Le vice-ministre de la Défense nationale et chef de l'état-major de l'Armée nationale populaire, le général de corps d'armée Ahmed Gaïd Salah annonce avoir donné «des ordres et des instructions strictes aux forces de l'ordre », pour faire face aux tentatives «d'infiltrer les marches et porter d'autres emblèmes que notre emblème national par une infime minorité». Kamel Amarni - Alger (Le Soir) - Au 3e jour de sa visite à la 3e Région militaire de Béchar, le patron de l'armée axera en effet l'essentiel de son intervention sur cette question de l'emblème. Il dira, ainsi, devant les cadre, et les officiers de la région que : «Il m'appartient également en cette occasion d'attirer l'attention sur une question sensible, à savoir la tentative d'infiltrer les marches et porter d'autres emblèmes que notre emblème national par une infime minorité.» Assurément, il fait allusion, ici, au drapeau amazigh qui, depuis le début cet extraordinaire mouvement populaire, le 22 février dernier, est constamment brandi et adopté par des millions d'Algériens à travers tout le pays. Cet emblème, représentant non pas une entité ethnique ou politique, mais l'ensemble de l'Afrique du Nord, comme l'atteste sa présence dans l'ensemble des régions berbérophones des pays du Maghreb, est devenu également le symbole de la culture et de l'identité amazighes. Lors des marches, il n'est d'ailleurs pas déployé par les manifestants, contre l'emblème national, mais côte à côte avec lui. En dix-sept grandioses manifestations, cette cohabitation n'a jamais fait l'objet de la moindre tension entre les manifestants, nulle part. Il est, en outre, à relever qu'au contraire, s'agissant de l'emblème national officiel, jamais les Algériens, d'est en ouest, du nord au sud et au sein de l'immigration, toutes catégories sociales confondues, ne se sont réconciliés avec le drapeau national qu'ils portent tous, spontanément et avec fierté, que durant ces marches populaires. Et même pendant les jours de semaine où le drapeau et les couleurs nationales, vert, rouge et blanc sont déployées et brandis partout. C'est d'ailleurs, peut-être, le seul point qui fait l'unanimité de l'ensemble des Algériens lors des manifestations. Le chef d'état-major a, certes, tout à fait raison lorsqu'il dira que « l'Algérie ne possède qu'un seul drapeau pour lequel des millions de chouhada sont tombés en martyr. Un emblème unique qui représente le symbole de souveraineté de l'Algérie et de son indépendance, de son intégrité territoriale et de son unité populaire». Mais l'on s'interroge sur les motifs de son inquiétude lorsqu'il ajoutera qu'il est inacceptable de manipuler les sentiments et émotions du peuple algérien». Avant d'annoncer : «De ce fait, des ordres et des instructions ont été donnés aux forces de l'ordre pour une application rigoureuse des lois en vigueur et faire face à quiconque tente encore une fois d'affecter les sentiments des Algériens à propos de ce sujet sensible et délicat.» Concrètement, cela donnera lieu immanquablement à des tensions entre des manifestants et les forces de l'ordre lors des prochaines manifestations. Des tensions inutiles dont le pays peut vraiment se passer en cette conjoncture politique déjà assez difficile et compliquée. L'armée jette d'ailleurs tout son poids pour permettre au pays de traverser cette crise à moindre coût, tout en garantissant un fonctionnement normal, et surtout vital des institutions, réunir les conditions nécessaires pour l'organisation d'élection présidentielle crédible et, enfin, éviter des transitions aventureuses aux conséquences qui pourraient être fatales pour le pays. Gaïd Salah, qui a largement expliqué cette feuille de route de l'armée, pour faire face à la crise, à travers ses précédentes interventions à l'occasion de sa visite en 3e Région militaire, a préféré, hier mercredi, terminer son discours par une note d'optimisme : «Nulle crainte pour l'avenir de l'Algérie, pays des millions de chouhada, car elle saura, grâce à Allah le Tout-Puissant, puis grâce à ses enfants dévoués, comment se frayer son chemin vers un havre de paix. L'élan de développement reprendra avec une cadence plus rapide, une détermination plus forte et des objectifs plus nobles Il n'y aura plus de place à la crise économique, ni tout autre crise, une fois que l'Algérie se sera libérée des griffes de la bande, des prédateurs et de ceux qui ont trahi la confiance, et qu'elle restera attachée à son référentiel novembriste national. Car l'Algérie est capable, parfaitement capable, d'atteindre son ultime objectif : celui que lui voulaient nos valeureux chouhada». A noter, par ailleurs, que durant cette visite, Gaïd Salah a plus que jamais concentré son tir sur le règne de Abdelaziz Bouteflika. K. A.