Si la coopération politique bilatérale est la marque des relations entre l'Algérie et le Nigeria, il y a, à l'évidence, beaucoup à faire dans le domaine des échanges économiques et commerciaux. Qu'on en juge : des chiffres démontrent que le volume des échanges est, au jour d'aujourd'hui des importations ridiculement bas. Nous importons de ce géant d'Afrique de 200 millions d'habitants pour 700 000 dollars et exportons pour une valeur de 500 000 dollars. Hier, la Chambre algérienne de commerce et d'industrie (Caci), qui poursuit son cycle de rencontres avec les représentations diplomatiques installées, à Alger a organisé une journée d'information sur le potentiel des échanges commerciaux et les opportunités d'affaires. Nombreux étaient les entrepreneurs algériens, tous secteurs confondus, à marquer par leur présence leur intérêt. C'est donc dans une atmosphère studieuse que s'est déroulée cette journée d'information, tenue rappelons-le à la salle El Djazaïr au palais des expositions, Safex, Pins Maritimes. Il est indiqué que cette journée est le prélude à la tenue prochaine d'une exposition spécifique des produits algériens au Nigeria et sera axée sur les possibilités offertes par le marché nigérian et les questions liées au climat des affaires dont la bonne santé détermine l'attractivité des investisseurs. C'est le chargé d'affaires de l'ambassade du Nigeria à Alger, Murtala Jimoh, qui donnera le coup d'envoi de cette journée et chargera, Emmanuel Adeshima Ayodji, directeur de la promotion des investissements d'entrer dans le vif du sujet. Il développera dans un exposé succinct et répondra au cours du débat qui a fait suite à une foule de questions soulevées par les participants visiblement motivés. Grand pays producteur de pétrole, le Nigeria tente depuis 2015 de se libérer de cette dépendance et veut s'ouvrir à d'autres perspectives économiques hors hydrocarbures. Ces nouvelles dispositions sont bien comprises par les mastodontes de l'industrie mondiale qui ont vite fait de se placer. La Chine, les Etats Unis, le Japon, l'Afrique du sud, la France, etc. sont de ceux-là. Et dans ce tableau, l'Algérie n'y figure pas évidemment. Le directeur des investissements nigérian qui montre cette réalité exprime son souhait que l'Algérie fera vite de les rejoindre. Pour cela, il s'attardera longtemps sur les avantages comparatifs qu'offre l'économie nigériane. Une moyenne d'âge d'une population (qui atteindra 400 millions en 2050) de 18,4 pour une population active (15-60 ans) de 19 millions. Le PIB serait selon le conférencier le plus élevé d'Afrique. Agriculture, industrie, services sont les secteurs hors hydrocarbures que veut promouvoir le Nigéria en mettant en place des conditions susceptibles d'attirer les investisseurs étrangers qui jouiront de toutes les facilitations dans un climat des affaires où les contraintes administratives, bancaires et douanières sont levées. Ainsi plusieurs réformes ont été introduites, le coût d'enregistrement d'une entreprise est passé à 26% et passe, pour le temps, de 5 jours à une demi-journée. Facilités aussi dans la délivrance du permis de construire, raccordement électrique de l'entreprise, exonération fiscale durant 5 ans ; le visa est délivré en 48 heures. Par ailleurs, les investisseurs ont le droit de détenir 100% du capital de leur société (et peuvent s'ils le souhaitent s'associer à un partenaire local) et disposer de leurs gains et le transférer à l'étranger. Si la croissance hors hydrocarbure reste modeste, l'inflation qui frôlait les 40% serait tombée à 11% et le taux de change relativement stable. Ces réformes auraient donc insufflé un dynamisme à l'économie nigériane qui de lanterne rouge sur 190 pays, serait passée à la 146e place. Les Nigérians tiennent à rassurer les investisseurs qu'il n'y aura pas d'expropriation ou de nationalisation des entreprises étrangères. Débat ouvert donc sur les opportunités d'investissement à la lumière des avantages qu'offre un climat des affaires assaini. Abderrahmane Massab, patron du groupe familial El Mokadem, qui interviendra dans le débat pour livrer son expérience constate avec beaucoup de regret que la dimension algérienne aux frontières sud du pays est quasiment ignorée par le pouvoir central. Ces régions du sud, de par leur proximité avec les pays du Sahel, revêtent une importance stratégique comme le lui montrent ses 45 ans de pratique et parce qu'il y a beaucoup à gagner. Il cite l'Assihar de Tamarasset réactivé après 8 ans d'arrêt qui donne un aperçu des potentialités de la région ouverte sur le Niger vers le Nigeria. Bien sûr, l'on ne peut ne pas citer la route transaharienne Alger-Lagos qui peut jouer un rôle majeur dans les échanges intra-africains, un atout dans la logistique, mais il faut aussi l'entretien des routes qui lui sont attachées. Cet investisseur originaire d'Adrar, installé depuis 1960 à Kano (2e ville du Nigeria avec 15 millions d'habitants), met en avant les frontières qui ne sont pas ouvertes et n'aident pas les hommes d'affaires à qui appartient la responsabilité de construire un pays et non les politiques. Il est demandé l'esprit pionnier à nos entrepreneurs. Le Nigeria, c'est aussi, au plan agricole, le deuxième pays producteur de tomates après l'Egypte et le 14e au monde, qui manque d'usines de transformation et qui à défaut pourrissent sur les champs ; c'est un gros producteur de lait qui a besoin de manufactures… Brahim Taouchichet