Le leader accueille son dauphin: Leipzig-Munich, ce soir (19h30), est le premier sommet de la Bundesliga 2019-2020. Un choc entre modernité et tradition, entre modèles de développement différents, et même entre cultures de deux Allemagnes qui s'ignorent. Riche Bavière contre ex-RDA Munich est la ville la plus riche d'Allemagne, et trône au coeur d'une Bavière fière de ses puissantes industries (BMW, Siemens, Adidas), de sa prospérité tranquille et de ses vivantes traditions. Le Bayern est un miroir de cet environnement: club richissime, sûr de sa force jusqu'à friser parfois l'arrogance, il tire sa confiance de ses cinq Ligues des champions et de ses 29 titres de champion d'Allemagne! La devise du club, «Mia san Mia», est une expression bavaroise qui, littéralement traduite, signifiec: «Nous sommes nous». Difficile de mieux revendiquer son identité! En face, le RB Leipzig est le dernier-né des clubs professionnels allemands, implanté dans la ville comme un corps étranger en 2009 par la volonté du patron de la firme autrichienne Red Bull, Dietrich Mateschitz. Dans une région où le football a été sinistré par les conséquences de la réunification allemande en 1990, Leipzig est la seule ville de l'ex-RDA (hors Berlin avec l'Union) à entretenir une équipe de première division. Tous les grands clubs de l'époque communiste, le Dynamo Dresde, Hansa Rostock ou Magdeburg, ont plongé dans les divisions inférieures, faute d'un tissu économique local suffisant pour les soutenir. Leipzig, comme son club, est aujourd'hui un îlot de dynamisme bien isolé dans une région, la Saxe, où règne le sentiment de déclassement, et qui vient de voter à plus de 27% pour l'extrême-droite au dernier scrutin régional. Jeunes loups à Leipzig Tradition oblige, le Bayern est un club qui, officiellement, est entre les mains de ses 290.000 membres, tandis que Leipzig est contrôlé par la firme Red Bull. Leurs philosophies de développement sont différentes. Et répondent aussi à leurs possibilités budgétaires. Si les Bavarois misent sur des stars déjà au sommet de leur art, et grassement payées, les Saxons se sont imposés une règle: aucun recrutement de joueurs de plus de 25 ans. Et de préférence de jeunes espoirs en début de carrière, bien meilleur marché, que l'on fait progresser en leur donnant rapidement des responsabilités. La filière française fonctionne notamment à merveille à Leipzig: Ibrahim Konate et Dayot Upamecano sont la charnière centrale de la sélection espoirs (U21) tricolore, Christopher Nkunku et Nordi Mukiele ont également joué sous le maillot des «bleuets». Leurs noms ne brillent pas encore au firmament du foot européen, mais leur coéquipier Timo Werner était également un inconnu il y a trois ans. Avant de devenir un cadre de l'équipe nationale. Jeunesse dorée à Munich A Munich en revanche, tous les moins de 25 ans, censés succéder à la génération dorée des Robben-Ribéry et autres Hummels-Boateng, sont déjà des joueurs reconnus. Corentin Tolisso, Benjamin Pavard et Lucas Hernandez sont champions du monde avec la France, Kingsley Coman brille aussi avec les Bleus, et les Allemands Joshua Kimmich, Niklas Süle ou Serge Gnabry sont incontournables dans leur équipe nationale. Les arrivées au mois d'août d'Ivan Perisic (30 ans) et Philippe Coutinho (27 ans) font remonter la moyenne d'âge, mais perpétue la tradition de recrutement de grands joueurs. Evidemment, les valeurs sur le marché des deux effectifs sont incomparables. Le Bayern, dont l'effectif est estimé à 866 millions d'euros (source transfermarkt.de), vient de débourser 80 millions pour Hernandez et 35 pour Pavard. Coman est estimé à 50 millions, Gnabry à 60, etc. En face, le RB possède un effectif valorisé à 521 millions, mais la plupart des joueurs ont été acquis jeunes, à un prix très inférieur à leur valeur actuelle. Cette jeunesse laborieuse de Leipzig aura à coeur de démontrer, aujourd'hui, qu'elle peut donner la leçon à la jeunesse dorée de Munich.