ancien chef de bande, Leonardo Jardim, qui dirigeait sa première séance au centre Henri Guérin de Ploufragan hier après-midi, qu'il faudra réussir cette périlleuse mission. Le Portugais revient en sauveur, trois mois après son éviction et une prime de licenciement de plus de 8 millions d'euros. De quoi faire grincer quelques dents en interne et en Principauté... D'autre part, il n'avait pas les clés en octobre. Pourquoi les aurait-il aujourd'hui ? Certes, l'effectif a un peu évolué et une cinquième arrivée hivernale a été officialisée dimanche, avec le prêt de l'attaquant Gelson Martins (Atlético Madrid). Mais comment le groupe réagira-t-il physiquement et mentalement à un nouveau changement de méthodologie de travail? Jardim, qui a signé jusqu'en 2021, a carte blanche pour sauver le club. Il a 16 matchs pour éviter une catastrophe industrielle aux conséquences insoupçonnées.