Le patron du groupe Condor est «tombé», entraînant, dans sa chute, vingt personnes, parmi lesquelles de hauts cadres et un ancien ministre dont le dossier a été transmis à la Cour suprême, seule instance compétente pour la gestion des dossiers d'ex-membres de l'exécutif. Abla Chérif - Alger (Le Soir) - L'affaire a fait également avancer de manière notable l'enquête progressive qui se mène autour du financement occulte de la campagne présidentielle pour le cinquième mandat puisque le chargé des finances de cette campagne figure, lui aussi, dans le lot du groupe de personnes incarcérées et conduites ce jeudi à la prison d'El-Harrach. Sur le sujet, la justice est peu prolixe. Les communiqués officiels que publient les tribunaux en charge des affaires anti-corruption dévoilent, au fur et à mesure, les noms des personnes impliquées dans ce qu'elle appelle le financement occulte de la campagne. Le chargé des finances de cette opération est le onzième nom qui s'affiche dans la liste des personnes concernées. Avant lui, plusieurs hommes d'affaires, parmi lesquels le patron de l'entreprise Sovac et celui de N'gaous (Mazouz) ont été, également, désignés comme étant auteurs de cette pratique. L'ancien Premier ministre et chef de campagne de Bouteflika, Abdelmalek Sellal, se trouve, lui aussi, poursuivi sur cette même base dans l'affaire Mazouz. Le communiqué, publié ce jeudi par le tribunal de Sidi-M'hamed, fait mention d'une charge ayant un rapport direct avec le sujet puisqu'il évoque le «financement occulte de partis politiques». Le texte ne désigne pas les partis concernés, mais il impute cette charge à Abderrahmane Benhamadi, patron de Condor, et la vingtaine de personnes qu'il a entraînées avec lui. Parmi ces dernières, on retrouve ses deux frères , le DG de Travocovia, filiale de Condor, trois cadres de Mobilis, deux autres cadres du ministère de la Santé, le DG de la BEA et le chef d'inspection fiscale de Chéraga. Il faut également savoir que l'ancien ministre des Télécommunications, Moussa Benhamadi, a été, lui aussi, auditionné pour les faits reprochés au patron de Condor et aux vingt autres personnes mises sous mandat de dépôt ce mercredi. Ce groupe est poursuivi pour blanchiment d'argent, transferts de biens obtenus par des faits de corruption à l'effet d'en dissimuler la source illicite dans le cadre d'une organisation criminelle, participation à la dilapidation et à l'utilisation de fonds de banque, incitation d'agents publics à utiliser leur influence réelle ou supposée dans le but de bénéficier d'indus avantages et financement occulte de partis politiques. L'audition des mis en cause a duré près de deux jours pleins. Elle s'est poursuivie jusque dans l'après-midi de jeudi, soit plusieurs heures après l'arrivée de Abderrahmane Benhamadi et de ses deux frères à El-Harrach. Les deux anciens Premiers ministres, Abdelmalek Sellal et Ahmed Ouyahia, ont également comparu devant le juge d'instruction. Ils sont poursuivis pour octroi de privilèges illégaux ayant permis à Abderrahmane Benhamadi d'étendre sa fortune et de pouvoir bénéficier de marchés juteux. Ce dernier est, quant à lui, pratiquement, accusé de faire partie de cette longue liste d'hommes d'affaires ayant prospéré sous l'ère Bouteflika et qui le lui rendaient en lui permettant d'asseoir son pouvoir sur leur fortune. La chute de l'ex-Président a occasionné une déchirure brutale et spectaculaire du tissu mis en place par les oligarques. Les enquêtes judiciaires contre ce phénomène continuent d'être menées dans un contexte marqué par des changements réguliers opérés par Abdelkader Bensalah dans le corps de la justice. Tous les hommes placés par l'ancien ministre de la Justice, Tayeb Louh, ont été écartés aussi bien au niveau des tribunaux qu'à la Cour suprême. A. C.