L'armée suit de très près les événements qui secouent le pays, notamment les manifestations contestant la candidature de Abdelaziz Bouteflika pour la présidentielle du 18 avril prochain. C'est ce que suggère, à chacune de ses sorties, le patron de l'état-major, le général de corps d'armée, Ahmed Gaïd Salah, qui, hier mardi encore, a donné un véritable coup de semonce à l'adresse de « certaines parties qui sont dérangées de voir l'Algérie stable et sûre». Kamel Amarni - Alger (Le Soir) - Quelles sont ces «certaines parties» dont parle le vice-ministre de la Défense nationale ? Ce n'est, en tout cas, pas la première fois que Gaïd Salah en parle, lui qui, il y a quelques mois, accusait ce qu'il désignait par «cercles occultes» de vouloir «mettre l'Algérie à feu et à sang, pour assouvir des ambitions et des intérêts». Hier mardi donc, et à partir de l'Académie interarmes de Cherchell où il effectuait une visite de travail, le chef de l'état-major de l'ANP a réitéré ses mises en garde : «J'ai toujours été, et à chaque occasion, franc et sincère, tout en assumant de dire la vérité lorsqu'il s'agit de la sécurité et la stabilité du pays. Le fait que l'Algérie ait pu réunir les facteurs de sa stabilité, à travers l'éradication du terrorisme et la mise en échec de ses objectifs, grâce à la résistance résolue dont a fait montre le peuple algérien, à sa tête l'Armée nationale populaire, aux côtés de tous les autres corps de sécurité, a déplu à certaines parties qui sont dérangées de voir l'Algérie stable et sûre, mais veulent la ramener aux douloureuses années de braises, lors desquelles le peuple algérien a vécu toute forme de souffrances et payé un lourd tribu.» Les marches et manifestations étant, toutes, admirablement pacifiques et à travers tout le pays, Gaïd Salah semble, à l'évidence, faire allusion, dans son propos, à des tentatives de «certaines parties» de faire dévier cet extraordinaire élan populaire. D'autant plus qu'il tenait à préciser que «ce peuple digne, authentique et conscient, qui a vécu ces dures épreuves et subi leurs affres, ne pourra, en aucun cas, mettre en péril sa sécurité et sa quiétude (…) Ce peuple qui a mis en échec le terrorisme et déjoué ses desseins et visées, est celui-là même qui est appelé, aujourd'hui, à savoir comment se comporter face à la situation que traversent son pays et son peuple, et comment s'ériger en rempart contre tout ce qui pourrait exposer l'Algérie à des menaces aux retombées imprévisibles». Ceci étant, Gaïd Salah ne manquera pas de prévenir, s'agissant du rôle de l'institution militaire, que «nous sommes conscients que cette sécurité et cette stabilité ainsi retrouvées continueront à s'ancrer et s'enraciner, que le peuple algérien continuera à en bénéficier, et que l'Armée nationale populaire demeurera le garant de cet acquis si cher, grâce auquel notre pays a retrouvé sa notoriété». S'adressant ensuite aux cadres et officiers de l'armée, Gaïd Salah évoquera les dernières évolutions connues par l'institution, dans tous les domaines et des moyens mis à sa disposition. «Tout cela, commentera-t-il, dénote clairement l'importance majeure accordée à l'accomplissement des nobles missions assignées dans le but de préserver la sécurité de notre patrie et sauvegarder son indépendance, sa souveraineté et sa stabilité». Le chef de l'état-major dira également qu'il en tire une fierté et que cela «nous donne l'espoir en l'avenir tant que le peuple algérien est capable de donner une jeunesse comme vous et comme tous les éléments de l'Armée nationale populaire, digne héritière de l'Armée de libération nationale. Des hommes qui connaissent parfaitement les ennemis de leur peuple et leur patrie, qui sont parfaitement conscients de leurs desseins macabres, et de leurs portées et qui sauront, sans doute, préserver leur histoire nationale et valoriser leur Révolution et ses artisans». Après sa dernière sortie, en 6e Région militaire à Tamanrasset, d'il y a quelques jours, où il s'engageait, à l'occasion, «personnellement», insistait-il, à réunir toutes les conditions pour «sécuriser totalement la prochaine élection présidentielle», Gaïd Salah a préféré, cette fois, à partir de Cherchell, consacrer toute son intervention au seul aspect «de la sécurité et de la stabilité». Mettant en garde ceux qu'il appelle « les ennemis du peuple, de la patrie (…) aux desseins macabres», le chef de l'état-major et vice-ministre de la Défense nationale n'a, à aucun moment, évoqué la prochaine élection présidentielle, ni trop parlé de Abdelaziz Bouteflika qu'il a cité une seule fois seulement, ce qui est, depuis quelques jours, remarqué chez tous les autres membres du gouvernement. Ce qui confirme, du reste, qu'il s'agit, là, d'une consigne précise. K. A.