Abdelaziz Bouteflika a annulé officiellement, ce lundi 11 mars, l'élection présidentielle du 18 avril prochain et procédé à la nomination de Noureddine Bedoui comme nouveau Premier ministre, en remplacement de Ahmed Ouyahia, et de Ramtane Lamamra au poste de vice-Premier ministre créé par décret présidentiel le même jour et a annoncé l'organisation prochaine de sa «Conférence nationale inclusive », point de départ de la suite du processus de substitution à la présidentielle renvoyée sine die. Kamel Amarni - Alger (Le Soir) - Dans un message à la Nation, Abdelaziz Bouteflika fait, cette fois, sept annonces et engagements en réponse à la grande mobilisation populaire contestant sa candidature pour un cinquième mandat. «L'Algérie, dira-t-il, traverse une étape sensible de son histoire. Ce 8 mars, pour le troisième vendredi consécutif, d'importantes marches populaires ont eu lieu à travers le pays. J'ai suivi ces développements et comme je vous l'ai déjà annoncé le 3 de ce mois, je comprends les motivations des nombreux compatriotes qui ont choisi ce mode d'expression (…)». Bouteflika affirmera, ensuite, «qu'après les consultations institutionnelles requises par la Constitution, j'invoque la grâce et le soutien de Dieu Tout-Puissant dont nos glorieux martyrs et nos valeureux moudjahidine ont consacré l'immortalité, pour présenter à l'adresse de vos cœurs et à vos consciences les décisions suivantes». Bouteflika , voulant manifestement frapper les esprits, commencera par celle, d'entre les décisions, qu'il sait que tout le monde réclamer : «Premièrement, il n'y aura pas de cinquième mandat et il n'en a jamais été question pour moi, mon état de santé et mon âge ne m'assignant comme ultime devoir envers le peuple algérien que la contribution à l'assise des fondations d'une nouvelle République en tant que cadre du nouveau système algérien que nous appelons de tous nos vœux (…) ». Il sous-entend par là que même s'il était élu, il ne serait pas allé jusqu'au bout de son mandat. Puis il ajoutera immédiatement après : «Deuxièmement, il n'y aura pas d'élection présidentielle le 18 avril prochain. Il s'agit de satisfaire une demande pressante que vous avez été nombreux à m'adresser dans votre souci de lever tout malentendu quant à l'opportunité et à l'irréversibilité de la transmission générationnelle à laquelle je me suis engagé (…).» A l'évidence, Bouteflika s'adresse, ici, à l'opposition qui, dans son ensemble, réclame, depuis les grandes marches du 22 février, le report de la présidentielle. En troisième lieu, Bouteflika annonce : «J'ai décidé de procéder tout prochainement à des changements importants au sein du gouvernement. Ces changements constitueront une réponse adéquate aux attentes dont vous m'avez saisi, ainsi qu'une illustration de ma réceptivité à l'exigence de redditions des comptes et d'évaluation rigoureuse dans l'exercice des responsabilités et à tous les niveaux et dans tous les secteurs.» Les premières nominations respectives de Bedoui et de Lamamra donnent déjà un aperçu de la prochaine configuration de ce gouvernement : des ministres non partisans et une sanction directe infligée au FLN et au RND que la rue a particulièrement malmenés depuis quelques jours. Bien sûr, et pour la suite de cette nouvelle feuille de route de Bouteflika, et comme prévu, il est question de «la Conférence nationale inclusive et indépendante et qui sera, affirme-t-il dans son message d'hier lundi, une enceinte dotée de tous les pouvoirs nécessaires à la discussion, l'élaboration et l'adoption de tous types de réformes devant constituer le socle du nouveau système qui porte le lancement du processus de transformation de notre Etat-Nation, que j'estime être ma mission ultime en parachèvement de l'œuvre dont Dieu Tout-Puissant m'a accordé la capacité et pour laquelle le peuple algérien m'a donné l'opportunité». Bouteflika affirmera à ce propos que cette conférence sera mise «sous la direction d'une instance présidentielle plurielle, avec à sa tête un président qui sera une personnalité indépendante, consensuelle et expérimentée». Fort probablement, l'ancien ministre des Affaires étrangères, Lakhdar Ibrahimi. Bouteflika affirme que cette conférence nationale «doit s'efforcer de compléter son mandat avant la fin de l'année 2019». Il s'agit, là, de la seule échéance fixée dans le temps dans la «nouvelle feuille de route» de Bouteflika. Une feuille de route qui comprend également une nouvelle Constitution dont le projet «qui émanera de la conférence sera soumis à un référendum populaire». Et ce sera également à cette même «Conférence nationale indépendante de fixer souverainement la date de l'élection présidentielle à laquelle, s'engage encore Bouteflika, je ne serai en aucun cas candidat». Un gouvernement de compétences nationales pour organiser la prochaine présidentielle Pour cette élection à laquelle il ne sera pas candidat mais pour laquelle il ne fixe pas de date, Abdelaziz Bouteflika prévoit d'en confier l'organisation « sous l'autorité exclusive d'une commission électorale nationale indépendante dont le mandat, la composition et le mode de fonctionnement seront codifiés dans un texte législatif spécifique qui s'inspirera des expériences et des pratiques les mieux établies à l'échelle internationale ». Il s'agit, là, sans doute, de la concession la plus importante du pouvoir en termes d'organisation des élections car il est question «d'organisation» et non plus de «supervision» ou de surveillance» du scrutin. Aussi, Bouteflika prévoit-il, et concernant toujours la prochaine élection présidentielle, la «constitution d'un gouvernement de compétences nationales bénéficiant du soutien de la conférence nationale. Ce gouvernement assumera la supervision des missions de l'administration publique et des services de sécurité et apportera sa pleine collaboration à la commission électorale indépendante». Enfin, Bouteflika s'engage «à ne ménager aucun effort pour que les institutions , structures, démembrements de l'Etat et collectivités locales se mobilisent pour concourir à la pleine réussite de ce plan de travail (...) De même «qu'à remettre les charges et les prérogatives de président de la République au successeur que le peuple algérien aura librement élu». Ceci étant, en procédant à ce report de l'élection présidentielle initialement prévue le 18 avril prochain, ce qui est une première depuis les fameuses législatives de juin 1991, Bouteflika aura ainsi, et comme prévu, abattu sa dernière carte pour ne jamais sortir par la petite porte. Il signifie, pour ainsi dire que, si changement devait avoir lieu, il ne serait jamais contre lui, mais par lui… K. A.
Le Président Bouteflika met fin aux fonctions du président et des membres désignés de la HIISE Le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, a signé lundi un décret présidentiel mettant fin aux fonctions du président de la Haute Instance indépendante de surveillance des élections (HIISE), Abdelouahab Derbal, et des membres désignés de cette instance, indique un communiqué de la présidence de la République. Noureddine Bedoui nommé Premier ministre en remplacement d'Ouyahia, Lamamra vice-Premier ministre Le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, a reçu, lundi à Alger, MM. Noureddine Bedoui et Ramtane Lamamra. Lors de cette audience, le chef de l'Etat a procédé à la nomination de M. Bedoui au poste de Premier ministre en remplacement de M. Ahmed Ouyahia. M. Bouteflika a également nommé, à la même occasion, M. Lamamra au poste de vice-Premier ministre, ministre des Affaires étrangères. Le Président Bouteflika a chargé M. Bedoui de former le nouveau gouvernement. APS